Prétextant le contexte régional explosif, le président islamo-conservateur vise surtout à renforcer ses pouvoirs personnels en convoquant des élections anticipées à un an et demi de la fin de son mandat. Des élections présidentielle et législatives anticipées auront lieu en Turquie dimanche 24 juin, a annoncé le président turc Recep Tayyip Erdogan, à l'issue de son entretien avec le chef du parti ultranationaliste MHP, Devlet Bahçeli, a rapporté l'agence de presse officielle Anadolu. "Nous avons décidé de tenir ces élections le dimanche 24 juin 2018", a déclaré M. Erdogan lors d'un point presse à Ankara, prenant de court surtout ses opposants après avoir démenti plusieurs fois une telle éventualité. Ainsi, à un an et demi de la fin de son mandat, le président islamo-conservateur a trouvé la parade pour couper l'herbe sous le pied de ses opposants et se prémunir contre toute nouvelle tentative de putsch, en convoquant ces élections qui vont lui permettre de renforcer ses pouvoirs personnels. Son alliance avec les nationalistes constitue un appui pour son régime qui mate les Kurdes aussi bien en Turquie qu'en Syrie, où il mène une guerre d'extermination contre les Kurdes syriens à Afrine en toute impunité et sans l'ombre de toute réaction d'une communauté internationale, prompte à chercher des indices de crimes ailleurs. Et c'est justement par les bouleversements régionaux qu'Erdogan veut faire passer la pilule de ces élections anticipées, alors qu'en face de lui il n'y a quasiment plus d'opposition. Car, outre les leaders de l'opposition qu'il a emprisonnés ou poussés à l'exil, il a réussi à instaurer un climat de terreur au sein de la société civile et neutralisé la presse indépendante à coups d'arrestations, de procès et de mise sous tutelle des journaux qui contestent sa politique intérieure et étrangère. "Au regard des opérations que nous menons en Syrie, ainsi que des développements de portée historique vécus dans notre région, en particulier en Syrie et en Irak, il est indispensable pour la Turquie de surmonter les incertitudes", a-t-il déclaré, lit-on encore sur le site de l'agence de presse officielle Anadolu. "Le Haut-Comité électoral va immédiatement commencer les préparatifs pour ces élections", a déclaré M. Erdogan. Pour rappel, selon le calendrier initial, les élections présidentielle et législatives devaient se tenir simultanément le 3 novembre 2019, précédées par un scrutin municipal en mars de la même année. Le double scrutin présidentiel et législatif est crucial, car il marquera l'entrée en vigueur de la plupart des mesures renforçant les prérogatives du chef de l'Etat, adoptées lors d'un controversé référendum constitutionnel en avril 2017. Cette révision constitutionnelle permet à M. Erdogan, âgé de 64 ans, de briguer deux nouveaux mandats présidentiels de cinq ans. L'homme fort de la Turquie est au pouvoir depuis 2003, d'abord comme Premier ministre (2014), puis comme président. Lyès Menacer/Agence