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Le Mur de Berlin si loin si proche
Publié dans Le Soir d'Algérie le 25 - 11 - 2019

9 novembre 1989 - 9 novembre 2019, il y a de cela trente ans, le monde entier assistait médusé à la chute du Mur de Berlin construit en 1961 à l'initiative du gouvernement soviétique, au plus fort de la guerre froide. Officiellement, les Allemands de l'Ouest le surnommaient « Mur de la honte » et les Allemands de l'Est « Rempart antifasciste ». Ce mur de 180 kilomètres de long scindait la ville de Berlin en deux. D'un côté, Berlin Ouest, enclave de la République fédérale allemande en République démocratique allemande, placé sous administration militaire alliée. De l'autre, Berlin Est, capitale de la République démocratique allemande, dont le territoire était sous contrôle de l'Union soviétique. Au-delà de la division Est-Ouest, le Mur de Berlin symbolisait la phase ultime de confrontation idéologique entre Russes et Américains.
Politique des blocs et monde bipolaire
Dans l'immédiat après-guerre, géostratégies et relations internationales traditionnelles sont totalement bouleversées. Deux blocs européens se sont constitués autour des grands vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale : l'URSS et les Etats-Unis. Bloc soviétique et bloc occidental se côtoient sans jamais se confondre. Monde communiste d'un côté, monde capitaliste de l'autre. Le camp de la dictature du prolétariat à l'Est, le camp des démocraties libérales à l'Ouest. Le rideau de fer, cette frontière militarisée longue de 8 500 kilomètres, sépare hermétiquement les Etats d'Europe de l'Est ou « Démocraties populaires » situées dans la zone d'influence soviétique, des Etats d'Europe occidentale tournés vers les Etats-Unis. Les pays de l'Est sont regroupés en une force militaire commune de huit Etats (Tchécoslovaquie, Bulgarie, Romanie, Pologne, Albanie, Hongrie, Allemagne de l'Est, URSS) au sein du Pacte de Varsovie. Les pays du bloc occidental au nombre de vingt-huit (France, Royaume-Uni, Italie, Portugal, Etats-Unis...) forment une alliance militaire au sein de l'OTAN (Organisation du traité de l'alliance atlantique nord). Ces organisations de défense collective à caractère dissuasif, placées respectivement sous le commandement de l'Union soviétique et des Etats-Unis, renforcent l'esprit de solidarité et de cohésion entre les Etats membres. C'est un conflit idéologique et de puissance où Russes et Américains tentent, avec le soutien de leurs alliés, d'étendre leur sphère d'influence et d'imposer leur suprématie à l'échelle planétaire. C'est l'ère de la guerre froide, une paix belliqueuse avec ses affrontements politico-stratégiques, ses vives tensions diplomatiques et ses luttes idéologiques qui vont polariser la vie des nations autour d'enjeux et d'intérêts antagoniques. Un monde bipolaire a vu le jour. Pôle soviétique et Pôle américain représentent deux modèles politiques opposés, fondés sur deux doctrines, deux conceptions du monde et de la société radicalement différentes. La lutte féroce d'hégémonie et de puissance que se livrent les deux Grands incite les Etats à se ranger aux côtés de l'un ou de l'autre. Les Etats-Unis se posent en défenseurs de la démocratie et des libertés, l'URSS prône le modèle communiste et sa société sans classe comme alternative au modèle libéral.
La Conférence de Bandung: entre guerre froide et décolonisation. Présence de l'Algérie combattante
C'est dans un contexte de guerre froide, de course aux armements et de crises lourdes où les deux Grands s'affrontent par Etats interposés, que se tient, du 18 au 24 avril 1955, la Conférence de Bandung en Indonésie. C'est la première conférence afro-asiatique. Elle réunit vingt-neuf pays d'Afrique, d'Asie et du Moyen-Orient dont la plupart sont nouvellement indépendants. Le continent africain est insuffisamment représenté car nombre de pays sont encore sous domination coloniale, à l'exemple de l'Algérie. Cependant, une délégation du FLN, venue avec la délégation égyptienne, assiste à la conférence. Conduite par Hocine Aït Ahmed, elle a le statut d'observateur. Le combat pour l'indépendance n'était pas seulement militaire, il se passait aussi sur le terrain diplomatique, afin de faire entendre la voix du peuple algérien dans les enceintes internationales.
Six pays en tout et pour tout représentent l'Afrique (Egypte, Soudan, Liberia, Ethiopie, Libye et la Côte-de-l'Or, le futur Ghana). Les pays asiatiques sont au nombre de quinze (Afghanistan, Vietnam, Laos, Ceylan, Birmanie…). Tous rejettent la politique des blocs et refusent tout alignement sur l'un d'entre eux. Ils font valoir leurs aspirations et intérêts propres. Une communauté de destin lie ces pays désireux d'échapper à l'emprise des deux Grands et à la logique de guerre froide. L'expression « Tiers-Monde » consacrée par la Conférence de Bandung englobe des nations, pour la plupart sous-développées, qui tentent de trouver leur place en dehors de la dualité Est-Ouest.
