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Le mirage de l'Eldorado
La désillusion des migrants clandestins algériens en Espagne
Publié dans Le Soir d'Algérie le 26 - 07 - 2020

Si partir répond toujours à un rêve, voire parfois à une nécessité, assez souvent, c'est une décision irréfléchie qui engage d'abord soi et son avenir, mais aussi sa famille à qui il faudra «rendre» des comptes et, tôt ou tard, faire les comptes de ce qui a été financièrement engagé pour rendre le départ possible et le retour presque impossible.
Les jeunes Algériens prennent le temps de décider et préparer le départ, en revanche, il est quasiment impossible d'imaginer à l'avance le parcours qu'ils vont devoir effectuer et les conditions qu'ils vont devoir rencontrer. Dans leur immense majorité, les candidats au départ n'ont jamais quitté jusqu'alors leur famille, leur ville ou leur village. Après la périlleuse traversée de la Méditerranée, les migrants clandestins déchantent en Espagne.
En fonction des aléas géopolitiques, les sans-papiers tous aimantés par cet Eldorado espagnol qu'ils fantasment et aperçoivent depuis les plages algériennes devient très vite un enfer. «D'infimes plages obsédantes derrière les vagues grises agitées : ce paysage tempétueux est l'une des frontières européennes les plus difficiles à franchir, trop de jeunes, hommes, femmes et enfants y ont laissé la vie», souligne-t-on.
Les exilés tentent de passer cette lisière avec l'aide des cellules de passeurs souvent des bandes de délinquants implantées sur le littoral. En Espagne, pensent-ils séduits, leur asile sera accepté, ils trouveront du travail, ou encore ils ne seront pas expulsés vers l'Algérie.
Depuis le début de l'année en cours et avec le confinement provoqué par la crise sanitaire, l'immigration clandestine en Espagne a diminué (-31,7%) par rapport à 2019. Mais, pour la première fois, les sans-papiers algériens sont plus nombreux que les Marocains avec, respectivement, 1 699 clandestins contre 984, entre le 1er janvier et le 19 mai, selon les statistiques non publiques du ministère de l'Intérieur espagnol.
Une fois la Méditerranée franchie, les migrants se retrouvent dans les centres ou avec un peu de chance s'évanouissent dans la nature, s'expriment peu, par crainte d'être ennuyés par les autorités. Ils tentent de se construire une vie dans l'anonymat.
Le soi-disant Eldorado ne comble pas toujours leurs attentes. La faim, la misère et la mendicité les attendent de pied ferme.
L ́Association «Casbah Argelia» seul réconfort
L'Association «Casbah Argelia», Casbah Algérie, dont le président est M. Mourad Hadj Zoubir et également celui du Conseil national des associations algériennes en Espagne (CNAE), joue le rôle de parrain pour la plupart d'entre eux grâce à son association, ainsi qu'à la CNAE, une sorte de fédération qui réunit plusieurs associations de la communauté algérienne dans ce pays et qui a pour objectifs, entre autres, la représentation des immigrés algériens auprès de la représentation diplomatique, les autorités locales, l'aide aux familles algériennes, notamment l'organisation d'évènements, des actions sociales et de solidarité, au bénéfice de la communauté.
Prendre en charge les doléances de ces jeunes et essayer d'apporter quelque réconfort est devenu au fil des années une mission principale, notamment à l'approche des événements comme l'Aïd. Selon M. Mourad Hadj Zoubir : «Pour l'Aïd el-Adha, nous avons invité les membres de notre association et des familles d'Algériens vivant dans la région à faire don d'un tiers du mouton du sacrifice de l'Aïd au profit des jeunes migrants se trouvant dans le centre de transit.
C'est une tradition de notre Prophète et une action de solidarité envers ces jeunes compatriotes qui se trouvent dans la nécessité», a-t-il annoncé. Et d'ajouter : «C'est une opportunité pour procurer un peu de chaleur humaine à nos enfants qui se trouvent loin de leurs foyers et de leurs familles en ce moment de crise.»
Mourad Hadj Zoubir est un habitué des lieux, en l'occurrence, les centres de transit des jeunes migrants qui arrivent en Espagne clandestinement. Il est traducteur officiel auprès des tribunaux espagnols et des services de sécurité. Après ses horaires de travail, il dédie son temps à visiter les centres où se trouvent hébergés les jeunes Algériens afin de les aider à régler leur situation administrative ou leur apporter l'assistance nécessaire pour améliorer leurs conditions de vie.
En ce sens, il décrit en ces mots l'état d'esprit de ces jeunes : «C'est réellement un drame que vivent nos jeunes compatriotes. Ils ont été doublement trahis. D'abord par leur propre rêve, innocent, évidemment. Mais surtout par les trafiquants qui leur font miroiter un avenir meilleur en Europe. Nos jeunes sont des victimes d'une croyance généralisée en Algérie que l'on vit mieux au-delà de la Méditerranée.» Et de poursuivre : «Quand ils découvrent la dure réalité et les rêves s'évaporent, il est déjà trop tard. Et bien souvent, ils se sentent coincés, ils ne veulent pas revenir au pays pour ne pas être la risée de leurs proches et amis.»
Les migrants à la merci à Murcie
Murcie (Murcia en espagnol) est une commune du sud de l'Espagne qui compte un nombre important de migrants, selon le président de l'Association «Casbah Argelia» qui décrit la détresse dans laquelle vivent nos jeunes sans argent, sans travail. Ayant la faim et la soif comme compagnons de fortune, «les migrants, eux, n'ont pas le goût à la détente», dira-t-il. «Difficile de trouver un travail au noir, si tu n'as pas de papier, tu es un indésirable, un moins que rien.
