La grande incertitude dans laquelle évolue le marché mondial du pétrole depuis le début de l'année connaît une éclaircie, cette semaine notamment, mais cette bouffée d'oxygène pour les pays producteurs et les investisseurs ne rassure pas plus que cela du fait, en particulier, de la lenteur de la réponse russe aux recommandations émises par le Comité technique de l'Opep, il y a plus d'une semaine maintenant. Jusqu'à hier, à la mi-journée, le pétrole a poursuivi sur sa lancée des trois derniers jours marqués par une hausse, certes très relative, mais une hausse tout de même qui bat en brèche tous les scénarios alarmistes, il est vrai nourris par une somme de données qui suscitent plus l'incertitude que l'optimisme affiché il y a quelques semaines encore, notamment par l'Opep et ses alliés engagés pour enrayer la chute des prix. Jusqu'à hier, à mi-séance, les cours étaient donc orientés vers le haut. Le baril de Brent pour livraison en avril valait 57,16 dollars sur le marché londonien, en hausse de 1,46% par rapport à la clôture de jeudi, alors que sur le marché new-yorkais, le baril de WTI valait 52,06 dollars, soit 1,28% de mieux que son dernier cours de jeudi. Une hausse qui intervient malgré les affirmations quant à une réduction conséquente de la demande mondiale et les atermoiements des signataires de l'accord entre les pays de l'Opep et leurs alliés conjoncturels. Des incertitudes qui n'ont pas empêché donc que l'or noir se dirige, à la surprise de pratiquement tous les analystes, vers le bouclage d'une semaine positive comme il ne lui est pas arrivé depuis celle de la fin décembre. Jusqu'à vendredi en début d'après-midi, le pétrole se maintenait dans le vert en dépit, donc, des conséquences ravageuses du coronavirus sur la demande mondiale, comme le stipule le tout dernier avis sur la question ; celui de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) qui a alerté, jeudi, sur les «conséquences significatives» de cette épidémie sur la demande, revoyant du coup ses prévisions à la baisse de 365 000 barils par jour pour cette année. L'AIE emboîtait le pas, ainsi, à l'Opep qui, mercredi, exprimait son analyse sur la demande mondiale de pétrole en mettant en avant «l'impact de l'épidémie de coronavirus sur l'économie chinoise a ajouté aux incertitudes entourant la croissance économique mondiale en 2020 et, par extension, la croissance de la demande mondiale de pétrole en 2020». En conséquence, l'Opep s'attend à une réduction de la demande de 230 000 barils par jour, par rapport à ses estimations du mois dernier, soit une réduction de ses prévisions de près de 20%. De quoi nourrir, en somme, le scepticisme sur le marché mais sans susciter l'urgence dans la réaction de la part des partenaires engagés dans l'accord de réduction de la production entré en application au début de cette année. En effet, les coupes en vigueur actuellement ne suffiront pas à empêcher la surabondance. Une donne qui a commandé au Comité technique de la coalition Opep+ de prolonger les coupes actuelles jusqu'à fin 2020 et une coupure supplémentaire jusqu'à la fin du deuxième trimestre, en raison de l'épidémie de coronavirus. Malheureusement pour la coalition, l'incontournable allié qu'est la Russie prend tout son temps pour émettre son avis officiel sur ces coupes supplémentaires recommandées, la semaine dernière, par le Comité technique de l'Opep+. Des tergiversations de la part de l'allié russe qui font craindre ouvertement à des spécialistes que «le coronavirus marque la fin de la coopération Russie-Opep». Un avis largement répandu chez les analystes des agences spécialisées que tempère, toutefois, le président de la Conférence de l'Opep, le ministre algérien de l'Energie, Mohamed Arkab (voir article signé Nawal Imès). Celui-ci a, en effet, affirmé, jeudi à Alger, qu'une réflexion est toujours en cours concernant une réduction additionnelle, de février à juin 2020, de la production de pétrole par les Etats membres de l'Opep et non-Opep, signataires de l'accord de coopération, en précisant que «le volume des réductions n'est pas encore déterminé. Les consultations se poursuivent toujours avec tous les pays (Opep et non-Opep) et le volume des réductions additionnelles sera déterminé selon les capacités de chaque Etat». Une lenteur de réaction de la part du partenaire russe qui n'est pas faite pour rassurer le marché dont le risque d'un plongeon n'est pas écarté, malgré l'éclaircie de cette semaine. Azedine Maktour