Le binôme artistique Radia Djellal et Samir Mohalbi exposent le fruit de leur résidence de création aux Ateliers sauvages. «Partir ailleurs» est une évocation visuelle et sonore de ces soldats algériens mobilisés dans l'armée française durant les deux Grandes Guerres. Vivant à Marseille, Radia Djellal, alias Radia Nova, est artiste-plasticienne ; son partenaire, Samir Mohalbi, est musicien et compositeur. La première se réapproprie l'iconographie des tirailleurs algériens enrôlés par la France coloniale notamment durant les deux Guerres mondiales. Le second propose des créations sonores et vidéo autour de leurs insignes, leurs tenues, leurs mascottes et leurs musiques. Véritable corps d'armée depuis la fin du XIXe siècle, les tirailleurs ont toujours été entourés de mythes et de mystère. Le travail des deux artistes consiste donc à «questionner de manière décalée ces symboles et ces signes de l'époque coloniale française en Algérie». Radia Djellal élabore une sémantique à la fois revisitée et rigoureusement attachée au thème de son travail. Les motifs, signes et figures emblématiques de cette armée maghrébine sont ainsi détournés au profit d'une nouvelle iconographie construite à partir de textiles caractéristiques de leurs tenues, de figures, symboles et devises (La victoire ou la mort, l'honneur…) découpés dans du papier, etc. Pendant ce temps, Samir Mohalbi nous propose une installation son/vidéo qui illustre cette évocation fascinée et déférente envers ces dizaines de milliers de soldats anonymes. Les notes lancinantes d'un oud accompagnent des images kaléidoscopiques constituées à partir de détails éclatés et reproduits à l'infini de l'iconographie propre aux tirailleurs. Radia Djellal et Samir Mohalbi affichent l'ambition de «créer, à partir de ces restes, une construction imaginaire, un mythe actualisé, fantasmé, réinventé, nous permettant de combler au passage un vide et un certain silence sur le sujet. C'est aussi une manière de nous approprier notre histoire et de jouer avec l'esthétique de ce matériel». A signaler que le prochain rendez-vous des Ateliers sauvages est fixé au 22-24 novembre à l'occasion de la tenue à Alger du festival «Phonetics» dédié aux musiques électroniques et expérimentales. S. H.