Tu n'existes pas», raconte-t-il par la bouche d'un jeune migrant qui erre dans les rues de cette ville depuis bientôt un an. Selon lui, ces jeunes continueront à errer, anonymes et sans futur, car leur rêve s'est évaporé dès qu'ils ont mis le pied sur la plage de Cartagena où la «Patéra», cette embarcation de fortune, a échoué dans une plage à 10 kilomètres à l'ouest de la ville.
Revenir au pays ? «Je ne peux pas perdre la face vis-à-vis de ma famille, mes amis restés au pays. Je ne pourrai pas supporter leur regard, sachant qu'ils m'ont aidé financièrement pour entreprendre la harga. Ils auront fait tout ça pour rien. Non, je ne peux pas affronter cette honte. En fait, l'Espagne n'a été qu'un mensonge pour moi. On m'a trompé», lui confia Amine d'Alger, qui malgré la mésaventure continue à nourrir un espoir qu'« Allah, le Grand, un jour, il aura pitié de nous et une opportunité se présentera».
Arrivé en Espagne en mars 2019, en plein Hirak algérien, les passeurs leur ont miroité que «le gouvernement espagnol allait légaliser tous les clandestins. En plus, il donnera des aides financières aux migrants à hauteur de 800 euros». «Arrivé ici, Rien ! Nada ! Ni papier, ni aide, ni argent et rien à l'horizon», regrette Amine.
Selon un témoignage d'un jeune débarqué en plein confinement et recueilli par l'association, «trouver un job au noir ce n'est plus facile en Espagne, les patrons des sociétés ou les agriculteurs ont trop peur de se faire prendre par les autorités. Ils se prennent de grosses amendes. La loi a été durcie ». Pour le président de l'association, «c'est comme un cercle vicieux sans fin. L'Espagne a d'énormes problèmes à cause de la pandémie qui a détruit le tissu productif de ce pays. Le chômage a augmenté de près d'un million de nouveaux chômeurs et le taux frôle les 15%. Le gouvernement tente d'aider ses propres concitoyens en allouant des aides aux familles nécessiteuses, mais pas aux migrants sans papiers ». Il ajoutera : «Quant aux légalisations en masse, promises par un parti politique de gauche, il ne faut pas rêver. C'est impossible. Et ce n'est pas dans l'agenda politique du gouvernement actuel. Ne trompons pas nos jeunes, l'Europe ne permet plus des actions isolées des pays qui la composent.»
Alicante, une bonne localité pour recommencer une nouvelle vie ?
Ce n'est pas toujours facile. Certains s'en sortent mais après plusieurs années de calvaire, de course-poursuites avec la police, de nuits sous les ponts et de longues queues devant les portes des églises pour se nourrir. Selon les explications de M. Hadj Zoubir : «En Espagne, effectivement, un migrant qui peut apporter la preuve qu'il a vécu dans ce pays pendant trois ans continus pourrait prétendre à une régularisation. Cependant, les écueils sont difficilement franchissables. Il faut présenter un précontrat de travail, un domicile fixe et un casier judiciaire vierge.
En plus d'une tonne de papiers». D'ailleurs, «aucun entrepreneur ne vous donnera un contrat de travail si vous n'êtes pas résident légal. Pire, encore, pendant cette crise du chômage qui dure depuis plus de douze ans, un poste de travail est très difficile à trouver pour les Espagnols, alors qu'en sera-t-il pour les migrants avec ou sans papiers ? Et le Covid-19 a compliqué encore plus les choses. Pour dire que c'est une mission impossible», affirme-t-il.
L'association en contact permanent et direct avec ces jeunes perdus dresse des profils de plusieurs d'entre eux comme celui qui chante en marchant sur les trottoirs peu fréquentés de la ville d'Alicante. Nabil, qui se sent plus prisonnier de son destin que dans son pays . Le port, jamais loin, le hante toujours.
Car c'est de là qu'il vient régulièrement «sentir l'odeur du pays», quand les Algériens débarquent en masse entassés dans des voitures commerciales ou de luxe pour faire des achats de produits d'habillement et autres produits cosmétiques, ou tout simplement passer des vacances à Benidorm. Alicante est l'escale de son parcours qui l'a le plus «choqué».
Car pendant ces huit longues années, il a vécu comme un fantôme. Un sans-papiers, un sans-abri, un mort-vivant. Son itinéraire se dessine comme une longue ligne droite, monotone, vide et sans aucun sens dans la vie. Des milliers d'autres migrants l'ont fait avant lui, cela ne lui donne aucun espoir. Il se doit de décider. Non ! Plutôt se résigner à rentrer chez lui. Qu'importe ce que penseront de lui les amis du quartier, ou sa famille.
Autant de destins croisés, de vies gâchées, d'existences perdues et une jeunesse égrenée sans espoir. C'est le lot de milliers de jeunes Algériens qui ont choisi l'exil dans des embarcations peu sûres.
Si ce n'est pas la mort qui les emportera dans les flots de cette mer devenue un cimetière sans épitaphe, la vie en exil, avec un avenir incertain, creusera la tombe de tous leurs espoirs. Et le rêve à jamais enterré en même temps que toutes leurs illusions.
Ilhem Tir


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