Si le mouvement populaire qui s'est emparé de l'Algérie a un peu congelé les partis politiques, ce n'est pas le cas des organisations de la société civile qui tentent de s'organiser et de proposer une sortie de crise en phase avec les aspirations du peuple. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - Ce samedi, au lendemain du 14e vendredi de la mobilisation nationale, près de 60 organisations nationales, entre syndicats et associations, se sont réunies à Alger, à l'initiative de la CSA (Confédération des syndicats algériens). Ces organisations, regroupées autour de trois pôles ( le Collectif de la société civile pour une transition démocratique, la Confédération des syndicats algériens et le Forum pour le changement), investies dans le mouvement dès son déclenchement le 22 février, sont en quête d'une feuille de route consensuelle de sortie de crise. Toutes sont en faveur d'une transition démocratique et s'opposent à la tenue de l'élection présidentielle. Contactés par le Soir d'Algérie, des participants à cette réunion ont bien voulu s'exprimer sur leur volonté d'accompagner le mouvement populaire en mettant sur la table une solution afin que les décideurs ne soient plus étonnés de l'absence de propositions dans la conjoncture délicate mais porteuse de grands espoirs que traverse le pays. « La rencontre de samedi nous a permis d'aller encore plus dans les débats et d'approfondir la question de la feuille de route pour une sortie de crise que nous voulons consensuelle et adossée à un large front avant de la soumettre aux représentants du pouvoir effectif dans notre pays », fait savoir Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP). Selon lui, une synthèse des propositions (un avant-projet d'une feuille de route) a été présentée aux représentants de la société civile présents suivie d'un large débat autour de l'approche pour un règlement de la crise politique et institutionnelle que vit le pays avec une projection sur les objectifs, les mécanismes et les échéances pour un changement démocratique dans le cadre des aspirations et de la volonté du peuple algérien. « Cette réunion de concertation a été l'occasion pour échanger, coordonner et travailler ensemble pour sortir avec une seule feuille de route consensuelle qui répond aux aspirations du peuple algérien sorti depuis le 22 février », explique, pour sa part, Abdelouahab Fersaoui, président de RAJ. Ce dernier précise que cette proposition sera soumise au débat et à l'adoption lors de la conférence nationale de la société civile qui sera co-organisée et ouverte aux autres dynamiques au niveau national qui s'inscrit dans la rupture avec le système en place et qui demande une période de transition indépendamment des symboles du système. « Nous travaillons sur le rapprochement des différentes visions, partant de notre mandat de médiation en tant que segment de la société civile, nous souhaitons contribuer à la recherche d'une solution politique de sortie de crise pour une transition », explique, de son côté, Saïd Salhi, vice-président de la LADDH. Renforcer la mobilisation Il affirme que ces associations préparent une conférence nationale de la société civile inclusive pour dégager un large consensus autour d'une proposition consensuelle, appelant le pouvoir réel, incarné par le Commandement de l'armée, à ouvrir un dialogue avec le peuple pour amorcer une période de transition vers la nouvelle République démocratique, sociale et civile. « Le pouvoir incarné par l'état-major de l'armée doit cesser sa fuite en avant et doit répondre aux revendications du mouvement qui exige le changement du système et la période de transition », lance encore Abdelouahab Fersaoui. Pour lui, on ne peut plus parler de la solution constitutionnelle, elle est dépassé et caduque, il faut aller directement à la période de transition sans les symboles du système. « Le pouvoir doit engager un dialogue sérieux avec toutes les forces pour amorcer ce processus de transition démocratique avec ces propres mécanismes. La balle est dans le camp du pouvoir car le peuple ne va pas céder, il est déterminé à aller jusqu'au bout dans sa marche historique vers la liberté, la démocratie et un Etat de droit », affirme-t-il. Les participants à la réunion se sont donné rendez-vous la semaine prochaine, en vue de peaufiner leur plan de sortie de crise. « Nous allons nous réunir le samedi prochain pour essayer d'arriver à une solution consensuelle », indique Boualem Amoura du Satef ( Syndicat autonome des travailleurs de l'éducation et de la formation). « Nous espérons conclure sur un projet et adopter une démarche lors de la prochaine rencontre fixée au samedi 1er juin 2019 », souligne Lyes Merabet. Selon ce dernier, lors de la première rencontre tenue le 18 mai 2019, tous étaient d'accord sur la nécessité de renforcer la révolte populaire pacifique, car elle constitue l'élément moteur et fédérateur pour le changement démocratique dans notre pays, ainsi sur la levée de toutes les formes d'entrave contre le « Harak » et l'accès aux espaces publics. Le rejet de l'élection présidentielle du 4 juillet 2019 est aussi unanime chez les membres de ces organisations qui ont rappelé les missions principales et constitutionnelles de l'ANP dans la défense de la sécurité des citoyens et la stabilité du pays. Ils avaient lancé un appel à l'institution militaire pour l'ouverture d'un véritable dialogue avec les représentants de la société civile et de la classe politique pour trouver et construire une solution politique consensuelle en adéquation avec les aspirations du peuple. K. A.