Mustapha Berraf n'est plus président de l'instance olympique algérienne. Mercredi, soit 24 heures après avoir informé ses pairs du Bureau exécutif du COA qu'il abandonne ses charges à la présidence du Comité olympique pour des raisons personnelles, Berraf a mis fin aux spéculations (et aux espoirs des membres du CE/COA qui avaient rejeté sa démission), en confirmant que sa décision est «irréversible et irrévocable». Mustapha Berraf à la tête du COA, ce sont cinq mandats et dix-sept ans de règne. Presque sans partage tellement l'ancien basketteur et ex-président de la FABB, fédération qu'il a quittée en 2005 pour se consacrer totalement au COA, tenait l'instance olympique algérienne d'une main de fer. Ses opposants sont nombreux mais rares avaient le courage de l'affronter. L'on se rappelle du «folklore» qui entourait certaines assemblées électives où les candidats se retiraient avant même le début du scrutin. Dirigeant sportif et membre actif du RND, Mustapha Berraf a régné sur le COA depuis 1996 où il venait de succéder à Sid-Ali Lebib. Il n'ira pas au bout de son mandat suite à l'affaire Aswak Mitidja dont il était le DG. A sa sortie de prison, il reviendra sur la scène sportive et politique. En 2001, il reprend la présidence du COA pour deux mandats consécutifs (2001-2005 et 2005-2009) avant d'être remplacé par le Dr. Rachid Hanifi. En 2013, alors qu'il venait de boucler son double mandat comme député à l'APN, Berraf reprend la présidence du COA qu'il ne quittera qu'au soir du 26 février courant. C'est en résumé, la «carrière» de Mustapha Berraf au sein du COA durant laquelle il a eu nombre de démêlés avec des ministres du secteur de la jeunesse et des sports dont El-Hadi Ould-Ali ou encore Salim Bernaoui. Des querelles qui ont souvent pénalisé la préparation des sportifs d'élite ballottés entre le désir d'une tutelle d'imposer son «style» et d'un COA qui n'entendait pas «se laisser faire». Les dernières escarmouches du locataire du département du 1er-Mai ont fini par anéantir les positions de Berraf, déjà affaibli par un AVC contracté en 2017 mais surtout par le départ de ses soutiens politiques frappés de plein fouet par le mouvement populaire du 22 février 2019. Nombreux semblaient surpris par la décision de Berraf de se retirer des affaires du COA. Tous, la plupart en tout cas, avaient cette impression que le président de l'Acnoa ne pouvait aller au-delà des JO de Tokyo. Même Berraf annonçait à qui voulait le croire que ce mandat olympique 2017-2021 serait le dernier pour lui. La pression des pouvoirs publics a touché de plein fouet le bureau exécutif de l'instance olympique nationale. Des membres ont déclaré ouvertement leur désamour à la ligne de Berraf. Cinq d'entre eux seront écartés lors d'une AGEx tenue fin janvier au siège du COA. Ce sont Mustapha Boughadou (natation), Sofiane Zahi (gymnastique), Larbi Abdelaoui (haltérophilie), Nabil Saâdi (boxe) et Raouf Salim Bernaoui (escrime) exclus pour avoir «manœuvré» contre l'instance olympique. Une décision intervenue alors que l'un des membres écartés, Raouf Salim Bernaoui, venait juste d'être débarqué de son poste de ministre de la Jeunesse et des Sports. Cette situation impactera l'activité du Comité olympique qui s'affairait à récupérer le legs laissé par le MJS qui avait en charge la préparation des athlètes aux JO-2020 et celle des JM-2021 d'Oran. Les vraies causes d'une démission Deux rendez-vous auxquels le nouveau locataire du Palais d'El-Mouradia a consacré un intérêt particulier durant les premières réunions de son Conseil des ministres. Le nouveau ministre du secteur et le secrétaire d'Etat du sport d'élite, mais aussi des autres départements ministériels, ont été instruits de tout entreprendre pour réussir ces deux évènements. M. Sid-Ali Khaldi qui avait au préalable annoncé qu'il comptait s'appuyer sur l'expérience des responsables du COA pour assurer un maximum de réussite à ces deux «examens» va, cependant, prendre ses distances avec le patron du Comité olympique algérien. La montée en puissance de la contestation des fédérations, des athlètes, de même que nombre de personnalités sportives obligeront le nouveau ministre de la Jeunesse et des Sports à «apprécier» différemment la relation avec le COA de Mustapha Berraf. Et l'affaire de la posture du président de l'instance nationale olympique lors du Grand Slam de Paris de judo à l'intonation de l'hymne d'Israël semble avoir précipité l'embrasement. Sans vraiment signifier officiellement leur désapprobation devant pareil acte, les services du MJS instruits en haut lieu semblaient «gênés» d'autant plus que la toile a pris le soin d'amplifier le «délit». Mais à la première occasion, en l'occurrence l'audience accordée par M. Khaldi au président de la Fédération internationale d'aviron sans que le premier responsable de l'instance olympique soit associé, la position de la tutelle sonnera le glas à Mustapha Berraf. Celui-ci réunira illico presto les membres de son CE à qui il annoncera qu'il mettra fin à son mandat. La tentative des membres du bureau exécutif du Comité olympique algérien de convaincre Mustapha Berraf de rester sera vaine. L'annulation de la conférence de presse était un indice formel que la décision de Berraf de rendre les clés du COA n'était pas une motivation personnelle qu'il explique par l'atteinte à son honneur et celui de sa famille, mais pour des «raisons autres», des injonctions d'en haut que ni le ministre ni le désormais ex-président du COA ne pouvaient contester. La sortie publique «éclaire» de jeudi dernier du ministre de la Jeunesse et des Sports, au niveau de l'APN, et dans laquelle il affirmait que «la Palestine est une ligne rouge et que la nouvelle République repose sur le renouveau et l'alternance» pèse comme une charge dans un dossier entouré de beaucoup d'ombres. Démissionnaire du COA, Mustapha Berraf est également acculé au niveau de l'Acnoa où, là aussi, ses opposants se font plus «agressifs». La gestion du volet sponsoring des JA-2017 au Maroc ainsi que le cheminement des aides du CIO à la structure panafricaine sont autant de griefs devant lesquels Berraf doit donner des réponses. Sinon à rendre le tablier… M. B.