Vrais faux mendiants, une nouvelle race �d�imposteurs � est en train de se propager � vitesse grand V dans nos villes. Tombant dans le pi�ge du gain facile, des �nergum�nes de tout acabit n�h�sitent pas � user de tous les stratag�mes pour pousser les �mes charitables � mettre la main � la poche. Exigeants, ils m�prisent la petite monnaie, jusqu�� montrer les crocs lorsqu�elle n�est pas � la hauteur de leur attente. Munis d�une fausse ordonnance m�dicale pour certains, ou trimballant un nourrisson, pour d�autres, ils arpentent ruelles et venelles, pleurant mis�re � chaque passant. Parfois, ces pseudo-mendiants, une fois l�escarcelle bien pleine, s�engouffrent dans un bar pour noyer cette manne providentielle tomb�e du ciel dans quelques bouteilles d�alcool, avant de se remettre � l�ouvrage, sit�t les vapeurs �thyliques disparues. T�as pas cent balles ? Ils sont jeunes, quelquefois bien sap�s, et ils n�ont pas froid aux yeux. Effront�s, ils vous abordent avec un aplomb d�concertant en qu�mandant �a�tili �chra�laf !� (donne-moi 100 dinars). �Je revenais du march�, charg�e comme une mule, raconte une dame, lorsqu�un jeune homme m�a apostroph�e comme si on avait gard� les vaches ensemble. Il a m�me eu le culot de fixer �le prix�, Monsieur ne voulait pas moins de 100 DA ! J��tais horrifi�e ! Je l�ai regard� de plus pr�s, il n�avait pas du tout l�air d��tre dans le besoin. Bien habill�, assez propre, taill� comme une armoire � glace, j�ai pens� que pour oser soutirer de l�argent aux braves gens, avec autant de cran, cet �nergum�ne m�riterait qu�on le remette � sa place. Et c�est � ce moment que je me suis surprise � lui crier dessus, en lui pr�cisant que si � mon �ge avanc�, je continuais encore � trimer dur pour gagner ma vie, ce n�est certainement pas pour lui payer ses cigarettes et autres... besoins ! Sans trop se d�monter, il a n�anmoins fil� � la traque d�autres bonnes poires.� N�accepte que les billets ! D�aucuns l�auront remarqu�, les mendiants de ce nouveau genre ne se contentent pas de la menue monnaie que vous leur tendez. Ils poussent l�effronterie jusqu'� exiger un petit billet. Et si par malheur vous vous contentez de leur jeter dans leur obole une petite pi�ce, vous en prendrez pour votre grade. M�contentement, m�pris et m�me insulte. �J�ai arr�t� de donner l�aum�ne le jour o� une pseudo-mendiante m�a carr�ment crach� � la figure�, nous r�v�le Amina (45 ans, enseignante au lyc�e). Fini le temps o� les mendiants b�nissaient et couvraient de louanges le passant venant de faire l�aum�ne. �Pour avoir dit �Allah innoub� � un jeune qui faisait la manche, j�ai eu droit � un chapelet de noms d�oiseaux�, t�moigne une jeune fille. �Si j��tais un homme, je lui aurais flanqu� une belle vol�e�, ajoute-t- elle, d�pit�e. Les vrais faux mendiants ont parfois la m�moire courte. Dans la rue, ils vous agrippent, la larme � l��il, vous balan�ant une histoire encore plus pitoyable que les Mis�rables de Victor Hugo. Une trag�die cousue de fil blanc. Le hic, c�est que la version n�est jamais la m�me. Nabila pouffe de rire en nous racontant une anecdote : �Pr�s de l�h�pital Mustapha se tenait une mendiante. Elle m�avait barr� la route me suppliant d��couter son histoire. Selon ses dires, le destin s��tait acharn� sur elle, en lui arrachant son mari, se retrouvant seule avec 5 enfants en bas �ge. Touch�e par son drame, je m�empressais de lui tendre les 200 DA qui me restaient dans le porte-monnaie et passais mon chemin pour rendre visite � un de mes proches, hospitalis�. A mon retour, en empruntant le chemin inverse, je retombe sur la m�me veuve �plor�e qui me chante une autre litanie. Cette fois-ci, j�avais affaire � une divorc�e avec un enfant handicap� � 100%. C�est l� o� j�ai r�alis� que le dindon de la farce, c��tait moi !� L�habit ne fait pas le moine Pour faire davantage piti�, les faux mendiants d�ploient des tr�sors d�imagination. Certaines femmes ont pouss� le bouchon jusqu'� utiliser le b�b� laiss� � leur garde par une voisine qui travaille. D�autres faux vagabonds n�h�sitent pas � battre le pav�, une fausse ordonnance � la main, en g�missant qu�ils sont � l�article de la mort. Dans ce registre, la palme d�or reviendrait certainement � cette �com�dienne � qui, sit�t l��poux parti travailler, rev�tait des chiffons pour descendre dans la rue et faire la mendicit�. Mal lui en prit. Son conjoint d�couvrit le pot aux roses un jour, en rentrant � la maison beaucoup plus t�t que pr�vu, alors qu�elle �tait encore en tenue de �travail�. Les voisins l�ont entendu hurler. La bastonnade qui s�en est suivie a mis un terme � toutes ses p�r�grinations. Salaire royal Un �commerce� qui peut rapporter gros si l�on en croit le t�moignage de ce g�rant d�une sup�rette � Alger, �Chaque soir, vers 20 h, un jeune professionnel de la manche me ram�ne la monnaie r�colt�e dans sa sacoche. A l�approche des f�tes, �a peut d�passer les 5 000 DA par jour !� � raison de cinq jours de travail par semaine, repos hebdomadaire oblige ! Voil�, l� de quoi faire rougir un cadre sup�rieur, en mati�re de salaire, net d�imp�t. SDF et digne ! Par ailleurs, le recours � la mendicit� n�est pas toujours justifi� par le gain facile, comme c�est le cas de ces pseudo-mendiants. Parfois, c�est l�ultime moyen de survie dont disposent les nombreux indigents qui peuplent nos rues et boulevards. Ceux-l�, on ne les voit presque plus, tellement ils ont fini par se confondre avec le d�cor. Ils n�interpellent personne, ils sont l� et n�attendent plus rien. Lors de notre vir�e en fin de journ�e dans le centre-ville de la capitale, les vrais faux mendiants regagnaient leur domicile. Mais ceux qui restaient l� avaient pour seul lieu de r�sidence, le trottoir. Et pour seule cuisine, les poubelles. A l�image de ce jeune homme, la trentaine, peut-�tre plus, sinon moins� presque sans �ge, avec des haillons, en guise d�habits, on a du mal � le situer dans le temps. Accroupi devant un sac de d�chets m�nagers, il se nourrissait directement avec les restes. Et ce qui �tait encore plus frappant, c�est la dignit� avec laquelle il r�coltait sa subsistance ! Et �a se passe en pleine rue Didouche-Mourad � Alger, en 2010 !