L'un des hommes identifiés par les autorités turques comme faisant partie des responsables de la disparition du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul appartient à l'entourage du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, a affirmé mardi le New York Times. Selon le journal américain, qui publie plusieurs photos pour appuyer ses dires, Maher Abdulaziz Mutreb a notamment accompagné le prince lors de déplacements aux Etats-Unis en mars 2018 ainsi qu'à Madrid et à Paris en avril 2018. Les autorités turques ont diffusé une photo de lui arrivant à l'aéroport d'Istanbul. Celui qui est surnommé «MBS» et son père le roi Salmane ont nié avoir connaissance du sort du journaliste saoudien, qui s'est installé aux Etats-Unis en 2017 après être tombé en disgrâce à la cour du prince. Jamal Khashoggi n'a plus donné signe de vie après être entré dans le consulat saoudien à Istanbul pour des démarches administratives le 2 octobre. Selon les autorités turques, il a été assassiné dans ces locaux par une équipe venue d'Arabie Saoudite. Riyad assure jusqu'ici qu'il a quitté la représentation diplomatique peu de temps après, mais n'a pas été en mesure d'en apporter les preuves. Le New York Times ajoute que trois autres suspects — qu'il identifie comme Abdulaziz Mohammed al-Hawsawi, Thaar Ghaleb al-Harbi et Muhammed Saad Alzahrani — ont été liés par des témoins ou d'autres sources aux services de sécurité attachés au prince de 33 ans. Et un cinquième homme, un médecin légiste identifié comme Salah al-Tubaigy, a occupé des postes à hautes responsabilités au ministère saoudien de l'Intérieur et dans le secteur médical saoudien, poursuit le journal, soulignant qu'«un personnage de cette stature ne pourrait être dirigé que par une autorité saoudienne de haut rang». Le quotidien affirme avoir confirmé par lui-même qu'«au moins neuf des quinze (suspects) ont travaillé pour les services saoudiens de sécurité, l'armée ou d'autres ministères ». Le Washington Post estime pour sa part que onze des quinze suspects saoudiens mentionnés par les autorités turques ont des liens avec les services de sécurité saoudiens. Pour le New York Times, la position des suspects au sein du gouvernement saoudien et les liens de plusieurs d'entre eux avec le prince héritier «pourraient rendre beaucoup plus difficile de l'absoudre de toute responsabilité» dans la disparition de Jamal Khashoggi. «Et la présence d'un médecin légiste spécialisé dans les autopsies suggère que l'opération pourrait avoir été préparée avec un objectif fatal depuis le début», relève le journal. Selon le Washington Post, Ankara a dit aux Etats-Unis détenir des enregistrements audio et vidéo montrant comment Jamal Khashoggi a été «interrogé, torturé puis tué» à l'intérieur du consulat, avant que son corps ne soit démembré. Des médias américains avaient rapporté lundi soir que l'Arabie Saoudite envisageait de reconnaître que le journaliste de 59 ans était mort lors d'un interrogatoire qui aurait mal tourné au consulat. Selon CNN, citant deux sources anonymes, Riyad préparerait un rapport tentant de minimiser son implication dans la disparition du collaborateur du Washington Post. Le rapport, a avancé l'une de ces sources, conclurait que l'opération a été menée «sans autorisation ni transparence» et que «les personnes impliquées seront tenues pour responsables».