C'est sur instruction personnelle directe de Abdelaziz Bouteflika que les cinq généraux-majors et le colonel des services, détenus depuis le 14 octobre à la prison militaire de Blida, ont été libérés le 5 novembre dernier. C'est ce que nous révèle une source officielle qui nous précise, également, que cette décision présidentielle, sans appel, avait été prise, cette fois, sans avoir consulté, au préalable, l'état-major ou le ministère de la Défense nationale. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Chef suprême des Forces armées et ministre de la Défense nationale, Abdelaziz Bouteflika a préféré, cette fois, trancher directement cette épineuse question en ordonnant la libération immédiate des concernés. Selon la même source, ordre a également été donné par le locataire du palais d'El-Mouradia d'annuler l'ITS, c'est-à-dire l'interdiction de sortie du territoire, précédemment prise à l'encontre des officiers en question. Autrement dit, ces officiers sont entièrement libres, y compris de voyager à l'étranger. Pour rappel, c'était le dimanche 14 octobre dernier, à la surprise générale, que l'on annonçait la mise sous mandat de dépôt des six ex-hauts responsables de l'armée, à l'issue de leurs auditions respectives par le procureur du tribunal militaire de Blida. Il s'agit du général-major Habib Chentouf, ex-chef de la Première Région militaire de Blida, du général-major Saïd Bey, ex-chef de la Deuxième Région militaire d'Oran, du général-major Abderrazak Chérif, ex-chef de la Quatrième Région militaire de Ouargla, du général-major Menad Nouba, ex-commandant de la Gendarmerie nationale, du général Boudjemaâ Boudeouaour, ex-directeur des finances au ministère de la Défense nationale et, enfin, du colonel Abdelaziz, ex-responsable de la sécurité de l'armée à la Deuxième Région. Assurément, l'intervention directe de Abdelaziz Bouteflika n'aurait jamais eu lieu si des anomalies n'avaient pas été décelées dans la conduite de ce dossier. Dans l'entourage proche du patron d'El-Mouradia, l'on ne cache pas, aussi, une certaine gêne : «Incarcérer autant de généraux à la fois, cela ne se passe généralement que dans des pays qui ont déjoué une tentative de putschs militaires ! Ce qui n'a jamais été le cas, concernant cette affaire, bien sûr», nous confie-t-on. Au niveau de la présidence, il y a d'ailleurs une réflexion qui est engagée, nous révèle-t-on encore, autour de cette situation de cumul, entre les deux fonctions civile et militaire, depuis que l'actuel chef d'état-major de l'armée, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, a été nommé au poste de vice-ministre de la Défense nationale, en septembre 2013, dans le cadre de la préparation du quatrième mandat par et pour Abdelaziz Bouteflika et dans les conditions que l'on sait. A l'époque, Bouteflika, qui rentrait au pays le 16 juillet 2013, après une longue hospitalisation, à la suite d'un AVC sévère qui le frappait le 27 avril de la même année, attaquait, dès l'été, cette opération «quatrième mandat» que d'aucuns pensaient inimaginable à l'époque. Tout allait commencer par la nomination de Amar Saâdani à la tête du FLN dès le 29 août 2013. Quelques jours plus tard, interviendra le fameux remaniement du 13 septembre avec la nomination de la garde rapprochée aux postes-clés, y compris Mourad Medelci au Conseil constitutionnel et, par ailleurs, la nomination de Gaïd Salah au poste de vice-ministre de la Défense. L'objectif, et cela s'avérera de manière éclatante d'ailleurs, était d'isoler la seule force qui se dressait contre le quatrième mandat, le DRS et son chef, le général de corps d'armée, Mohamed Médiène, dit Toufik. L'automne 2013 connaîtra, ainsi, une restructuration profonde des services et un renforcement considérable de l'état-major, de son chef donc, sur ces derniers. Or, à pareille période pré-électorale, les enjeux ne sont plus les mêmes. Depuis, les services sont directement rattachés à la présidence et, surtout, ont changé de main. En prévision de la présidentielle de 2019, aucune menace n'est signalée à l'horizon contre l'opération en cours, celle d'un cinquième mandat et rien ne justifie plus la situation de cumul, entre les fonctions civile et militaire de Gaïd Salah. D'où, selon notre source, ce projet d'un retour à l'ancien schéma au niveau de l'institution militaire, à savoir mettre fin au cumul. «Cela permettra d'alléger la charge, car il s'agit de deux lourdes fonctions, et, partant, une meilleure fluidité dans le travail», nous explique-t-on, prenant pour exemple illustratif, cette affaire des généraux incarcérés puis libérés. K. A.