L'Américain Richard Florida, professeur à l'université de Toronto, s'est fait connaître par son best-seller The rise of the creative class. Paru en 2002, cet ouvrage raconte le grand mouvement de reconquête des villes américaines par «la classe créative» : les professions intellectuelles, les artistes, les jeunes actifs, les chercheurs, et l'essor de toute l'économie qui y est associée. Cette gentrification a été le moteur de la renaissance de nombreuses villes américaines. En 2017, Richard Florida a publié The New Urban Crisis. Il y raconte un processus inverse. «Le problème, c'est que quelques grandes métropoles internationales concentrent la majorité des richesses et deviennent de plus en plus inaccessibles. Dans ces villes superstars, l'explosion des prix de l'immobilier chasse peu à peu les artistes, les professions intellectuelles, les créatifs des quartiers qu'ils avaient investis. Mais ce ne sont pas les moins bien lotis, car ceux-ci trouvent souvent d'autres quartiers populaires où ils peuvent s'installer. Ce qui est terrifiant, c'est que les policiers, les pompiers, les gens qui travaillent dans des boutiques ou des restaurants, les infirmiers, les artisans, les jardiniers doivent quitter ces grandes villes, devenues trop chères. Et vivre beaucoup plus loin, dans des zones mal desservies par les transports en commun.» Il explique : «La nouvelle crise urbaine n'est pas une crise du déclin des villes, comme dans les années 1970. C'est une crise causée par leur succès. Et la conséquence, c'est qu'aux Etats-Unis, nous avons d'un côté une petite vingtaine de métropoles superstars, entrées de plain-pied dans l'économie de la connaissance, et de plus en plus riches, et de l'autre tout le reste du pays qui plonge et s'appauvrit. La crise urbaine, c'est la crise centrale du capitalisme contemporain.» Voilà à quel niveau sont les débats autour des villes en Occident. Chez nous, on en est encore et toujours à la «transhumance» en milieu urbain et tout ce qui l'accompagne comme commerces en aliments de bétail puis d'abattage de bétail sur les trottoirs et les places publiques. K. B [email protected]