Avant d�entrer dans le vif du sujet, je me permets de recourir � l�histoire de grand-m�re, racont�e, autour de l��tre, afin de tromper la faim que nous imposait le r�gime colonial de triste m�moire. Dans un march� hebdomadaire de nos montagnes, tenait place un vieux paysan pour vendre un coq grand, gros et dodu, � plumes luisantes et multicolores que seules nos campagnardes savaient engraisser. Non loin de lui, quatre chenapans qui prenaient leur caf� � l�ombre d�une hutte couverte de foug�re ont vite remarqu� l�oiseau domestique attach�, � la fois, par les pattes et par les ailes. Ils s��taient jur� de voir le soir m�me le coq dans la marmite assaisonn� d��pices et de haricots �kabyles�. Une strat�gie diabolique a �t� mise au point pour arriver � leurs fins. L'un d�eux s�approcha du paysan et le h�la : �A combien tiens-tu ce lapin, � vava ?� - �Quoi ? Tu as devant toi un coq et non un lapin, mon fils ! ouvre bien les yeux !...� - �Je les ai bien ouverts, � vava ! C�est toi qui ne vois pas bien.� Et le vieux d�tourna le regard, plein de m�pris. Vint le second pour lui demander la �somme offerte pour ce lapin !� Le vieux regarda sa marchandise pour �tre s�r qu�il s�agissait d�un coq et non d�un lapin. Il toisa le client de la t�te aux pieds et lui r�pondit d�un coq et non d�un lapin. Un troisi�me arriva pour lui tenir les m�mes propos. Le paysan se mit � frotter ses cheveux blancs de ses ongles coup�s en dents de scie. Bien que sa r�ponse f�t �vasive, il ne se d�partit point de son m�pris affich� � l��gard du client. Passa alors le quatri�me larron qui le salua avant de s�enqu�rir de �la somme offerte pour ce coq dont je n�ai jamais vu de pareil !� Alors, le vieux s�emporta et lui cracha � la figure : �Ula d�khimmini(2) tu me parles de coq, alors qu�il s�agit d�un lapin ! O� est le coq ici, esp�ce d�idiot ?� Et le vieux, fou de rage, dans tous ses �tats, prit l�animal, le tournoya de sa main droite et le flanqua au mur d�une b�tisse en ruine. Il prit son burnous et sa canne, puis s�en retourna � la maison, laissant les quatre larrons r�cup�rer dans un rire sonore et moqueur le coq d�chiquet� pour aller tranquillement le pr�parer pour d�jeuner. Ainsi donc, ils ont eu raison du vieux paysan qu�ils ont pu amener � voir par force suggestive un lapin � la place du coq que son �pouse lui a confi� au petit matin. A force d��tre sugg�r� et r�p�t� le mensonge devient v�rit�. Cette anecdote peut �tre appliqu�e � l�histoire de notre pays, s�il n'y a pas une saine r�action de la part des gens francs et honn�tes, qu�ils soient historiens, acteurs ou t�moins du mouvement national et de la guerre de Lib�ration. En effet, une offensive, tous azimuts, est d�clench�e pour faire de Messali Hadj �le p�re de la R�volution�. Conf�rences, articles dans la presse et tracts y contribuent. Si la r�action des responsables de l�ONM (Organisation nationale des moudjahidine), des combattants de l�ALN et FLN de l�int�rieur, de la F�d�ration de France ne se fait pas entendre, les jeunes g�n�rations prendront ce grossier mensonge pour v�rit� absolue. C�est ce qui me pousse � le faire, la t�te froide et sans chauvinisme aucun. Et l�, les auteurs des articles (3) de presse, les conf�renciers du 8 Mai � Tizi-Ouzou, qui ont distribu� des tracts sur Messali Hadj pour le laver de sa trahison, verront qu�ils ne lui ont nullement rendu service. C�est p�nible pour moi de remuer la louche dans la marmite, lorsqu�il s�agit de quelqu�un qui n�est plus de ce monde ! Qu�en est-il au juste, � propos de Messali Hadj, dans la naissance du mouvement national ? Je dirais simplement que la naissance du nationalisme a eu pour base les �checs des insurrections r�gionales pass�es � 105 recens�es de 1830 � 1916 � et l�ouverture faite sur le monde ext�rieur aux jeunes Alg�riens par deux d�cisions importantes que la France coloniale doit regretter am�rement : l�obligation du service militaire aux Alg�riens et le besoin d�une