Bandung marque l'entrée des pays décolonisés sur la scène internationale. Les principaux artisans de la rencontre, Jamal Abdel Nasser (Egypte), Soekarno (Indonésie), Nehru (Inde), et Zhou Enlai (Chine), soucieux de se tenir à distance des deux blocs, soviétique et américain, revendiquent le « neutralisme », à savoir le refus d'adhésion à tout système d'alliance politique ou militaire avec les deux puissances du moment.
A l'issue de la conférence, la résolution finale prône la coexistence pacifique entre les Etats, l'émancipation des peuples d'Afrique et d'Asie soumis au joug colonial, et l'établissement de relations commerciales équitables entre les pays développés et les pays les moins avancés. C'est un évènement historique marquant de la guerre froide et de la décolonisation. Outre son impact psychologique sur les peuples en lutte pour l'indépendance, la Conférence de Bandung a eu le mérite de poser les bases du mouvement des non-alignés.
L'Algérie socialiste, un modèle politique inspiré des démocraties populaires
La Constitution du 10 septembre 1963 adoptée après l'indépendance dispose que l'Algérie est une République démocratique et populaire. Elle consacre le système de parti unique, en l'occurrence le FLN. Un des objectifs fondamentaux qu'elle assigne à l'Etat consiste dans l'édification d'une démocratie socialiste. A l'évidence, on y retrouve les principaux attributs du mode de gouvernement qui caractérisent alors les « démocraties populaires » d'Europe de l'Est. S'il n'y a pas identité, il y a de nombreuses similitudes. Il faut préciser que les pays du bloc de l'Est bénéficiaient d'un grand capital de sympathie pour leur appui constant à la révolution. Leur modèle politique avait des partisans parmi les dirigeants du FLN. L'hégémonie du parti unique sur les organes de l'Etat n'était pas pour leur déplaire et ils ne se privèrent pas de le consacrer dans la première Constitution de 1963.
A l'époque où l'Algérie recouvrait son indépendance, la guerre froide avait atteint un pic avec la crise de Cuba, dite aussi « Crise des missiles ». Bien que membre du groupe des non-alignés, l'Algérie montrait une faveur certaine pour le bloc de l'Est et les pays satellites. L'expression consacrée « Les pays frères et amis » était typique du vocabulaire de la diplomatie algérienne à l'époque de la guerre froide. Le principe de non-alignement ne l'empêchait pas de dénoncer « l'impérialisme et le néo-colonialisme », termes que la sémantique politique assimilait au bloc occidental.
L'Algérie, membre actif du mouvement des non-alignés
La Conférence de Brioni (Yougoslavie), qui s'est tenue du 1er au 6 septembre 1961, dans l'esprit et la continuité de la conférence afro-asiatique de Bandung d'avril 1955, marque la naissance du mouvement des non-alignés dont les Etats membres refusent de se soumettre à la politique des blocs et tentent de s'ériger en une troisième force autonome dans un contexte de guerre froide et de décolonisation à grande échelle. Dans les années soixante, les nombreux pays africains nouvellement indépendants optent pour une politique de non-alignement, afin de se prémunir contre toute influence dans l'exercice des pouvoirs inhérents à leur souveraineté nationale. L'Algérie n'est pas en reste. Sous l'ère Boumediène, elle va jouer un rôle actif au sein du mouvement des non-alignés.
La Conférence d'Alger du 5 au 9 septembre 1973 va initier un programme intitulé le « Nouvel ordre économique mondial » qui sera adopté par l'Assemblée générale des Nations-Unies, le 1er mai 1974. Ce programme, dont le Président Houari Boumediène était le principal inspirateur, propose des mesures qui portent notamment sur l'exploitation des ressources nationales, le financement du développement, l'industrialisation et le transfert de technologie.
L'Algérie saura utiliser, au nom des non-alignés, les tribunes internationales et les cercles diplomatiques pour faire valoir le droit des pays du Tiers-Monde au développement et à l'exploitation de leurs ressources naturelles pillées par les multinationales. Mais ces revendications n'auront que peu d'écho auprès des nations occidentales industrialisées, guère enclines à faire du Tiers-Monde un bloc concurrentiel.
