«Durant le confinement, nombreux parmi mes élèves ont fini par se rendre compte de la nécessité de jouer d'un instrument», nous confie le guitariste talentueux Yacine Bouha. Occuper son temps utilement et surtout à travers la musique en ces temps de stress et parfois de vide apporte une certaine zénitude. C'est à l'âge de 17 ans que Yacine Bouha, la trentaine, s'est pris d'une passion pour la guitare et a décidé de s'offrir son premier instrument. «Au tout début, j'ai commencé à me fasciner pour la guitare grâce à l'artiste Nassim Kouti qui sortait sa guitare et jouait avec les potes dans le quartier, c'était en 2006 à la cité Grand-Terre.» C'est alors qu'il entreprend de suivre des cours de guitare classique avec le virtuose de la guitare Malik Hannouche au niveau de l'IRFM (institut régional de formation musicale) où il suit une formation de 6 mois de guitare classique et un début de flamenco. «Malik Hannouche est une référence pour moi parce qu'il a réussi à ancrer la passion du flamenco en moi et surtout la méthodologie de travail. En 6 mois il m'a appris le solfège et développé ma technique à un point très avancé.» Sa passion pour le flamenco le mena tout naturellement à vouloir apprendre l'espagnol, ce qu'il fera au niveau de l'institut Cervantès. C'est alors qu'après avoir acquis toutes les bases de la guitare, Yacine Bouha commence peu à peu à devenir une référence à Oran et à se produire au niveau des instituts espagnol et français, mais aussi à chaque concert de flamenco, il assurait la première partie. Le jeune guitariste enchaîne les collaborations notamment avec Lenaig Letouze ; avec le groupe Nassim El Andalous, mais aussi avec l'artiste Lila Borsali et le guitariste de renom Yago Santos. «J'ai beaucoup aimé aussi la collaboration avec Mohamed Cherchal dans le cadre du projet en hommage à Abdelkader Alloula organisé au TRO en 2014, où j'ai assuré la partie musicale d'un tableau d'El Ajouad.» Fort de ses expériences et acquis, Yacine Bouha décide alors de transmettre son savoir-faire et sa passion à travers l'enseignement de la guitare. «La formation vient du besoin de créer une communauté flamenca à Oran, partout dans le monde il y a des aficionados du flamenco (des passionnés), au Maroc la communauté est impressionnante, à Oran à part quelques passionnés par-ci par-là, cette communauté n'existe pas malheureusement.» Au début, il commence à apprendre à ses amis le rythme (palmas, claquement des mains) pour qu'ils l'accompagnent lorsqu'il joue. S'en sont suivis des sollicitations de toutes parts afin qu'il leur apprenne non pas à claquer des mains mais à jouer eux aussi de la guitare. Les premiers cours ont commencé timidement chez lui avec de petits groupes d'adolescents et de quelques passionnés. C'est alors que le petit groupe s'est agrandi et il lui a fallu voir plus grand ; aujourd'hui, il enseigne dans plusieurs centres de musique. Rattrapés par «la situation de confinement en raison de la Covid-19», les cours ont été interrompus mais pas totalement puisqu'il a entamé une série de cours gratuits en ligne. «Pendant le confinement, je ne savais pas si les gens allaient y adhérer, mais j'ai lancé les cours gratuits en ligne pour l'expérimentation et j'ai fini par aimer cela. J'ai eu beaucoup de demandes par la suite et ce qui m'a surtout surpris c'est la demande de l'étranger.» Aujourd'hui encore, Yacine Bouha continue à enseigner la guitare avec des élèves en ligne, d'où il tire, dit-il, un avantage, celui de cibler les gens des autres wilayas, d'ailleurs, précise-t-il. «L'élève le plus avancé dans l'apprentissage est originaire de la wilaya de Sidi Bel-Abbès.» Avec le déconfinement partiel, les cours vont reprendre cette semaine, toutefois notre interlocuteur tient à préciser qu'au vu de la situation sanitaire critique, il exigera de ses élèves le port du masque et d'être munis de gel désinfectant. Pour les cours, il est question de pas plus de deux élèves par groupe. Le musicien précise que l'initiation à la guitare flamenco se fera une fois que l'élève aura acquis les bases rudimentaires de l'instrument, à savoir les arpèges, l'exécution des gammes chromatiques à l'aide de métronome, le jeu alterné index/majeur. Les cours de flamenco pour le niveau débutants comprendront les techniques : pulgar, alzapua et quelques rasgueados. Rythmique : les palos de la rumba, tientos, tango et sevillanas. Avec l'exécution des palmas accompagnant les palos cités. Des rêves, notre interlocuteur en a encore plein la tête mais celui auquel il tient par-dessus tout c'est celui de jouer en solo en assurant son propre récital de guitare. Ainsi, dit-il, il pourra jouer le répertoire des musiciens qui l'ont fait rêver à l'exemple de Paco de Lucio, Tomatito et bien d'autres encore. Amel Bentolba