En pleine crise sanitaire et au moment où le personnel médical fait face à un afflux massif de malades au niveau des services dédiés au Covid-19, il subit des agressions verbales et physiques caractérisées de la part des patients ou de leurs accompagnateurs. Le phénomène n'est pas nouveau. Les différents ministres qui se sont succédé à la tête du département de la Santé avaient promis de sévir sans jamais concrétiser leurs promesses. Le ministère de la Justice a fini par réagir, avant-hier, instruisant les procureurs généraux de mettre systématiquement en garde à vue les agresseurs. Le Premier ministère annonce l'élaboration d'un texte de loi pour protéger le personnel soignant. Nawal Imés- Alger (Le Soir)- La pression sous laquelle exerce actuellement le personnel médical est double : elle est non seulement due à la gravité de la situation épidémiologique, mais également aux conditions d'exercice au sein des différentes structures mobilisées dans le cadre de la lutte contre le Covid-19. Depuis plusieurs semaines, le phénomène des agressions contre le personnel médical est venu leur compliquer un peu plus la tâche. Mardi, l'information faisant état de la fuite précipitée par le balcon de son bureau du directeur de l'hôpital Mohamed-Boudiaf de Bouira a choqué. Le gestionnaire, menacé par la famille d'un patient décédé, a préféré prendre le risque de se fracturer la jambe plutôt que de faire face à la furie des accompagnateurs. Il ne s'agit pas d'un simple fait divers. Le phénomène a pris au fil des années une grande ampleur. Selon le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique, en 2019, pas moins de 1 922 agressions physiques et 27 909 agressions verbales avaient été enregistrées. Les nombreux ministres qui se sont succédé à la tête du ministère de la Santé ont enregistré les nombreuses doléances du personnel de la santé en la matière et promis d'y apporter des solutions. Plusieurs pistes avaient été proposées, y compris l'association d'agents des forces de l'ordre dans la mission de sécurisation des pavillons d'urgence où les agressions sont les plus fréquentes. Force est de constater que des années plus tard, le phénomène a pris de l'ampleur. Il a poussé le ministère de la Justice à sortir de son silence. Dans une note adressée aux procureurs généraux, Belkacem Zeghmati donne des instructions en vue de procéder à l'arrestation «immédiate» des personnes qui se rendent responsables d'actes d'agression contre les personnels hospitaliers, de procéder à leur placement en garde à vue pour ensuite les déférer obligatoirement devant le procureur de la République. Le garde des Sceaux plaide en faveur de lourds réquisitoires à l'encontre des prévenants et de faire appel des décisions qui sont contraires à ces réquisitoires. Le jour même, le Premier ministère faisait savoir que le président de la République avait décidé de «consolider et de renforcer, par un texte de loi, le dispositif de protection de tout le personnel médical, paramédical et administratif, en sus de celle déjà consacrée par les lois». Il s'agit de mettre en place un «dispositif qui vise à prémunir le corps médical de toute agression ou violence, quelles qu'en soient sa forme, le moyen ou l'auteur, dans l'enceinte des hôpitaux et autres structures et établissements sanitaires à travers tout le territoire national, pendant l'exercice de leur noble mission au service de la nation». Le tribunal de Médéa a montré la voie, hier, en condamnant à une peine de deux années ferme d'emprisonnement les auteurs de l'agression dont avait été victime le personnel médical de la polyclinique de Draâ-Semmar. N. I.