maind��uvre � bon march� au profit de la m�tropole, et ce, d�s 1912 pour se pr�parer � la r�cup�ration de l�Alsace- Lorraine qu�elle a perdue dans la bataille de Sedan en 1870, o� l�empereur Napol�on III fut fait prisonnier. Quatorze ans apr�s cette ouverture sur le monde moderne, nous retrouvons 22 jeunes, impr�gn�s des connaissances acquises mus par la volont� de faire prendre consciences aux Alg�riens de la situation d�sastreuse dans laquelle ils vivaient, cr��rent l�ENA (Etoile nord-africaine) en 1926 avec � sa t�te Hadj-Ali Abdelkader de Relizane et comme pr�sident d�honneur le petit-fils de l�Emir Abdelkader, le capitaine � la retraite Khaled. Sur les 22, on ne compte pas moins de 18 de la Kabylie dont 6 d�A�t-Oumalou, sans oublier Djeffal comme adjoint de Hadj-Ali Abdelkader. Donc, point de Messali Hadj � la naissance de la premi�re formation politique. Ce n�est qu�une ann�e apr�s, en 1927, qu�on le retrouve, on ne sait par quel subterfuge, � la t�te du parti. Et la premi�re d�cision qu�il a prise, c�est d��carter l�Emir Khaled de la pr�sidence d�honneur, lui, qui s��tait r�volt� d�j� en 1910, alors qu�il �tait capitaine d�active, pour d�noncer la mani�re dont sont trait�s les engag�s d�origine alg�rienne. La majorit� des militants de l�ENA �taient originaires de la Kabylie consid�r�e, � juste titre, comme le r�servoir de la main-d��uvre, tant la mis�re noire frappait tous les foyers. La forme et les couleurs de l�embl�me de l�ENA ont �t� con�us en 1934 de telle sorte � ce que chaque pays de l�Afrique du Nord y soit repr�sent� : Tunis El-Khadra (vert), Dza�r El-Be�da (blanc), Marrakech El Hamra (rouge) et en suivant la position g�ographique de chaque pays, verdure le matin, le soleil venant de l�est, la blancheur � midi (soleil � son z�nith) et coucher du soleil rouge, le soir, con�u du temps o� Imache Amar �tait secr�taire g�n�ral de l�ENA. C�est ce m�me embl�me qui nous est l�gu� apr�s le retrait de la Tunisie et du Maroc de la formation en 1937, ann�e durant laquelle est n� le PPA (Parti du peuple alg�rien). Entre-temps, Messali Hadj, revenant de La Mecque en 1935, s�est permis de couper le contact direct avec les structures de base de l�ENA durant six mois, en restant en Suisse, aupr�s de Chakib Arslane, pour bien assimiler l�id�ologie en vogue : l�arabisme. Le PAA se verra interdit � la veille de la d�claration de la 2e Guerre mondiale en 1939. Il repara�tra sous le sigle officiel du MTLD (Mouvement pour le triomphe des libert�s d�mocratiques). Mais l�, on verra la r�ussite de son assimilation de la th�orie dont les le�ons lui ont �t� prodigu�es par Chakib Arslan, lors de son s�jour en Suisse. Il introduira ainsi le concept d�arabo-islamisme dans les statuts du MTLD, concept qui va dans le sens des v�ux de la France coloniale qui ne cherchait qu�� diviser le mouvement national davantage. Lors du congr�s de Zeddine, il �tait le seul � s�abstenir, par voie de vote par procuration, � la cr�ation de l�OS (Organisation sp�ciale) charg�e de la pr�paration paramilitaire, alors qu�il a donn� son aval pour la participation du MTLD aux �lections parlementaires au 2e coll�ge. Dans un de ses ouvrages, le g�n�ral Jacquin n�a-t-il pas dit de Messali qu�il �tait agent des services secrets fran�ais et fich� sous le nom de Mer L�on ! Donc, on peut dire sans risque de se tromper qu�il jouait le r�le de levier de temporisation au sein du parti pour retarder, le plus longtemps possible, la lev�e de la hache de guerre contre le colonalisme. La phrase prononc�e dans son discours au stade des Annassers �cette terre n�est pas � vendre� n��tant que de la poudre aux yeux. C�est ainsi que l�OS a �t� donn�e en sacrifice d�s 1950, tandis que les dissensions �taient encore plus exacerb�es, entre messalistes et centralistes au sein du parti. Ceux qui croyaient encore en lui ont d� se rendre � l��vidence, lors de la tenue du congr�s d�Hornu en Belgique, lorsqu�il pr�nait la patience. Cette