La coïncidence a voulu que le second jour de grève décrétée par les magistrats intervienne avec celle déclenchée par la Confédération nationale des syndicats (CSA), atténuant ainsi le retentissement que le mouvement avait pris la veille. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Le gel des activités des magistrats a, cependant, été, une nouvelle fois, très largement suivi à Alger et à travers le pays. Dans la capitale, les citoyens ont pu constater que toutes les audiences avaient été reportées, comme dimanche. Le général Benhadid, actuellement incarcéré, devait comparaître au niveau du tribunal de Bir-Mourad-Raïs dans le cadre d'un dossier où il devait être écouté comme témoin, mais son affaire s'est vu reportée. Tout comme a été reconduite la détention provisoire du moudjahid Lakhdar Bouregaâ. La veille, quatre personnes arrêtées en marge de la manifestation des avocats qui avait eu lieu jeudi passé ont attendu de longues heures une éventuelle comparution à Sidi-M'hamed mais le procureur leur a fait savoir qu'il était tenu de respecter la grève à laquelle a appelé le Syndicat national des magistrats (SNM). Issad Mabrouk, qui préside ce syndicat, a tenu à lancer, lundi matin, un nouvel appel à la poursuite du mouvement de protestation. Dans une déclaration au journal en ligne TSA, celui-ci a tenu à souligner que «l'entêtement du ministère et la fermeture des portes du dialogue sont la cause de la situation actuelle». «Nous poursuivrons la grève jusqu'à satisfaction de nos revendications» a-t-il ajouté tout en indiquant que «le communiqué du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) répond à toutes les interrogations qui se sont posées et confirme que le mouvement a été décidé sans aucune étude préalable, il est impossible que les membres du CSM aient dit des contre-vérités en faisant savoir qu'ils n'avaient pas pu exercer leurs prérogatives dans la préparation et l'exécution du mouvement». Dimanche après-midi, le CSM avait, en effet, publié un texte inattendu, signé par douze magistrats dont deux désignés par le président de la République, pour annoncer le gel du mouvement auquel avait procédé Zeghmati. Il s'agissait d'une opération de grande envergure touchant près de 3 000 magistrats, sur les 6 000 comptabilisés à travers le territoire national, et portant sur la décision de mutation d'un grand nombre d'entre eux. Jeudi, le CSM avait annoncé officiellement avoir validé ces décisions. Le SNM a, comme on le sait, immédiatement réagi et appelé à une réunion extraordinaire dénonçant une «transgression des prérogatives du CSM» et la prise de décision unilatérale par le ministère de la Justice. La réaction du Conseil supérieur de la magistrature a conforté le syndicat et donné plus de poids à son action. Le ministère de la Justice, resté silencieux toute la journée au sujet de la paralysie des activités judiciaires, a été, cette fois, prompt à intervenir en déclarant le communiqué illégal car n'ayant pas été promulgué à l'issue d'une session ordinaire durant lesquelles il est annuellement appelé à se réunir ni en «session extraordinaire convoquée par son président ou son vice-président ». Selon le ministère de la Justice, «ce genre de comportements porte atteinte aux prérogatives et pouvoirs du chef de l'Etat qui est le président du Conseil supérieur de la magistrature et son vice-président ( le ministre de la Justice), qui sont les seuls habilités à convoquer le Conseil supérieur de la magistrature ». Il a, aussi, déploré des comportements émanant «de professionnels et d'enseignants universitaires en droit censés ne pas oublier ces règles». Jusque dans l'après-midi, aucune nouvelle réaction de Zeghmati n'avait été enregistrée. Le gouvernement s'est, par contre, exprimé sur la situation par la voix de son porte-parole lequel a affirmé que «l'Etat avait, pour sa part, opté pour le dialogue (…) un cadre dans lequel doivent s'insérer les magistrats pour faire valoir leurs préoccupations dans le cadre de la loi». Selon des informations dignes de foi, il semblerait que de premiers contacts ont été amorcés entre les deux parties hier. Il était question d'avancer la réunion du CSM, initialement prévue dans trois semaines, et durant laquelle le sujet de discorde devait être débattu en présence de toutes les parties. Le Conseil supérieur de la magistrature a été appelé, en attendant, à étudier tous les recours des magistrats qui se sentent lésés par les mesures dont ils ont fait l'objet. En fin de journée, aucune annonce officielle n'avait été faite. Les grévistes, nous dit-on, devaient s'en tenir aux instructions fournies dimanche soir par les responsables du SNM. Ces derniers ont appelé au report de toute audience ou signature de documents judiciaires. Seules les demandes de liberté provisoire et mises sous mandat de dépôt pouvaient être examinées. Les juges impliqués dans la surveillance « du processus électoral» ont été également instruits de poursuivre leur mission. A. C.