La chute du Mur de Berlin : une onde de choc à l'échelle planétaire
Dans la nuit du 8 au 9 novembre 1989 devant les caméras du monde entier qui immortalisent et relaient l'évènement, des jeunes Allemands de l'Est et de l'Ouest détruisent des pans du Mur de Berlin dans une liesse générale, tandis que le célèbre virtuose russe Rostropovitch exécute des partitions sur son violoncelle pour accompagner ces heures historiques. L'atmosphère est presque surréaliste. Vingt-huit ans après sa construction, le mur de Berlin, symbole par excellence du clivage idéologique de la guerre froide et du partage du monde en deux blocs, tombe à tout jamais. Les évènements vont s'accélérer avec l'effondrement de la République démocratique d'Allemagne, et par effet domino la chute successive des régimes communistes d'Europe centrale et orientale. Ainsi, le 3 octobre 1990, le traité de Moscou consacre la réunification des deux Allemagne. En Tchécoslovaquie, la révolution de Velours du 17 au 18 novembre 1989 met fin au système communiste. Puis suivent la Bulgarie, la Pologne, la Hongrie et la Roumanie où le changement est plus violent. C'est la désagrégation de l'empire soviétique issu de l'après-guerre. Un évènement majeur dans l'histoire de l'Europe et du monde. L'Union soviétique elle-même ne sort pas indemne de cette vague de fond. Une nouvelle carte de l'Europe se dessine. De nouveaux Etats apparaissent, de nouvelles frontières voient le jour. Les Républiques baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie) proclament leur indépendance en mars et mai 1990. Ce sont les premières brèches qui vont aboutir, le 26 décembre 1991, à la dislocation territoriale du plus vaste Etat du monde: l'URSS. Plusieurs territoires d'Asie centrale et du Caucase se détachent de l'Union. L'Histoire est en marche et plus rien ne peut l'arrêter. L'effondrement de l'URSS signe la fin de la guerre froide et la mort du communisme en tant que forme de pouvoir.
Avec la chute du Mur de Berlin, c'est un ordre mondial politique, économique et social qui s'écroule dans son intégralité, à l'avantage du bloc occidental. Partout en Europe de l'Est, s'amorcent des processus de transition démocratique. Berlin réunifiée devient l'épicentre d'une révolution de grande ampleur qui fait du modèle démocratique libéral la référence universelle, à savoir un mode de gouvernement qui se caractérise par des élections libres et pluralistes, l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, la protection des droits et libertés individuelles. Dès lors, la démocratie représentative délégitime l'autoritarisme sous toutes ses formes.
L'économie de marché et le libre-échange deviennent le modèle de référence. Le système économique basé sur une stricte planification étatique n'a plus cours. Ainsi, les démocraties populaires de l'ex-bloc de l'Est, véritables modèles réduits de l'Union soviétique, passent du monolithisme marxiste-léniniste au libéralisme politique et économique. C'est le triomphe du bloc occidental après plusieurs décennies de confrontation avec le bloc soviétique.
Les événements d'Octobre 1988 précurseurs de la chute du Mur de Berlin
Les émeutes d'Octobre 88 contre le système de parti unique et son corollaire le principe de la démocratie socialiste, ont devancé d'une année la chute du Mur de Berlin et l'effondrement des démocraties populaires qui s'ensuivit en une réaction en chaîne incontrôlable.
Les revendications d'Octobre 88 exigeaient des réformes profondes du système politique en place. Le séisme fut tel, qu'une nouvelle Constitution est adoptée à la hâte, le 23 février 1989. Celle-ci ne fait plus référence au socialisme. Le multipartisme est consacré ainsi que la séparation des pouvoirs. Les droits et libertés fondamentaux des citoyens (liberté d'expression, d'opinion, d'association, liberté de la presse...) sont reconnus et protégés. C'est une véritable révolution politique et institutionnelle à l'échelle du pouvoir d'Etat en Algérie. Il n'est guère exagéré d'affirmer que les événements d'Octobre 1988 ont été sinon les catalyseurs, les précurseurs de la chute du Mur de Berlin et de l'effondrement des démocraties populaires d'Europe de l'Est.
Trente ans après, où en sommes-nous ? Grande illusion. Octobre 1988 a été récupéré par le pouvoir et vidé de son sens. Depuis, le pays continue à s'enfoncer dans le marasme et naviguer à vue. Les signes de régression sont partout perceptibles.
Le mur entre le pouvoir et le peuple n'est toujours pas tombé, afin de construire un consensus national. Au classement 2019 des pays par indice de démocratie, l'Algérie se trouve à la 126e place sur 167, bien après les Comores, le Mozambique ou le Mali. La méthodologie de calcul de l'indice de démocratie prend en compte cinq types de données:
processus électoraux libres et pluralistes ;
mode de fonctionnement du gouvernement ;
participation des populations à la vie politique et consensus social ;
exercice des libertés civiles.
Depuis 1988 à ce jour, le système démocratique reste à parachever. L'Algérie n'est plus dans le système de parti unique sans être pour autant dans un régime pluraliste digne de ce nom.
Antonio Gramsci, le célèbre philosophe et théoricien politique italien, dit dans « Cahiers de prison » :« Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres .»
Mais l'optimisme reste de rigueur. Le peuple algérien, mû par ses espoirs et ses perspectives inébranlables, est seul en mesure de peser sur son propre destin.
D. K.
(*) Ecrivain. Ex-directeur général de la Fonction publique. Docteur en sciences juridiques.


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