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SUR LES TRACES D�UNE PARTIE DU TERRITOIRE DE KATIBAT EL ARKAM DU GSPC Les villageois veulent tourner la page de la d�cennie noire sans oublier le lourd bilan
En d�pit des actes terroristes violents men�s sporadiquement contre les services de s�curit�, les habitants des zones montagneuses du centre de la wilaya de Boumerd�s s�accrochent � leur espoir que globalement, la situation s�curitaire tend vers l�am�lioration. Ce n�est pas les habituelles sources s�curitaires qui le disent. Nous avons sillonn� l�arri�re-pays du centre de la wilaya de Boumerd�s pour �couter les citoyens. Nous avons entam� notre p�riple � partir de la rive est d�Oued Isser, aux douars A�t L�hadj Lounis et celui d�Aghoud. Nous sommes pass�s par Tiza et Ath Ben Salah, � la lisi�re de la fameuse for�t de Djerrah dans la commune d�Ammal. Plus loin Toulmout et � A�t Khelifa, dans la commune d�A�t-Amrane, et jusqu�� Ath Boumerd�s au sud de Tidjelabine, en contournant Souk El Had et Tizi N�Ath Icha (Th�nia), nous avons sillonn� des chemins et fait des haltes dans des localit�s r�put�es dangereuses il n�y pas si longtemps. C��tait le territoire de la katibat El Arkam du GSPC avant son int�gration dans la n�buleuse de Qa�da Maghreb islamique � AQMI �. C��tait la phalange la plus dangereuse de la zone centrale de Boumerd�s. Elle avait, en effet, un lourd et sinistre bilan � son actif. Fort heureusement, les seriates qui la composaient sont en d�clin. Nous avons rencontr� des jeunes universitaires et des moins jeunes rest�s accroch�s � leur village, des ch�meurs en qu�te d�un hypoth�tique poste de travail. Des gens humbles, non crisp�s, hospitaliers et ouverts � la discussion sur tous les probl�mes de la r�gion. Ils r�p�tent inlassablement : �Alhamdoulillah, la situation s�curitaire s�est nettement am�lior�e, tout va bien sur ce point. Nous refusons que l�on consid�re nos villages comme des localit�s moins s�res.� Incontestablement ils veulent tourner la page de la d�cennie pass�e. Mais ils n�oublient pas les souffrances et les crimes commis au nom de la religion, laquelle ils sont attach�s, grands et petits. Leurs exigences sont d�ordre �conomique. Ils demandent, en outre, plus de consid�ration de la part des pouvoirs publics et des �lus. Des routes praticables, de v�ritables �coles pour leurs enfants et le transport vers ces �coles. Ils ont un potentiel agricole de montagne, l�olivier notamment, qu�ils peuvent exploiter pour peu que l�aide parvienne aux v�ritables fellahs. En clair, ils savent que les banques publiques implant�es dans la capitale du pays, � quelques dizaines de kilom�tres de leurs villages, regorgent de p�trodollars. Ils veulent leur part de ce tr�sor national. Sans plus. Volont� politique et moyens militaires !? Notre sentiment est que, incontestablement, les �l�ments du GSPC, particuli�rement la phalange la plus dangereuse de la r�gion centre de la wilaya, sont en perte de vitesse. Seulement, des questions taraudent les esprits des simples citoyens de Boumerd�s ou d�ailleurs. Ils ne comprennent pas pourquoi ils continuent � souffrir depuis deux d�cennies des affres du terrorisme. Ils se l�chent devant nous et nous posent des questions qu�ils ont peur de formuler devant les autorit�s. Ces interrogations sont d�une grande pertinence et r�v�lent par ailleurs des inqui�tudes : la victoire politique d�finitive sur les islamistes arm�s est-elle souhait�e par tous ? A-t-on mis par ailleurs les moyens militaires n�cessaires pour en finir avec les groupes arm�s ? Ne cherche-t-on pas seulement � juguler la violence des islamistes arm�s � un niveau acceptable pour en faire un moyen politique de pouvoir ? Ce qui est valable pour la wilaya de Boumerd�s l�est aussi pour la Haute Kabylie et l�ensemble du territoire national, o� le terrorisme poursuit ses exactions sur la population qui a compl�tement divorc� avec l�islamisme politique. C�est dans ce contexte opaque et trouble que les terroristes, qui font du mois de Ramadan une p�riode de violence meurtri�re, peuvent ressurgir particuli�rement au centre du territoire de la wilaya de Boumerd�s, dans la zone du nord de Th�nia et la commune de Zemmouri, ou de la for�t