«En ces moments où l'Algérie se repense, nous gardons la conviction que le savoir et la pensée, de même que les lettres bien entendu, contribuent de manière profonde et utile à enrichir les débats et les démarches», a souhaité M. Mohamed Iguerb, commissaire du Sila Le Salon international du livre d'Alger (Sila), qui a fermé ses portes hier, n'a certainement pas battu son record de fréquentation de 2018 (2,2 millions de visiteurs). En effet, cette 24e édition ouverte au public du 31 octobre au 9 novembre 2019, avec un nouveau commissaire en la personne de Mohamed Iguerb, a eu un sérieux «concurrent» : les deux vendredis du Hirak, le 8 et surtout le 1er novembre. Le Hirak d'ailleurs a eu son lot de publications, notamment, le roman de fiction Casa del Mouradia de Mohamed Benchicou et Libertés, dignité, algérianité. Avant et pendant le Hirak de Mohamed Mebtoul, tous les deux parus chez les éditions Koukou, ainsi que Révolution du 22 février, un miracle algérien, de Saïd Sadi, paru aux éditions Frantz-Fanon. Le Sila a certainement gagné en qualité (et en quantité) avec un lectorat et donc des ventes en hausse, selon plusieurs éditeurs privés. Les deux séances de ventes-dédicaces de Hakim Laâlam au stand des éditions Frantz-Fanon ont pris l'allure d'une séance d'autographes d'une rock star. Parmi les grands moments du Sila, figure la conférence animée par l'Américaine Elaine Mokhtefi, écrivaine engagée, notamment pour l'indépendance de l'Algérie, durant le guerre de Libération nationale. Le Sénégal, invité d'honneur de cette édition 2019, a été représenté par une forte délégation constituée d'éditeurs, d'écrivains et d'intellectuels et par le ministre de la Culture et de la Communication sénégalais, M. Abdoulaye Diop. Dès la première journée du Salon, une rencontre littéraire intitulée «Escale littéraire à Dakar» a réuni le public algérien avec les intellectuels sénégalais Hamidou Sall, Khallil Diallo, Rahmatou Seck Samb et Abdoulaye Racine Senghor. Le jeune écrivain Khalil Diallo a d'ailleurs rencontré «en solo» le public algérien ce jeudi. En marge de la rencontre, il n'a pas caché son admiration pour Kateb Yacine qui, a-t-il dit, en parlant de petits villages algériens les a fait connaître au monde entier. Il a aussi révélé que Mohammed Dib a été le sujet d'un baccalauréat au Sénégal. Les rapports entre la littérature et le théâtre à travers l'adaptation ont été abordés en détail lors de la rencontre «Pages et planches : de la littéraire au théâtre», animés, entre autres, par Omar Fetmouche, Ahmed Cheniki, Ziani Cherif Ayad et Haroun El Kilani. Un hommage a été rendu à Abdelkader Alloula à travers une conférence animée par Najet Khadda. Dans le domaine des bilans, les résultats d'un nouveau sondage sur le lectorat en Algérie, présentés au 24e Sila, ont fait ressortir une hausse du lectorat en langues arabe et anglaise et un recul en langue française. Réalisé lors de la 23e édition du Sila (en 2018) par l'établissement Immar, le sondage montre que les lecteurs en langue arabe «continuent à occuper la première place» et qu'ils s'intéressent «à divers thèmes et dans différents domaines». Le lectorat en langue française vient en deuxième position, suivi de la langue anglaise, puis du tamazight. Selon le même sondage, les œuvres littéraires sont les plus consultées par les interviewés, suivies de livres scientifiques et techniques qui ont devancé le livre religieux. les livres électroniques sont plus consultables que les livres en papier, selon les avis de quelque 800 participants (hommes et femmes) à cette étude «restreinte» vu «le manque de temps», ont indiqué les responsables de ce sondage qui vise, ont-il poursuivi, à comprendre le comportement du public du Sila et à l'interpréter en chiffres. Ce sondage, font-ils remarquer, «ne représente pas le taux global du lectorat en Algérie» mais seulement «celui du public du Sila». Les nouveautés n'ont pas manqué dans ce 24e Sila. Le roman (de fiction) et le livre d'histoire et le témoignage ont constitué cette année encore la principale tendance des nouvelles publications. Parmi les ouvrages les plus remarquables figure L'Encyclopédie algérienne, un ouvrage paru à Kalma Communication en trois volumes consacrés à l'histoire et à la culture millénaires de l'Algérie, à travers son patrimoine, ses coutumes ainsi que ses élites et figures emblématiques. L'ouvrage de 630 pages, présenté sous forme de coffret, est publié également en France chez le même éditeur. L'Encyclopédie algérienne est le fruit d'un travail collectif mené par une dizaine de chercheurs, sous la direction du chercheur Rachid Benyoub et du journaliste Abdelhakim Belbati. Du côté du livre sportif, parent pauvre de l'édition algérienne, nous avons quand même deux nouveautés, à savoir Ahcène Lalmas, la légende du journaliste sportif Yazid Ouahib et Var : les histoires secrètes des champions d'Afrique de son confrère Nedjmeddine Sidi-Athmane. Pour la première fois, la Poste algérienne a procédé à l'émission d'un timbre-poste sur le Sila au bonheur des philatélistes. «En ces moments où l'Algérie se repense, nous gardons la conviction que le savoir et la pensée, de même que les lettres bien entendu, contribuent de maniére profonde et utile à enrichir les débats et les démarches», a indiqué Mohamed Iguerb, commissaire du Sila. Près d'un millier d'éditeurs présentant quelque 183 000 titres ont participé au 24e Salon international du livre d'Alger qui s'est déroulé du 31 octobre au 9 septembre 2019 au Palais des expositions des Pins-Maritimes et qui est classé à la première place en Afrique, dans le monde arabe et dans le bassin méditerranéen. Le Salon algérois (en moyenne 1,5 million de visiteur par an) est classé deuxième au monde après la Foire du livre de Frankfort en Allemagne. Kader B.