Le documentaire Planet Malek est un autre hommage à Ahmed Malek, un grand compositeur de musique de films, méconnu et oublié dans son pays et surnommé sous d'autres cieux le «Ennio Morricone» algérien. Après la compilation que le label allemand Habibi Funk lui a consacrée, la réalisatrice Paloma Colombe dédie le documentaire Planet Malek Ahmed Malek à ce prolifique génie qui a signé une bonne partie de la bande son des films algériens des années 1970. «Quand Jannis Stürtz m'a proposé de réaliser ce film, j'ai pensé que c'était une excellente occasion de faire connaître la musique d'Ahmed Malek au grand public, aussi bien en Algérie – où je me suis aperçue que la jeune génération le connaissait peu – que dans le reste du monde. Avec ce film, je veux permettre aux Algériens de se réapproprier leur patrimoine culturel», a déclaré la réalisatrice franco-algérienne. Paloma Colombe, à travers son documentaire, repart sur les traces du musicien algérien sorti de l'oubli grâce au travail acharné de Stürtz, DJ berlinois, qui publie sur son label Habibi Funk des merveilles des années vinyle. «Très peu de gens le connaissent, mais beaucoup connaissent sa musique. Elle a marqué l'Algérie d'après-indépendance», fait remarquer Jannis Stürtz pour qui l'idée d'éditer une compilation d'Ahmed Malek était devenue «une véritable obsession». Né en 1931 à Bordj-el-Kiffan à l'est d'Alger, Ahmed Malek fut élève du Conservatoire d'Alger, dont il sort diplômé de flûte traversière et de solfège. Il rejoint ensuite la Radio télévision algérienne (RTA) et sera membre de son orchestre symphonique. Ahmed Malek, qui s'est tôt intéressé aux nouvelles technologies, a composé près d'une trentaine de musiques de films pour le cinéma et la télévision. Ahmed Malek est décédé le 24 juillet 2008 à El-Mouradia, sur les hauteurs d'Alger. Avec le concours de la famille du musicien, le label allemand Habibi Funk a réédité, sous la forme d'une compilation, quatorze morceaux d'Ahmed Malek, dont deux versions du thème du film Omar Gatlato de Merzak Allouache ainsi que des thèmes tirés de la BO de Les Vacances de l'inspecteur Tahar de Moussa Haddad, Silence des cendres de Youcef Sahraoui, Autopsie d'un complot de Mohamed Slim Riad et Un toit, une famille de Rabah Laradj. «Il a composé pour la plupart des films algériens qui marchaient très fort. Ce que je regrette, c'est qu'on ne parle plus de lui aujourd'hui», dit une voix féminine, dans le documentaire de Paloma Colombe. «Il est connu par les classes plutôt intellectuelles, mais pas les autres. Son travail a été oublié par les gens qui font la télé en Algérie. Or la télé a une place très importante en Algérie», constate la réalisatrice. Ceux qui l'ont connu personnellement parlent de lui à commencer par sa fille Hénia, qui ouvrit ses archives à Jannis Stürtz. Merzak Allouache évoque aussi sa collaboration dans Omar Gatlato, sélectionné en 1976 pour la semaine de la critique à Cannes. Il y a aussi la famille Guechoud, dont le compositeur Mohammed fut un proche de Malek. Des photos montrent Ahmed Malek en compagnie de Marlon Brando, avec le prince du Japon ou à Cuba où il aimait aller. Les images racontent une belle Algérie d'après-indépendance. «Le plus important pour moi était effectivement d'évoquer par l'image les émotions provoquées par la musique et vice-versa, pas de faire un biopic chronologique. Ma priorité, c'était d'actualiser la musique de Malek, donc de créer un lien, des ponts, entre passé et présent. Cela passe par la ville d'Alger – qui lui a survécu, forcément – par des objets, des personnes comme sa fille, qui font ce pont», dit Paloma Colombe à propos de sa démarche. Le documentaire Planet Malek sera projeté dans le cadre du festival international de films sur la musique (FAME) du 15 au 17 février à la Gaîté lyrique à Paris. Il est également disponible sur Youtube. Kader B.