Tel qu'édicté par l'article IV de ses statuts, le FMI a délégué une mission qui s'est récemment rendue en Algérie où elle a eu des consultations avec les responsables nationaux de l'évolution de la politique économique du pays et recueilli des données économiques et financières. A leur retour de mission, les experts du FMI ont rédigé un rapport qui a servi de cadre aux délibérations du conseil d'administration dont un résumé concis a été transmis aux autorités du pays et rendu public vendredi. Le FMI relève que malgré un assainissement considérable des finances publiques en 2017, les déficits, qu'ils soient budgétaire ou courant, demeurent élevés au moment où est enregistrée une croissance fortement ralentie du PIB réel, et ce, en raison d'une réduction de la production d'hydrocarbures. Autre indicateur mis en avant pour illustrer la passe morose de l'économie nationale : le chômage s'est hissé à 11,7% en septembre 2017, contre 10,5% un an plus tôt, et reste particulièrement élevé chez les jeunes (28,3%) et chez les femmes (20,7%), a consigné le FMI dans son rapport où il est également relevé que le taux d'inflation moyen s'est établi à 5,6%, contre 6,4% en 2016 en conséquence du ralentissement de l'inflation pour les produits manufacturés et les services. Quant aux réserves de change, que le FMI trouve «abondantes» tout de même, elles ont diminué de 17 milliards de dollars, pour s'établir à 96 milliards de dollars, alors que la dette extérieure reste négligeable, contrairement à la dette publique intérieure qui a considérablement augmenté depuis 2016, tout en demeurant modérée. «Les administrateurs relèvent que l'Algérie est confrontée à des défis de taille en raison de la baisse des prix pétroliers depuis 2014 et du ralentissement de son activité économique. Tout en saluant les efforts des autorités pour gérer le processus d'ajustement, ils prônent la poursuite de l'assainissement des finances publiques et l'application de réformes structurelles ambitieuses en vue de faciliter la diversification du modèle de croissance et de soutenir le développement du secteur privé», note la directrice générale du FMI dans le résumé envoyé aux autorités du pays. Le flot d'indicateurs relevé par sa mission en Algérie recommande au FMI de réitérer le conseil déjà entendu de «poursuivre l'assainissement des finances publiques et l'application de réformes structurelles ambitieuses en vue de faciliter la diversification du modèle de croissance et de soutenir le développement du secteur privé». L'augmentation des dépenses budgétaires en 2018 suivie par la reprise de l'assainissement des finances publiques à moyen terme, le recours à la planche à billets, ou «le financement monétaire des déficits budgétaires» comme le dit pudiquement le FMI, les restrictions temporaires aux importations, ainsi que des réformes structurelles visant à diversifier l'économie, sont des mesures prises par les autorités algériennes qui semblent agréer dans une certaine mesure le FMI, du moins certains de ses administrateurs au moment où la plupart d'entre eux estime que cette approche pourrait certes offrir un répit à l'économie à court terme, mais également faire peser des risques considérables sur les perspectives économiques, a expliqué la directrice du FMI. Cette dernière a confié aux autorités algériennes que l'approche que ceux-ci ont privilégiée « aura comme conséquences probables d'exacerber les déséquilibres budgétaires et extérieurs, d'alimenter l'inflation, d'accélérer la diminution des réserves de change, d'aggraver les risques pour la stabilité financière et, en fin de compte, de ralentir la croissance». Selon la directrice du FMI, ses collaborateurs recommandent à l'Algérie une approche susceptible de donner de meilleurs résultats tout en étant plus viable. En effet, à l'attention de nos gouvernants, il est souligné «(qu')il serait possible de mener un assainissement progressif des finances publiques dès 2018 sans recourir au financement par la banque centrale, mais en s'appuyant sur une variété de mécanismes de financement, dont l'emprunt extérieur pour financer des projets d'investissement sélectionnés avec soin. Une dépréciation progressive du taux de change, accompagnée de mesures visant à éliminer le marché des changes parallèle, favoriserait les mesures d'ajustement». A propos de l'usage de la planche à billets, dont le FMI semble avoir fait contre mauvaise fortune bon gré, les administrateurs encouragent les autorités algériennes à se tenir prêtes à durcir la politique monétaire si des tensions inflationnistes se manifestent. Mais, la directrice tient à rappeler que ses administrateurs déconseillent le financement monétaire du déficit «mais si celui-ci se poursuit, ils soulignent la nécessité de mettre en place des mesures de sauvegarde pour en atténuer l'impact négatif, dont des limites temporelles et quantitatives. Dans ce contexte, ils saluent l'engagement de la banque centrale à stériliser, le cas échéant, les liquidités apportées par le financement monétaire». Les efforts visant la diversification de l'économie nationale pour la sortir de la dépendance vis-à-vis des hydrocarbures, l'amélioration de la gestion des dépenses publiques, la revue annoncée du système de subventions, la propension des autorités à donner toute sa place au privé en améliorant le climat des affaires, ce sont autant de bons points accordés par le FMI à l'Algérie qui, toutefois, se doit d'«agir pour réduire l'inadéquation des qualifications, améliorer le fonctionnement du marché du travail, accroître le taux d'activité des femmes et continuer d'ouvrir l'économie au commerce extérieur et à l'investissement direct étranger». Et à la présidente du conseil d'administration et directrice du FMI de conclure sa note à l'attention des autorités algériennes en relevant «les administrateurs notent que le secteur bancaire continue de se porter relativement bien. Ils soulignent que, eu égard aux risques macroéconomiques et aux liens financiers au sein du secteur public, il convient de renforcer le cadre macroprudentiel, notamment en menant plus régulièrement des tests de résistance et en établissant un dispositif de gestion des crises». Des délibérations qui ne cachent pas, donc, l'inquiétude du FMI quant aux options choisies par l'Algérie pour sortir de la crise induite par la baisse des prix des hydrocarbures. Az. Maktour