La nécessité de s'appuyer sur le développement socioéconomique dans les pays africains dans le traitement de la crise migratoire a été soulignée lors de la 2e Conférence internationale des ONG africaines membres du Conseil économique et social de l'ONU (Ecosoc), tenue hier à Alger. «La résolution à long terme (de la crise migratoire) passe par un véritable développement du continent fondé sur un partenariat gagnant-gagnant, loin de tout esprit de domination», a indiqué l'expert économique, Abderahmane Mebtoul, dans son intervention. Selon lui, le développement du continent sera profitable à l'ensemble des espaces économiques évitant cette migration clandestine avec des milliers de morts. Dans ce sens, il estime que l'Afrique vivait un paradoxe: le continent côtoie une misère croissante alors qu'il est riche avec des fortes potentialités de développement. D'ailleurs, l'Afrique devrait devenir l'axe de la croissance mondiale entre 2030 et 2045, d'après M. Mebtoul citant des études économiques américaines et européennes. Ainsi, «l'Afrique, pour peu que ses dirigeants dépassent leurs visions étroites, a toutes les potentialités pour devenir un grand continent avec une influence économique», a-t-il avancé. Pour ce faire, il recommande à cet égard d'aller vers des sous-intégrations régionales et de s'appuyer sur la bonne gouvernance. De son côté, la chercheure à la Commission économique pour l'Afrique des Nations-Unies, Kenza Aggad, a plaidé pour une approche graduelle dans le traitement du phénomène migratoire, incluant le renforcement des capacités africaines à construire des économies fortes. Ce processus, poursuit-elle, se traduit entre autres par des stratégies de coopération gagnant-gagnant qui visent à faciliter l'implémentation de politiques de développement en Afrique. D'après les chiffres avancés par Mme Aggad, les flux migratoires ont enregistré une croissance de 48% entre 2000 et 2017. Toutefois, il est important d'éviter certains «faux discours» relatifs à ce phénomène et qui pointent du doigt les nombreux Africains qui se dirigent massivement vers l'Europe alors que le flux global de l'Afrique vers le vieux continent est en baisse depuis plusieurs années. En effet, la migration sud-nord ne représente que 35% du flux migratoire global dans le monde alors que la migration intra-continentale constitue 53% de la migration africaine, selon Mme Aggad. En sus, la région de l'Afrique du Nord ne représente que 11,2 millions de migrants parmi les 258 millions de migrants enregistrés dans le monde. Pour sa part, la commissaire, rapporteuse spéciale sur les réfugiés, les demandeurs d'asile et les migrants à la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples, Maya Sahli, a souligné que les conditions socioéconomiques, la pauvreté et la mauvaise gouvernance étaient les principales causes du problème migratoire en Afrique. Lors de la séance d'ouverture, le président du Parlement africain de la société civile, Jean-Claude Kessé, a affiché son soutien à la position algérienne qui recommande des solutions durables, intégrées et globales par le biais notamment de programmes de développement économique et social des pays d'origine. «Expulser les migrants, fermer les frontières, durcir les conditions d'obtention de visa (..) ne suffiront jamais à éteindre la volonté des jeunes Africains de vouloir aller vers un monde qu'ils croient meilleur», a-t-il noté. APS