L'affaire de la vente de carburant défectueux par une filiale de Sonatrach, qui fait scandale au Liban, fait réagir les autorités algériennes. Alors que le chef de l'Etat a demandé l'ouverture d'une enquête sur le dossier, Chakib Khelil a nié son implication dans le scandale, préférant s'attaquer à la presse algérienne au lieu de livrer sa version des faits. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - L'affaire concerne un contrat d'approvisionnement des centrales électriques libanaises en fuel par Sonatrach, signé en 2005 et renouvelable tous les trois ans. Le fuel livré est défectueux et le scandale a fait tomber plusieurs hauts responsables libanais, et le représentant de Sonatrach dans ce pays fait l'objet de poursuites judiciaires. Cette affaire qui risque d'éclabousser à nouveau Sonatrach, ébranlée par plusieurs scandales durant le règne chaotique de Bouteflika, a fait réagir les autorités algériennes. Le chef de l'Etat a demandé au ministre de la Justice d'ouvrir une enquête sur ce dossier, a annoncé, hier mercredi en conférence de presse le porte-parole de la présidence de la République. « Le président de la République a instruit le ministre de la justice d'ouvrir une enquête sur l'affaire de la vente de carburant au Liban », a affirmé Mohamed Saïd, ajoutant que cette affaire est « libano-libanaise, et l'Algérie en tant qu'Etat n'est pas du tout impliquée. S'il y a des personnes qui sont impliquées, la justice le déterminera », a-t-il précisé. Avec cette affaire, le nom de Chakib Khelil revient au-devant de la scène. Alors qu'il profite de son exil doré, refusant de répondre aux convocations de la justice algérienne dans le cadre des enquêtes sur les scandales Sonatrach, voilà que son nom est cité dans une affaire de corruption qui emballe la scène politique et médiatique du Liban depuis plusieurs jours. La députée libanaise Paula Yacoubian a révélé le contenu d'un «rapport confidentiel» sur la filiale offshore de Sonatrach, qui aurait servi «comme destination financière» à 15 personnalités algériennes, dont les noms ne sont pas dévoilés. La députée a évoqué le contrat de vente de fuel, signé en 2005, entre la filiale offshore de Sonatrach et le gouvernement libanais, après deux visites de Chakib Khelil, en compagnie de Farid Bedjaoui, à Beyrouth, en 2002 et 2003. Pour sa part, Chakib Khelil, ancien protégé des Bouteflika, s'est défendu dans un communiqué, niant son implication dans l'affaire et proclamant son innocence. Mais au lieu de livrer sa version des faits ou de répondre à la députée libanaise qui a cité son nom, l'ancien ministre de l'Energie a préféré s'attaquer à la presse nationale, accusée de tous ses maux et de vouloir souiller sa réputation à l'intérieur et à l'extérieur du pays. Mieux, Chakib Khelil menace de poursuivre ceux qui évoquent cette affaire en justice, en essayant d'amadouer le chef de l'Etat, Abdelmadjdid Tebboune, cherchant sans doute sa protection, comme celle que les Bouteflika lui ont garantie pendant de longues années, allant jusqu'à l'extirper des griffes de la justice et entreprendre une opération de son blanchiment dans les zaouïas. Demandé par la justice algérienne, dans le cadre de la réouverture des dossiers Sonatrach, Chakib Khelil refuse, en effet, de répondre aux convocations et de se présenter devant les juges. A cause de cette affaire dans laquelle le représentant de Sonatrach est poursuivi, une vingtaine de personnes ont été arrêtées et deux ex-ministres libanais de l'Energie ont été entendus. La directrice générale du ministère de l'Energie libanais, Aurore Feghali, et la directrice des laboratoires centraux, Khadija Noureddine, poursuivies pour « falsification de rapports pour permettre le déchargement de fuel frelaté par deux sociétés pétrolières, ZR Group et Sonatrach, vendu à la société Electricité du Liban (EDL)» ont été incarcérées. « 21 personnes seraient actuellement inculpées dans le cadre de cette affaire, dont 2 directeurs généraux de l'administration libanaise ainsi que des employés de ZR Group et le représentant local de la compagnie pétrolière algérienne Sonatrach. Ils sont accusés de détournement de fonds publics», a rapporté la presse libanaise. Réagissant à cette affaire, Sonatrach avait démenti l'arrestation d'un de ses dirigeants au Liban, expliquant que le différend existant entre sa filiale Sonatrach Petroleum Corporation (SPC) concerne un défaut de qualité sur une des dernières cargaisons de fioul livrée à l'établissement public à caractère industriel et commercial Electricité du Liban (EDL). K. A.