de Djerrah et frapper. C�est probablement � partir de cette for�t que sont sortis, il y a quelques semaines, les terroristes qui ont perp�tr� l�attentat kamikaze suivi d�une tentative d�assaut contre l�unit� de la Gendarmerie nationale stationn�e le long de la RN5 � l�entr�e ouest des gorges de Lakhdaria. Le groupe terroriste en question aurait, selon nos informations, exploit� une faille dans le dispositif de maillage de la r�gion pour parvenir jusqu�� leur objectif. Par ailleurs, des salafistes agissant � l�ombre de la r�conciliation nationale, entretiennent un climat de peur. Ils sapent l�impact de la victoire militaire sur les terroristes. De plus, les scandales financiers r�guli�rement rapport�s par les quotidiens nationaux, la mauvaise gestion des collectivit�s locales, la corruption, les passe-droits, la hogra et la marginalisation de la frange juv�nile maintiennent un foss� politique entre les institutions de l�Etat et les populations. Cela constitue malheureusement une formation gratuite pour les recruteurs des islamistes. La jeunesse en rupture avec le r�gime politique Accompagn� de Charef Mohamed, pr�sident de l�association culturelle Assirem (espoir) d�Ammal, nous avons commenc� notre p�riple par deux premi�res haltes aux douars A�t L�hadj Lounis et Aghoud sur la rive ouest de Oued Issers. Dans ces douars pauvres et isol�s, des jeunes universitaires redonnent espoir � ces localit�s. Et pour cause, ils s�impliquent dans la gestion collective des probl�mes et des perspectives de leurs villages �le pouvoir central ne nous int�resse plus puisque il n�y a aucun espoir de changement de quelque nature que ce soit. Par contre la gestion de notre collectivit� nous interpelle. Elle nous concerne directement�, dit Doudah Ali, 23 ans, �tudiant � l�INSP de Ben Aknoun. Ali, Fatah et les autres jeunes t�moignent que la majorit� qui pr�side aux affaires de la commune d�Ammal a marginalis� leur village � cause de leur vote, � 100%, disent-ils, en faveur de la liste communale du RCD. Ce qui n�est pas une situation qui les d�courage. Pour preuve, ils profitent de notre passage pour nous montrer l��tat de la route d�t�rior�e � plusieurs endroits pour la pose du r�seau d�assainissement pour un autre village, alors que le leur est exclu. �Les caniveaux n�ont jamais fonctionn�. Nous sommes priv�s de r�seau d�assainissement �, protestent-ils. Alors qu�ils ne sont qu�� quelques centaines de m�tres du versant ouest du barrage d�A�t-Amrane, l�eau potable ne leur parvient que deux fois par semaine. Ils reconnaissent que les pouvoirs publics ont fait des efforts dans le secteur de l�agriculture de montagne, notamment l�aide dans le domaine de l�apiculture, cependant, le d�veloppement rural est � faire dans la r�gion qui dispose de grandes potentialit�s. �Ici la jeunesse n�a rien � faire en mati�re d�activit�s culturelles ou sportives. Nous avons d�sign� aux responsables un endroit qui conviendrait � un terrain de sport. En vain.� Quant aux villageois de A�t L�hadj Lounis, ils sont compl�tement isol�s lorsque le barrage se remplit �l�eau coupe la route. Les enfants prennent des risques pour rejoindre leurs classes. Arriv�s au niveau de la RN5, ils sont expos�s aux accidents de la route. D�ailleurs une fillette a �t� fauch�e par un v�hicule � cause du manque du transport scolaire�, affirme Mohamed, 26 ans, dipl�m� en droit. Ce dernier nous signale que certains propri�taires, qui ont �t� expropri�s en 1989 pour la construction du barrage, n�ont, � ce jour, pas re�u leur d�. Qui prot�gera les jeunes des risques d�autres d�viations ? Arriv� dans la montagne du sud d�Ammal au niveau du village Tiza , localit� situ�e � la lisi�re de la fameuse for�t de Djerrah, sur les hauteurs des gorges de Lakhdaria, nous prenons la mesure de la d�tresse des jeunes. Dans le village, c�est le vide sur tous les plans. �Ici il n�y a rien � faire. Pas de travail, pas d�activit�. Le rythme de notre quotidien va de la mosqu�e � ce caf�. Nous ne disposons m�me pas d�un stade�, diront Mohamed et Rabah, 20 ans. Nous les avons rencontr�s au niveau d�un gourbi qui sert de caf� du village. �Aucun responsable ne s�int�resse � nous�, fulminent-ils contre les autorit�s. A la question