A peine formulées, les dernières décisions de Abdelaziz Bouteflika ont entraîné des réactions de rue à travers lesquelles les citoyens ont exprimé leur rejet du contenu des annonces faites lundi en fin de journée. Ils promettent aussi de se mobiliser à nouveau, et encore plus nombreux, ce vendredi pour réclamer «des changements radicaux». Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Les rues habituellement désertes à 20h se sont emplies soudainement de monde ce lundi soir. Des télévisions privées, mais aussi la chaîne publique diffusant ses émissions en français venaient de faire lecture des grandes décisions prises par Abdelaziz Bouteflika au lendemain de son retour de Genève. Des rumeurs autour de ces annonces circulaient depuis la veille. Les spéculations allaient alors bon train, certains allant jusqu'à entrevoir la possibilité d'aller vers un maintien de la présidentielle contre vents et marées. La lecture des principaux points contenus dans le message diffusé engendre une légère confusion passagère. La décision d'annuler le cinquième mandat, principale revendication citoyenne formulée jusqu'ici, et le report des élections paraissent, durant un court instant, griser certains. Des klaxons se font entendre dans les rues d'Alger. Certains reporters de télévision évoquent de la joie, mais les commentaires sont vite revus. Par dizaines, les Algériens envahissent les principales artères du centre-ville pour livrer leur réponse au pouvoir. Les slogans sont sans appel «Pas de transition», «Pas de prolongement du quatrième mandat». Les Algérois veillent très tard dans les rues. Les nouveaux développements intervenus sont suivis avec une très grande attention. Mardi matin, vers 9h, les étudiants sortent à leur tour. La mobilisation est nationale. Les mots d'ordre en disent gros sur l'état d'esprit des Algériens. Les slogans ont été adaptés à la nouvelle situation. «Non à Bedoui et Lamamra», «Nous voulons un changement radical», «Non au quatrième mandat bis», «Pas de conférence nationale», «Attention, c'est un leurre, peuple ne lâche pas»… Les slogans ont été adaptés, affinés durant la nuit. Hier, des centaines d'étudiants manifestaient également dans plusieurs grandes villes du pays. L'expression du rejet se fait également à travers les réseaux sociaux. Plusieurs appels ont été lancés à manifester ce vendredi encore. La mobilisation des citoyens sur le net est permanente depuis un long moment déjà. «Plus d'un million pour dire non aux réformes proposées» peut-on lire cette fois dans le texte publié. Dans plusieurs autres posts, des intellectuels décortiquent le message de Abdelaziz Bouteflika et évoquent les raisons de son rejet. Des «changements radicaux» et le «départ des responsables de la crise» sont réclamés. L'Algérie s'apprête-t-elle à vivre donc un nouveau vendredi de grande mobilisation citoyenne ? Les manifestations incessantes des étudiants à travers le territoire national, les marches spectaculaires initiées par les avocats, dans certaines wilayas il s'agissait carrément de magistrats, l'adhésion de très larges secteurs, organismes, ont mis le pays dans un état d'effervescence, de bouillonnement, mais aussi d'attente. Il se trouve que toutes les propositions formulées jusqu'à l'heure ont été rejetées. La lettre de candidature de Bouteflika a eu pour effet de mobiliser davantage les Algériens et cela s'est traduit par une participation de grande ampleur ce 8 mars. Aujourd'hui, ils promettent de venir nombreux ce vendredi pour apporter leur réponse aux dernières décisions. A. C.