Le spectacle de rue El Herraz a été présenté mardi à Alger, dans le cadre des Journées du théâtre régional d'Oran (Tro) Abdelkader-Alloula, devant un public de badauds, rassemblés en nombre, pour «découvrir» ce registre du quatrième art qui demeure encore peu connu pour eux. Plus d'une centaine de curieux rassemblés en forme de cercle (halqa), laissant le centre de la place Emir-Abdelkader, de la rue Larbi-Ben-M'hidi aux six comédiens, qui ont mené, 25 mn durant, la trame d'El Herraz, montée en 2018 avec le TRO et mise en scène par Leila Touchi, sur un texte inscrit au patrimoine et tombé dans le domaine public, écrit à la fin du XVIIIe siècle par le poète marocain Cheikh El Mekki Ben El Korchi. El Herraz, une belle poésie en prose qui raconte l'histoire d'un amour en péril, car la bien-aimée a été kidnappée par El Herraz et séquestrée dans sa forteresse, qui finira, pourtant, par céder devant la résilience de l'amant après plusieurs tentatives. Tout de noir vêtus, Zahia Aït Aïssa, Brahim El Khalil Daha, Mohamed Belkaroui, Abdelkrim Farès, Amine Malah et Zineddine Smaïn, bendir à la main pour seul accessoire, ont commencé par «poser le spectacle», déclamant tout en mouvement le «texte de mise en situation», dans une série de déplacements, exécutés dans tous les sens et qui devaient permettre aux comédiens de «bien s'imprégner de l'espace», de le délimiter et de «fixer leurs personnages respectifs». Une scène d'exposition d'un spectacle qui n'avait pas fait l'unanimité au départ, car pour le jeune public, «on ne peut se prendre au sérieux quand on est dans la rue», a confié un des adolescents présents, avant de voir l'ensemble du public «absorbé» par la densité du verbe, la qualité du jeu et la beauté des dialogues, rendus en chansons par moments. Dans des personnages polyvalents et des rôles de «gouwals», les comédiens se succédaient au centre de leur espace de jeu, réussissant à capter l'attention des spectateurs, au fur et à mesure du déroulement du spectacle qui a fini par sortir le public de son incertitude et son état passif et le ramener à adhérer à la représentation en se l'appropriant. «Notre public est hétérogène et surtout pas averti, (...), le tout est de pouvoir le ramener à rompre avec le quotidien, en lui offrant un moment d'évasion, le temps d'une courte prestation», a expliqué la metteure en scène avant de partir avec son équipe de comédiens à la place de la Grande-Poste pour reproduire le même spectacle, devant un public encore plus nombreux. Les spectateurs, applaudissant longtemps les comédiens, ont «redécouvert l'œuvre d'El Herraz dans un autre support artistique», a estimé une bonne partie du public, saluant une «expérience innovante», peu exploitée, qu'«il convient de multiplier». D'un autre côté, les Journées du Tro à Alger constituent, selon les organisateurs, «une première» en Algérie, à travers des échanges d'expériences «utiles et inédits» entre différents théâtres, offrant l'opportunité aux troupes locales de chaque ville d'avoir «plus de visibilité et plus d'espaces d'expression à travers le pays». Dédiées aux enfants, au jeune public et aux adultes, huit pièces de théâtre dans différents registres du 4e art, un spectacle de dance et des conférences, constituent, depuis le 1er décembre, le programme des Journées du théâtre d'Oran Abdelkader-Alloula à Alger qui se poursuivent jusqu'au 6 du même mois au Théâtre municipal d'Alger-Centre.