sur d��ventuelles d�marches aupr�s des institutions charg�es de l�insertion des jeunes, ils affirment que cela ne sert � rien. Plus tard, le groupe a �t� rejoint par Youn�s, 15 ans, exclu du syst�me scolaire. La discussion tourne autour de plusieurs sujets. Le vide culturel dans les zones rurales est path�tique. En face de cette absence d�activit�s culturelles, de cette mis�re �conomique et de cette marginalisation par le pouvoir politique, il y a la for�t transform�e pendant des d�cennies en citadelle du GIA puis du GSPC, et o� probablement des �mirs se terrent toujours. A rappeler qu�en septembre 2005, les terroristes ont dress�, devant ce caf�, un faux barrage pour attendre l�ancien P/APC d�Ammal, feu Khelladi, qui habitait avec sa famille quelques kilom�tres plus loin, au village de A�t Ben Salah pratiquement � l�int�rieur de la for�t. Les terroristes ont froidement assassin� ce p�re de 12 enfants, aussi fils et neveu de chahids. Le martyr, qui avait perdu 7 membres de sa famille pendant la guerre de Lib�ration, a pr�f�r� rester dans son village, pr�s de ses �lecteurs. Le jour de son assassinat, la victime revenait d�un meeting qu�animait Ouyahia � Boumerd�s, appelant au vote en faveur de la Charte pour la paix et la r�conciliation nationale. Les autorit�s ont compl�tement oubli� ce martyr dont la na�vet� et la sinc�rit� �taient les armes pour g�rer une commune aux moult probl�mes. Un artisanat ancestral et des revenus �limin�s par les conteneurs made in China Nous quittons Tiza en direction de Toulmout dans la commune d�A�t Amrane. A hauteur de A�t Salah, le village de feu Khelladi, la vue est magnifique. Des milliers d�oliviers embellissent les flancs escarp�s de la montagne. Certains v�hicules sont immatricul�s dans la capitale. �Avec le prix que conna�t l�huile d�olive, certains font des efforts pour entretenir les arbres centenaires mais, apr�s l�abandon de plusieurs d�cennies pour des raisons s�curitaires, la for�t a fini par envahir des centaines d�hectares. Seule l�aide massive de l�Etat aux fellahs pourrait venir � bout de ce probl�me�, commente Charef. Malheureusement, des milliers d�oliviers sont absorb�s par la for�t envahissante de Djerrah. La r�gion est connue, en plus de sa production d�huile d�olive, pour ses nombreux ateliers de production de chaussures. Cette r�putation est s�culaire. Autrefois, les villageois de Toulmout avaient une solide r�putation de confectionneurs d�arkassen (chaussures, dans le langage amazigh, compos�es jadis de bandes de cuir de bovin serr�es avec des fines lani�res du m�me cuir). Avec le temps, les villageois se sont reconvertis dans la chaussure moderne. Les anciens, assis � la terrasse de la mosqu�e, sont la meilleure source d�informations sur cette activit� de production qui faisait travailler des centaines de villageois �Ce savoir-faire remonte � plusieurs g�n�rations, bien avant l�arriv�e des Turcs dans notre pays. Nos a�eux �coulaient leurs produits � Annaba, Gharda�a et d�autres grandes villes du territoire�, dit fi�rement Dda Hamoud, 79 ans. Luim�me a ferm� son atelier en 1996. �A cause de la politique du gouvernement qui laisse entrer les produits �trangers. Il y avait plus de 60 ateliers dans ce village. Chacun faisait travailler au moins 3 personnes. Maintenant il ne reste presque plus rien�, dit-il avant de fustiger l�administration des imp�ts qui le harc�le pour payer alors qu�il a bien cess�, selon lui, cette activit� et restitu� son registre du commerce. Avec ces sages, nous remontons un peu l�histoire de la r�gion. �De Toulmout � Th�nia, c�est la r�gion des Immesseratem N�Ath Icha, un peu plus loin c�est la contr�e de Kechna�, dira un vieux de 82 ans. D�o� l�appellation Tizi N�Ath Icha actuellement Th�nia (ex-M�nerville) et probablement celle de Khemis El Khechna, situ�e plus � l�ouest, dans l�est de la Mitidja. Nous quittons ces v�n�rables personnes pour aller nous ressourcer dans le sud de la commune de Tidjelabine, plus exactement � Thala N�Doukar source du figuier m�le) o� est implant�e la Zaouia Boumerdassi. C�est du nom de ce Saint qu�est tir� Boumerd�s attribu� � la petite agglom�ration du Rocher-Noir qui deviendra, en 1984, la commune et la wilaya de Boumerd�s.