C'est donc aujourd'hui, dimanche 17 novembre, que s'ouvre, officiellement, la campagne électorale pour l'élection présidentielle du 12 décembre prochain. Une campagne, et une élection s'entend, pour le moins inédite, ne ressemblant quasiment en rien aux précédents rendez-vous électoraux du genre, dans l'histoire du pays. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Intervenant dans un contexte de crise politique majeure, née de l'explosion en plein vol du surréaliste projet d'un cinquième mandat pour Abdelaziz Bouteflika , qui a dû renoncer, dans la foulée, au « clonage » du quatrième mandat également projeté, à la suite de l' extraordinaire soulèvement populaire du 22 février, ce rendez-vous est appelé à mettre fin à une vacance de pouvoir qui menace dangereusement l'existence même de l'Etat algérien. Le 2 avril 2019, en effet, le Haut Commandement de l'Armée nationale populaire intervenait pour imposer l'application de l'article 102 de la Constitution, débloquant ainsi une situation qui tendait vers un pourrissement certain. La chute de Bouteflika , réclamée avec une unanimité nationale qui n'a d'égale que celle dont ont fait montre les Algériens lorsqu'il s'était agi de sceller le sort du colonialisme français en été 1962, ne mettra pas fin, pour autant, à la crise politique. En application de l'article 102 de la Constitution, Abdelkader Bensalah accède à la fonction de chef de l'Etat par intérim et entame sa mission, celle qui consiste à préparer une élection présidentielle. Le corps électoral sera ainsi convoqué pour le 4 juillet. Précédé par un appel au dialogue, ce rendez-vous n'aura jamais lieu faute, d'abord, d'interlocuteurs pour Bensalah pour ledit dialogue et, ensuite, et ce sera une première dans les annales, faute de candidats pour les élections ! Face à la gravité de la situation, l'armée décide alors de prendre le relais. S'engageant au préalable , publiquement et par la voix de son premier responsable, le chef d'état-major et vice-ministre de la Défense nationale à n'avoir ni « d'ambitions politiques personnelles » , ni l'intention de présenter ou soutenir un candidat, l'armée insistera par contre, et en cela elle se veut intraitable, sur le strict respect de la Constitution et, en l'espèce, la tenue de la présidentielle. Pour cela, des mesures importantes seront annoncées par Bensalah dans un discours à la Nation, le 3 juillet dernier. Il s'agit, notamment, de la constitution d'un panel de dialogue national, présidé par l'ancien président de l'APN, Karim Younès. Un panel qui a eu à mener un dialogue national avec, au bout, deux importantes mesures ; la création de l'Autorité nationale chargée des élections ( Anie ) que préside l'ancien ministre de la Justice , Mohamed Charfi, et la révision du code électoral. L'avènement de l'Anie excluant , désormais, le gouvernement de toutes les étapes du processus électoral comme réclamé par l'opposition depuis toujours, l'élection présidentielle fixée au 12 décembre trouvera, cette fois, des partisans et des candidats , y compris parmi les rangs de l'opposition qui s'était fédérée sous les appellations de Mazafran 1 et 2, Aïn Benian, etc. A l'arrivée, cinq candidats seront retenus officiellement, à savoir ; le président du parti El Moustaqbal, Bélaïd Abdelaziz, le président du parti Talaie el Houriet, et ancien chef de gouvernement, Ali Benflis, le président du parti islamiste, El Binaa et ancien ministre de Abdelkader Bengrina, l'ancien Premier ministre Abdelmadjid Tebboune et, enfin, le secrétaire général par intérim et ancien ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi. Autrement dit, quatre candidats représentant le courant nationaliste et un seul pour le courant islamiste à se disputer la course à la présidence boudée, pour la première fois, par le courant démocrate qui, cette fois, a pris position, de manière collective, contre les élections. Les cinq candidats devront, à partir d'aujourd'hui, tenter d'affronter une situation inhabituelle et exceptionnelle sur le terrain. Le premier enjeu d'ailleurs de l'élection du 12 décembre reste, incontestablement, son taux de participation. Il s'agit, là aussi, du premier défi des cinq candidats qui auront trois semaines devant eux, pour séduire et convaincre un électorat plus que jamais exigeant, sur tous les plans. L'autre caractéristique de cette élection, et dont on ne parle pratiquement jamais, est son incertitude : à quelques jours de son déroulement, tous les observateurs en sont toujours au seul stade des spéculations, s'agissant du « bon candidat », à savoir, comme il était de coutume, le candidat du pouvoir, soit le vainqueur désigné avant l'heure. A telle enseigne, d'ailleurs, que même un parti comme le FLN ou encore la nuée des organisations de masse, si prompts d'habitude à annoncer leur soutien respectif à « l'homme du consensus » , observent toujours une déroutante « neutralité active ». En attendant surtout un plus que probable second tour… K. A.