Par zoubir zemzoum Dans les régimes régis par le parti unique et le modèle étatique de développement économique qui ont opté, après la mondialisation du capitalisme, pour le libéralisme et le système politique de démocratie représentative, tous les hommes politiques, dirigeants et opposants, indépendamment de leurs appartenances idéologiques, clament, par des incantations, leur assentiment à ce régime démocratique régissant les pays occidentaux. L'imitation grossière de ce modèle qu'ils tentent d'instaurer dans leurs pays s'est révélée, enfin de compte, difficile à concrétiser parce que son application se heurte aux différents obstacles d'ordres historique, politique, économique et culturel intrinsèques à des sociétés, sorties à peine de la colonisation et du sous-développement, qui ne peuvent digérer, en peu de temps, le substrat d'une doctrine dont la gestation a mis plusieurs siècles pour engendrer le projet qui a donné naissance au régime républicain qu'on leur recommande ou qu'on tente de leur imposer, aujourd'hui. Ils croient que l'affiliation de leur pays à la démocratie occidentale pourrait amarrer aisément leurs nations à l'attelage du monde développé, amorcer leur décollage économique et social et les hisser au rang des pays modernes. L'attrait de ce miroir aux alouettes les empêche, en réalité, de saisir et de comprendre les raisons des grandes mutations — politiques, économiques, sociales et culturelles —opérées dans le cours historique du système de démocratie occidentale, d'analyser, à présent, le contenant du discours développé par les représentants des mouvements de contestation et de revendication des sociétés occidentales et de comprendre, surtout, les raisons de la fronde de ces derniers contre ce même régime, contre ce même modèle de démocratie représentative. Aucune vision claire n'apparaît, en vérité, sur les choix fondamentaux inscrits dans le contenu et le contenant de leur discours. De quelle démocratie se réclament-ils ? Celle que les Etats-Unis et les Européens leur recommandent ? La finalité du printemps arabe promis par ces pays aux peuples de la région est assez édifiante pour s'y attarder. Celle prônée par les tenants du Bazar qui ont pris le pouvoir après la destitution des dictateurs régnants ? Celle souhaitée par le patronat industriel privé lié directement ou indirectement aux mafias de l'import- import constituées après la libération du commerce ordonnée par les nouveaux dirigeants, les oligarchies intronisées par les puissances occidentales sous la pression des multinationales ? Ou celle, enfin, que la société veut construire souverainement ? C'est dans le but d'ouvrir un large débat autour de cette problématique déterminante pour l'avenir de ces pays et leurs peuples que nous avons pris l'initiative de traiter ce thème sensible et complexe, en prenant la précaution, toutefois, de situer la réflexion sur la démocratie au niveau des principes originels caractérisant ce concept, suivant les étapes historiques qui ont marqué son évolution à travers sa traduction dans les différents régimes républicains connus de nous. Partant, la référence aux controverses d'hier suscitées par les discours de ses promoteurs et celles, d'aujourd'hui, générées par la mondialisation du capitalisme ultra libéral, s'impose : - pour réexaminer, tout d'abord, les conditions qui ont présidé à la définition première de la démocratie telle qu'elle a été codifiée et appliquée dans les pays qui se sont débarrassés des régimes monarchiques pour leur substituer le régime républicain. - pour comprendre, ensuite, le pourquoi du dualisme idéologique qu'elle a engendré et ses conséquences sur le développement des nations et l'évolution du monde, sur le devenir des peuples et de l'humanité. - pour estimer, enfin, à leur juste valeur, ses avancées mais aussi ses déviations, ses crises et ses limites. Les conclusions tirées de cette rétrospective nous renseigneraient davantage sur les finalités attendues de la mondialisation du capitalisme, de son régime politique, de son mode de développement économique, de son modèle social et sociétal découlant de cette démocratie issue de la Révolution de 1789. C'est là un immense champ d'investigation qui nécessite la contribution de philosophes, de politologues, d'économistes et autres historiens dont les compétences sont de nature à apporter les utiles éclairages, nécessaires à la conception et à la mise en œuvre d'un projet de société conforme aux aspirations légitimes du citoyen de ce XXIe siècle. Persuadé de l'ampleur de cette tâche, nous nous sommes donc limités, dans cette contribution au débat préconisé, à poser la problématique de la démocratie, en évitant de nous enfermer dans le carcan des dogmes. Ce choix délibéré nous incite à opter pour une approche prospective, différente de celle empruntée par les théoriciens qui, en Europe, surtout aux XVIIIe et XIXe siècles, avaient échafaudé, à partir du concept «démocratie», des doctrines antagonistes dont le moins que l'on puisse dire est qu'elles s'écartaient de l'idée première de la démocratie telle que le peuple l'imaginait au lendemain de sa révolution contre la monarchie, telle qu'il l'espérait après la conquête de sa souveraineté. Cette démarche nous conduit à poser, tout d'abord, la problématique de la souveraineté du peuple, les causes de sa confiscation par les classes sociales dominantes de l'époque, ainsi que la reproduction des idéologies de ces classes dans les textes fondamentaux à partir desquels ont été bâtis les systèmes rivaux de démocratie politique et de démocratie sociale, caractérisant les modèles de républiques qui ont régné sur l'humanité et le monde depuis plus de deux siècles. Le décryptage de ce cheminement historique nous aidera à mieux percevoir les explications logiques à la métamorphose et au déclin actuel de la démocratie. Au terme de cette rétrospective, le chemin d'investigation emprunté nous permettra de percevoir l'émergence d'un certain nombre d'énoncés sur la théorisation de la démocratie qui devrait caractériser la nouvelle république que la société d'aujourd'hui appelle de tous ses vœux, celle qui émanerait, inéluctablement, de la souveraineté unifiée du peuple. Cette introduction aux articles qui vont suivre se veut et ne peut être donc qu'une introduction au grand débat qu'il est pressant d'ouvrir sur ces problématiques-souveraineté, démocratie- à l'heure de la mondialisation du capitalisme ultra libéral qui préoccupe, de nos jours, toutes les sociétés et auxquelles le citoyen du monde prête, désormais, une attention accrue. Z. Z.