«Le nouveau projet de loi vise à atteindre un système juridique, institutionnel et fiscal stable et favorable à l'investissement dans le domaine des hydrocarbures à long terme, sans porter atteinte aux intérêts nationaux, d'autant que la règle des 49/51% concernant les investissements étrangers dans ce domaine a été maintenue.» Ainsi se justifiait le gouvernement après son adoption, le 2 du mois courant, de l'avant-projet de loi sur les hydrocarbures. Bien que souffrant d'un déficit en légitimité jusqu'à être remis en cause même par des voix acquises à la solution décidée par l'état-major de l'armée, et bien que constitutionnellement chargé de ne gérer que les affaires courantes, le gouvernement Bedoui a fini par oser mettre sur la table un sujet aussi sensible que la loi sur les hydrocarbures, à deux mois d'une élection présidentielle plus controversée encore que les plus récentes, tellement les incertitudes s'amoncellent sur la tenue du rendez-vous fixé par le calendrier décidé par ce qui reste des autorités du pays. Toucher avec une telle impassibilité, voire de froideur, au sacro-saint sujet de la ressource qui nourrit le pays ne perturbe pas plus qu'on aurait pu s'y attendre un gouvernement qui ne semble pas vouloir faire grand cas de l'accueil que sa décision a suscité. En effet, bien qu'assimilée quasiment à une atteinte à l'intégrité économique du pays, le gouvernement Bedoui a décidé de foncer dans le tas et entreprendre la révision de la loi en question, expliquant à qui veut l'entendre que ce choix est incontournable eu égard à ce que connaît comme évolution de par le monde le domaine des hydrocarbures, d'une part, et des difficultés qu'éprouve la compagnie nationale à exploiter, sans le concours de sociétés détentrices de la technologie la plus fine, le patrimoine pétrolier, gazier et minier en général. Beaucoup, mais pas tout, a été dit sur cette décision décriée presque avec la même véhémence par les manifestants du vendredi à travers le pays. L'essentiel du plaidoyer des autorités provisoires que constitue le gouvernement Bedoui s'est articulé, donc, sur la nécessité absolue pour l'Algérie de ne pas rester en marge de l'évolution du monde du pétrole et sur la difficulté qui fait que l'on n'exploite que 40% de l'espace global que compte l'espace minier national qui dépasse 1,5 million de km². Ceci d'une part. De l'autre, comme Mohamed Arkab, le ministre de l'Energie essayait de convaincre son auditoire, mardi dernier à Boumerdès, que les autorités du pays, à travers le nouveau projet de loi sur les hydrocarbures, visaient également l'augmentation et le renouvellement de la réserve nationale en produits énergétiques et la satisfaction de la demande interne en gaz et en produits pétroliers, en croissance de 7% annuellement. Lors de la même prise de parole, à Boumerdès, Mohamed Arkab, tout en affirmant que la loi en question était au stade de la réflexion et de l'étude depuis 2017 avant de voir le jour en avant-projet, entériné le 2 du mois en cours donc, se caractérisant par ce qu'il a appelé «une flexibilité permettant d'attirer des compagnies étrangères maîtrisant les technologies en la matière et ayant les ressources financières suffisantes pour investir en Algérie en partenariat avec Sonatrach». Un ministre, Mohamed Arkab, qui n'a pas mesuré combien ses propos tenus le lendemain, lors d'une rencontre à Alger dédiée à l'opportunité que pouvait constituer pour l'Algérie l'adhésion à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), pouvaient heurter la sensibilité des Algériens lorsqu'il révélait que des discussions avaient eu lieu avec de grandes compagnies, classées parmi les cinq meilleures dans le monde, pour finalement relever que deux aspects sont à améliorer dans l'actuelle loi sur les hydrocarbures ; le cadre réglementaire et le système fiscal. Le texte de loi, dont quelques-unes des grandes lignes ont été portées à la connaissance des Algériens, prend en charge tous les aspects juridiques, financiers, fiscaux, environnementaux et sanitaires, a confié le ministre de l'Energie. L'on saura, ainsi, que les amendements proposés prévoient trois types de contrats pétroliers et la simplification du système fiscal. Il s'agit du «contrat de concession», du «contrat de services à risques» et du «contrat de partage de production», le genre d'accords que privilégient les grandes compagnies mondiales. Sans état d'âme, le ministre a affirmé que les potentiels investisseurs étrangers «se sont réjouis de cette démarche (…) et ont assuré que la règle des 51-49% ne constituait pas une entrave et c'est pourquoi nous l'avons maintenue». Quant à la fiscalité, quatre types d'impôt ont été retenus dans l'avant-projet pour préserver les recettes de l'Etat, simplifier le système fiscal, et enfin garantir une stabilité de ce même système fiscal. Par contre, de l'opportunité de revoir là, maintenant, par ces temps hautement incertains sur le plan politique, une loi qui compte aussi lourdement, on n'en saura rien, le gouvernement ne jugeant pas nécessaire de justifier son action, préférant ainsi s'adonner à tout ce qui s'apparente à un coup de force. Azedine Maktour