C'est aujourd'hui. Ça devait se faire il y a un mois mais on ne passe pas le bac pendant le Ramadhan. On ne va pas au «jour de sa vie» le ventre creux, la bouche sèche et la tête en compote. Sinon, il aurait fallu passer outre le jeûne, ce qui est inimaginable. Il ne manquerait plus que ça, manger et boire pendant le Ramadhan et espérer décrocher le bac ! La «tendance» est plutôt dans l'autre sens : des milliers de candidats se mettent à la prière à l'orée de l'examen pour «mettre toutes les chances de leur côté». C'est facile, c'est gratuit et ça peut rapporter gros. Enfin, rapporter gros est certainement un abus de langage. Par les temps qui courent, réussir son bac n'est pas vraiment le meilleur gage de réussite. Il n'assure ni l'accès au savoir ni la promotion sociale. Mais il vaut mieux le passer et le réussir quand même. S'il offre très peu de perspectives aux heureux élus, on imagine ce que vont devenir les recalés. Les dernières éditions n'ont pas été un exemple de sérénité mais il paraît qu'il y a une «légère amélioration». Les errements en la matière sont pourtant trop frais dans les mémoires pour ne pas en redouter d'autres. Surtout que tout n'a pas été éclairci pour rassurer sur la suite. On a connu les fuites des sujets en «quantités industrielles». On a connu des protestations de parents pour que les «thèmes non étudiés en classe» en raison des cycliques débrayages des enseignants ne figurent pas dans les épreuves. On a connu des manifestations dans les... centres d'examen. On a connu des menaces physiques sur les surveillants sommés de fermer les yeux sur la triche. On a connu d'inimaginables techniques de «copiage» où les... nouvelles technologies de la communication ont été mises à contribution. On a connu des candidats exclus des épreuves parce qu'ils sont arrivés en retard dans leur centre d'examen pour des histoires de transport. On a connu une ministre de l'Education horriblement seule dans sa volonté d'améliorer les choses. On a connu les vils déploiements de ceux qui ont entrepris de miner son action... Le bac, c'est aujourd'hui. Sur le fond, rien n'a encore changé et ce n'est pas dans la semaine que ça va se faire. C'est qu'il y a vraiment du boulot pour y parvenir. Mais depuis le temps que la descente aux enfers a été entamée, nous avons attendu. On peut donc patienter encore. Que l'école retrouve sa vocation de lieu d'acquisition des connaissances et de préparation à la citoyenneté, que les programmes soient réinstallés dans leur ère géologique, que la formation des enseignants soit mise à jour, que l'école publique redevienne la colonne vertébrale de l'éducation nationale et non le refuge des pauvres où on dispense un enseignement au rabais... que la réforme du bac aboutisse ! En attendant, on aura encore des chiffres aujourd'hui. Le nombre de candidats, la proportion des filles et des garçons, le nombre de centres d'examen et tout le reste. On aura même le nombre de candidats qui subiront les épreuves en prison. Les chiffres ne font pas le bac ? Qu'à cela ne tienne, rien ne le fait depuis longtemps. On attendra. S. L.