tergiversation et cette volont� d�endormir les militants par le verbe, la barbe et le terbouche se radicalisent, encore, par la cr�ation du MNA (Mouvement national alg�rien), le 14 d�cembre 1954, c�est-�dire un mois et demi apr�s le d�clenchement du 1er Novembre par le FLN/ALN, au lieu de faire un front uni contre l�occupant. Alors, nous verrons que les premiers accrochages des �Novembristes� se feront non pas avec l�arm�e fran�aise, mais avec les messalistes, dans le Djurdjura, les Bibans, les Babors, du c�t� de M�sila � A�n-Ilmane, � Darchioukh (Djelfa). C�est ainsi que le colonel Ali Mellah et sa suite ont �t� d�cim�s par eux, d�s leur arriv�e en Wilaya VI historique cr��e lors du congr�s de la Soummam. Nous verrons m�me dans la presse fran�aise les photos de son adjoint militaire, �le g�n�ral� Bellounis, arborer � la fois le drapeau fran�ais et l�embl�me alg�rien devant ses forces arm�es En outre, � Alger, d�s les premiers mois de l�ann�e 1955, les messalistes ont servi d�agents de division, en faisant circuler le mot d�ordre de boycotter les commer�ants mozabites. Il a fallu l�ardeur et l�intelligence de Abane Ramdane, l�ardeur de ses adjoints et de la base militante du FLN pour expliquer aux habitants d�Alger que les Mozabites font partie int�grante du peuple alg�rien. Par ailleurs, lors des n�gociations alg�rofran�aises, en 1961, la d�l�gation du GPRA (Gouvernement provisoire de la R�publique alg�rienne) a rompu les pourparlers, d�s le moment o� la d�l�gation fran�aise, conduite par Louis Joxe, a exig� la participation du MNA aux n�gociations. Il a fallu que le pr�sident du GPRA, Ferhat Abb�s, fasse appel au peuple pour manifester et exiger la seule participation du FLN/ALN � la table des n�gociations, pour que celles-ci reprennent. Quant � l�action n�faste des messalistes en France, tout en laissant le soin aux fr�res de la F�d�ration de France du FLN de raconter d�une fa�on plus exhaustive, je soulignerai le fait que tous les attentats perp�tr�s par eux contre les militants du FLN sont commis juste apr�s les rafles op�r�es par la police fran�aise. Il a fallu tout le brio de ces derniers pour voir la peur changer de camp et acculer les premiers � fuir et � se regrouper dans le nord de la France, et plus particuli�rement � Lille. Nous voyons, par l�, que Messali Hadj n�a �t� ni le p�re naturel ni beau-p�re du nationalisme alg�rien. Au-del� de la trahison, il a vers� dans la collaboration pleine et totale avec la puissance occupante. On ne peut m�me pas le comparer � P�tain qui �tait un grand chef militaire lors de la Premi�re Guerre mondiale, avant qu�il ne collabore avec le nazisme, lors de la capitulation fran�aise, aux premi�res ann�es de la Deuxi�me Guerre mondiale. Par ailleurs, en 1946, avec la cr�ation du MTLD, il a immerg� et le parti et la soci�t� dans un bain id�ologique dans lequel nous nous d�battons encore aujourd�hui, singeant le sultan Abou-Hammou venu assi�ger Bougie au XIVe si�cle, au lieu d�en tirer la le�on utile pour l�unit� et la coh�sion nationales. En conclusion, l�on peut dire, sans risque de se tromper, que ceux qui �crivent pour le r�habiliter auraient d� le laisser dormir en paix. Peut-�tre l�ont-ils fait pour avoir bonne conscience vis-�-vis de l�histoire r�cente de notre beau et cher pays qu�ils n�ont nullement servi hier. Encore faut-il en avoir une qui ne soit ni aveugle ni anesth�si�e. Une chose est s�re : tout probl�me soulev� est � la fois positif et n�gatif, m�me s�il se rattache � l�histoire dont nos jeunes g�n�rations sont sevr�es ! Je pense qu�au lieu d�interdire la conf�rence pr�vue pour le 3 juin, � Tlemcen, on aurait d� en assurer une large publicit� pour un d�bat contradictoire, et ce, au seul profit public. O. A.-A. 1 - �Le lion, c�est M�hand qui l�a tu�, l�honneur en revient au poltron vantard� 2 - �M�me toi� le traitant de fille 3 - Articles de presse du 02/06/2010 Libert� et du 06/06/2010 le Soir d�Alg�rie