Depuis hier, des experts nationaux et allemands, spécialisés dans les domaines de la santé et des sciences du vivant, prennent part à un workshop qui porte sur «les nouvelles biotechnologies au service de la médecine et de l'agriculture de précision». Amel Bentolba - Oran (Le Soir) - Pour le professeur Hafid Aourag, directeur général de la recherche scientifique et du développement technologique, cette rencontre permettra de passer à l'étape de partenariat, entre le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique et le partenaire allemand. «Cela portera sur comment trouver des solutions à la maladie du cancer et aussi développer l'agriculture moderne. Et introduire les biotechnologies évoluées.» Ce workshop qui s'est tenu à la salle de conférences du centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle CRASC-Oran, a été organisé par la Direction générale de la recherche scientifique et du développement technologique DGRSDT, du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique MESRS, en collaboration avec le centre d'innovation en biotechnologies de Frankfurt FIZ (Allemagne). L'occasion pour tous les participants de mesurer l'importance d'un partenariat entre les deux pays dans deux domaines très sensibles, où les Allemands sont leaders dans le monde. Pour M. Hafid Aourag, ce partenariat permettra d'aller vers la phase de l'excellence. «Si on veut relever le niveau de nos chercheurs et de nos étudiants, il faudrait que nous côtoyons l'excellence. On passera au programme consacré aux étudiants qui se distinguent afin qu'ils poursuivent leurs études au niveau de ces centres qui ont déjà vu en sortir 18 prix Nobel en médecine.» Ce qui est une fierté pour l'Algérie, dit-il, puisque les Allemands voient en certains de nos chercheurs, surtout ceux spécialisés en médecine, des personnes compétentes qui peuvent apporter un plus. En marge de cette rencontre, notre interlocuteur abordera avec la presse, la médecine «personnalisée». Il explique son propos : «le médicament qu'on achète dans les pharmacies, s'il a été découvert aux Etats-Unis, c'est qu'il a été testé sur des sujets américains, et parfois il n'est pas efficace sur les algériens.» Inefficace car, explique-t-il, c'est une question de gènes qui sont différents de ceux des Américains. «Justement, ce partenariat nous permettra de développer des médicaments conçus spécialement pour les peuples d'Afrique. Les Allemands ont une vision de défis car s'ils parviennent à concevoir un médicament qui correspond aux gènes des Algériens, dès lors, il conviendra à tous les peuples d'Afrique. Ainsi, il y aura un grand marché du médicament qui bénéficiera aux deux parties». Présents parmi les intervenants, M. Messaoud Zitouni, responsable du Plan algérien de lutte contre le cancer, a fait savoir que ce plan a atteint près de 75% de ses objectifs, précisant que même s'il y a quelques difficultés bureaucratiques, grâce à la mobilisation des professionnels notamment ceux spécialisés dans la lutte contre le cancer, ce plan de lutte sera finalisé en 2020. Abordant le domaine de la recherche et les techniques évolutives, le professeur Zitouni est revenu sur la méthode de la thérapie ciblée. Il estime qu'on assiste de plus en plus à une escalade agressive et coûteuse et qu'il est temps maintenant d'évaluer objectivement la balance bénéfice/risques de ces thérapies. «Il y a beaucoup de risques, les cancers secondaires, la toxicité et la diminution de la fonction cognitive qui est très importante chez les gens âgés et donc s'il y a une recommandation pour nos scientifiques c'est qu'il faut qu'ils identifient chez quel patient le bénéfice est plus grand que le risque. Pourquoi ? Parce que très souvent même dans les pays développés, on utilise les thérapies ciblées sans qu'il y est les biomarqueurs prédictifs montrant que cette thérapie ciblée va être positive.» De cette collaboration algéro-allemande, il espère que les Allemands vont aider non seulement à la mise en place de ces plateformes mais en plus à leur accélération et leur expertise, car, dit-il, «encore une fois, nous avons pris du retard.». Pour l'intervenant, la principale recommandation de ce groupe c'est qu'il faut élaborer un plan stratégique multisectoriel coordonné et intégré parce que, déplore-t-il, «l'un des plus grands défauts de nos réflexions scientifiques en Algérie, et notamment dans le cadre du cancer, c'est, il faut le dire malheureusement, le manque de coordination et d'intégration». En avançant le chiffre de 19 millions de personnes atteintes du cancer dans le monde, un chiffre communiqué par l'OMS, le professeur Zitouni souligne le fait que le poids du cancer ne fait qu'augmenter. « Ce chiffre de 19 millions, c'était le chiffre de l'OMS il y a quelques années pour l'année 2025. Il se trouve que les derniers chiffres fournit font état de 18 millions 600 mille, avec 10 millions de décès. C'est-à-dire, le cancer va plus vite que les prévisions des scientifiques.» Et de s'inquiéter de constater que pour la première fois dans l'histoire de la santé, il y a une maladie, dont les scientifiques, plus ils s'acharnent à lui trouver un traitement, plus ce traitement idéal s'éloigne. A. B.