C'est à partir d'Oran, en IIe Région militaire où il poursuivait sa visite de travail, que le vice-ministre de la Défense nationale, chef de l'état-major de l'armée, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd-Salah, réagira officiellement à la dernière déclaration faite par le Parlement européen, via sa commission des droits de l'Homme. «Je tiens à dire à ces outranciers de se soucier de leurs affaires et des problèmes de leurs pays», répliquera sèchement le patron de l'ANP. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Il s'agit là de la première réaction d'un haut responsable algérien aux propos de la présidente de la sous-commission européenne des droits de l'Homme, la députée belge Marie Aréna, qui s'exprimait, vendredi dernier, sur «la situation en Algérie». Sur les marches, sur la prochaine élection présidentielle, sur les détenus, affirmant, aussi que «nous les soutenons (les Algériens Ndlr) ici au Parlement européen en organisant des auditions avec un certain nombre d'acteurs de la révolution actuelle en Algérie». Une déclaration tout à fait maladroite, une ingérence directe en fait que Gaïd-Salah rejette et dénonce avec énergie. Dans un discours ferme, prononcé hier lundi à l'Ouest du pays, le vice-ministre de la Défense nationale se montrera d'ailleurs, extrêmement clair à ce sujet : «J'ai souligné à maintes reprises qu'il y a des parties étrangères hostiles qui complotent contre l'Algérie et qui tentent de s'immiscer dans ses affaires internes avec une complicité flagrante de la bande, à l'intérieur, que nous mettons en garde de jouer avec le feu. Ce sont des tentatives désespérées qui ont essentiellement pour but de porter atteinte à la stabilité et à la sécurité de l'Algérie et de son peuple (…) Ce peuple authentique et brave a su, depuis le début de la crise, mettre à nu ces manœuvres sournoises, et s'est exprimé, à travers ses marches pacifiques dont le civisme a été salué par le monde entier, son refus catégorique de toute ingérence étrangère dans les affaires internes de son pays et il n'accepte de recevoir aucune leçon, de quelque partie que ce soit, car il est souverain dans ses décisions.» S'adressant certainement aux principales capitales de la rive nord de la Méditerranée, le premier responsable de l'institution militaire insistera longuement sur cette question. «J'ai également affirmé, poursuit-il, que ce qui se passe en Algérie est une affaire interne qui concerne seuls les Algériens, et que le peuple, aligné aux côtés de son armée, saura comment faire face à ces manœuvres qui seront vouées à l'échec, surtout qu'il a entamé son chemin vers la sortie de crise le plus tôt possible, à travers l'organisation d'une élection présidentielle libre et transparente, qui se tiendra, avec l'aide d'Allah, le 12 décembre prochain.» Il s'agit, ici, d'un double message, à destination extérieure mais aussi interne. Gaïd Salah mettra une nouvelle fois en garde contre toute entrave au processus électoral. «Aujourd'hui, affirmera-t-il à ce propos, le devoir des fidèles patriotiques, à leur tête l'Armée nationale populaire, digne héritière de l'Armée de libération nationale, est de ne pas laisser l'Algérie, pays de millions de chouhada, en proie aux instigations et aux complots d'un petit groupe de personnes, pleines de rancœurs envers l'Algérie, qui planifient de perturber la fête de l'élection présidentielle». Or, fera encore remarquer le patron de l'ANP, «ces derniers ont oublié que la détermination des hommes intègres de la patrie à aller de l'avant pour réaliser les nobles objectifs nationaux du peuple algérien ne peut faire l'objet de polémique ni de controverse creuse et stérile». Le chef d'état-major explicitera même de quelle détermination il veut parler : «Aussi, en concrétisation de ces attentes populaires légitimes, nous n'hésiterons guère à faire face à ce groupe avec rigueur et fermeté. Et nous serons toujours, comme nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, les protecteurs de cette volonté populaire et nous veillerons à sa concrétisation à travers l'application minutieuse et stricte des lois en vigueur. Nous ne laisserons aucune occasion à la bande et à ses relais pour entraver cette fête électorale prometteuse et cruciale dans l'histoire de l'Algérie et nous concrétiserons ces paroles sur le terrain.» Dans cette nouvelle sortie publique, Gaïd Salah s'en prend vertement aux partisans de la transition. «Aucune tolérance envers ce groupe» Le patron de l'ANP reviendra en effet longuement sur cette affaire. : «Nos paroles ne sont pas infondées. Nous disposons de données qui confirment l'implication de ces traîtres et nous entreprendrons, sans nul doute, toutes les mesures nécessaires contre ce groupe en temps opportun et au nom de la loi. Aucune tolérance n'est permise envers ce groupe qui s'est habitué à imposer sa volonté inique sur la majorité.» De qui s'agit-il, plus précisément ? Assurément de personnalités nationales, certainement aussi des personnalités hostiles au processus électoral ou partisans de la transition. A se fier en tout cas à cette précision de Gaïd Salah «ils parlent et agissent sans tergiversations, à l'image de ceux qui prétendent être cultivés, et connaître la loi, mais agissent en totale contradiction avec la loi et complètement loin de ce qui est juste, à travers des déclarations tendancieuses, omettant que l'unique critère pour juger des actes et des paroles est le peuple algérien. Aussi, que celui qui veut mesurer sa vraie valeur se porte candidat : sinon tout le reste n'est qu'ineptie et sans aucune valeur». Plus grave encore, ces mêmes personnalités sont ouvertement accusées par le premier responsable de l'institution militaire d'être carrément à la solde d'officines étrangères. «Il est clair aujourd'hui, cette bande et tous ceux qui orbitent autour d'elle et se soumettent à ses ordres sont des intrus et des étrangers au peuple algérien. Celui qui ne sert pas l'intérêt de la patrie dans son sens réel est un intrus, voire un ennemi de la patrie. En effet, ce groupe n'a pas le droit de réfléchir, car les parties occultes, qui se tiennent derrière lui, sont le cerveau qui réfléchit à leur place et leur ordonne d'exécuter». Ceci étant, le vice-ministre de la Défense rappelait, hier, dans son discours, avoir donné «des instructions aux commandants des régions et des forces ainsi qu'aux différents services de sécurité pour prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour sécuriser le processus électoral à travers tout le territoire national». Et que, si besoin est, l'armée considère que «la prochaine élection présidentielle revêt une importance majeure». Avec tout ce que cela sous-entend comme mesures à prendre. K. A.