Isabelle Eberhardt, L'autre pays, l'autre amour, est un nouvel ouvrage du Dr Kinzi Kaddour, docteur-enseignant en sciences de l'information et de la communication, à l'Université de Bordeaux qui a été présenté au public, à l'occasion du 115e anniversaire de la disparition tragique d'Isabelle Eberhardt, commémorée, notons-le, par l'association culturelle Safia-Ketou dans l'enceinte de l'annexe de la maison de la culture Beghdadi-Belkacem de Aïn-Sefra. Isabelle Wilhelmine Marie Eberhardt est née le 17 février 1877 à Genève, d'origine russe et suisse. Elle vint dans la région de Aïn-Sefra, en tant que journaliste d'El-Akhbar la dépêche algérienne, quelques jours seulement avant le Maréchal de France, Louis Hubert Lyautey, dépêché en 1903 pour commander la subdivision de Aïn-Sefra et superviser les troupes coloniales, à la suite des évènements sur les razzias de Ksar Sfissifa, le siège de Taghit, et la bataille d'El-Moungar (insurrection de Cheikh Bouamama). Appelée communément Si-Mahmoud pour son uniforme masculin en cavalier arabe, elle est un de ces personnages à la fois universels et uniques, dont le mode de vie, les amitiés et les habits masculins avaient étonné plus d'un sur les rives du Léman. Elle étonna bien davantage les Français d'Algérie, qui l'observèrent avec méfiance, jugeant son comportement répréhensible. «N'est-ce pas la terre qui fait les peuples ? Que sera l'empire européen d'Afrique dans quelques siècles, quand le soleil aura accompli dans le sang des races nouvelles ? A quel moment nos races du nord pourront-elles se dire indigènes comme les Kabyles roux et les Ksouriennes aux yeux pâles ? Ce sont là des questions qui me préoccupent souvent…», disait Isabelle. Son regard n'allait se poser, ni sur l'Orient des richesses ni sur celui des mirages, il n'allait qu'à l'Orient des réalités quotidiennes à «… ceux qui n'ont rien et à qui on refuse jusqu'à la tranquillité de ce rien....». Par sa plume précise et acerbe, elle s'est insurgée contre les comportements inhumains des troupes coloniales et a dénoncé leurs agissements. Elle ne racontait de l'Algérie «rien de ce qui aurait pu plaire au colonialisme». Elle meurt à l'âge de 27 ans, lors de la crue subite et catastrophique de Oued Sefra, le 21 octobre 1904. Elle repose au cimetière musulman Sidi-Boudjemaâ à Aïn-Sefra, sur ce désert d'Algérie qu'elle a tant chéri… comme elle le suggère dans ses écrits : Aïn-Sefra, été 1904, … «maintenant que j'y vis, en un petit logis provisoire, je commence à l'aimer. D'ailleurs, je ne la quitterai plus». B. Henine