Les moments agréables passent trop vite. La lecture des différentes histoires du recueil de nouvelles La Demoiselle du métro de Meriem Guemache laisse, à chaque fois, un certain sentiment de «nostalgie», comme si nous hésitons à quitter un personnage, un lieu ou un pays qu'on a connu et aimé. «La frustration vous possède d'un chapitre à l'autre. Parce que l'on a envie que cela continue et que déjà c'est fini, qu'un personnage s'efface trop vite au profit d'un autre et qu'à chaque chute, on aimerait prolonger l'instant. Même si rester suspendu à un épisode reste fugace», fait remarquer, à juste titre, Malika Boussouf dans la préface du livre, paru il y a quelques jours chez Casbah Editions. Au bonheur du lecteur, le voyage imaginaire dure le temps de treize escales et autant de nouvelles. «Bingo !» Malek, un looser, vient de gagner cinq milliards de centimes au loto. Du jour au lendemain, les gens ont changé de comportement avec lui. Mais, évidemment, c'est l'argent, dont on dit qu'il ne fait pas le bonheur, qui a réalisé ce miracle. La Demoiselle du métro, titre du livre et de la deuxième nouvelle du recueil, est l'histoire d'une belle aperçue un jour dans un wagon du Métro d'Alger. En résumé, c'est la femme de vos rêves éveillés ou de ceux dans les bras de Morphée. «Biyouna On Air», c'est l'histoire d'une actrice et chanteuse qui passe dans un studio comme un courant d'air mais dont on dit qu'elle a toujours la main sur le cœur. Dans «Marx à Alger», il s'agit bien de Karl Marx, l'auteur du livre Le Capital qui hantera toujours les nuits des capitalistes de tous les pays. Marx a débarqué au port d'Alger, le 20 février 1882. Il est reparti le 2 mai de la même année. En Algérie, il a vu le vrai visage du colonialisme et «des gens pauvres, trimant jusqu'à la mort pour une bouchée de pain. Une classe de travailleurs de plus en plus misérables, au service d'exploitants de plus en plus riches», une injustice sociale intolérable pour lui. Dans la nouvelle «Le dernier chapitre», l'histoire d'une imposture en écriture, règne une atmosphère rappelant les romans noirs à la Chandler. Dans «Déjà, je ne suis plus», il est question de quelqu'un parti là d'où personne n'est revenu. La vie reprend ses droits dans «La Villa» dans laquelle on parle beaucoup d'art et de peinture et d'une certaine Frida Kahlo. Au «Bâtiment D. Troisième étage», il se passe de drôles et dramatiques choses. Dans «La rue des pas perdus», au moins, il y a un peu d'air frais. «Une femme pressée» n'a certainement pas le temps de s'ennuyer. Plus loin, on se demande ce que ressent une femme «Dans la peau d'un mâle». «Salut' ezzine ! On t'a déjà dit que tu ressemblais à Kurt Cobain, le chanteur du groupe Nirvana ? Ça te dit une gazouza au salon de thé d'à côté, histoire de faire plus ample connaissance, mon p'tit lapin ?» lance une jeune Algéroise à un blondinet qui lui répond to de go : «T'es bête naturellement ou tu prends des cours du soir ? Va au diable espèce de débile !» Là est pris celui qui croyait prendre en pensant passer un simple «Joyeux anniversaire». «Un, deux, trois…», la dernière nouvelle du recueil «La Demoiselle du métro», est une triste histoire d'agression d'une fillette par un de ces innombrables malades qui hantent nos rues. «Soixante centimètres d'innocence contre un mètre soixante- quinze de frustration, la lutte est perdue d'avance», écrit Meriem Guemache. Tout comme le fait remarquer Malika Boussouf : «Meriem Guemache a une belle subtilité dans le regard. C'est une journaliste à laquelle rien n'échappe des joies et des blessures qui rythment nos jours.» Kader B.