Le procès des frères Kouninef, Réda, Abdelkader-Karim et Tarek ouvert mercredi dernier s'est poursuivi, hier au tribunal de Sidi M'hamed, avec l'audition des personnes morales, des témoins et du représentant du Trésor public. En fin de journée, le procureur a requis de lourdes peines contre les principaux accusés, allant de 15 à 20 ans de prison ferme. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - À partir du box des accusés, les frères Kouninef, entourés des gendarmes, poursuivis pour plusieurs chefs d'inculpation liés à la corruption, suivaient avec attention le déroulement des auditions. Leur proximité avec le régime de Bouteflika démantelé par le mouvement de 22 février, qui leur avait permis de constituer une énorme fortune, leur a valu des poursuites pour «trafic d'influence», «blanchiment d'argent», «obtention d'indus avantages», «détournement de foncier et de concessions», et «non-respect des engagements contractuels dans la réalisation de projets publics» en plus du «financement occulte de partis politiques». La journée d'hier était consacrée à l'audition des personnes morales au nombre de 41, selon l'avocat de Karim et Abdelkader Kouninef, Smaïn Chamma, dont plusieurs ont été représentées par la même personne, des témoins et du représentant du Trésor public. Les représentants des personnes morales (les filiales du groupe KouGC appartenant aux frères Kouninef) ont nié leur implication dans les affaires de corruption se contentant de réponses évasives pour dégager toute responsabilité dans les scandales du groupe. Ainsi, l'un de ces représentants a affirmé qu'il a rejoint le groupe en 2019 et qu'à l'époque, tous les marchés étaient déjà signés. Il a ajouté n'avoir aucune information sur les marchés octroyés au groupe ni sur les parcelles de terrains qui lui sont accordées, ni sur le prêt de 130 milliards de centimes. Interrogé par la juge sur les avantages dont la société a bénéficié auprès de l'ANDI, le représentant de la société Sarl Trax qui active dans le secteur des travaux publics, a indiqué qu'il ne sait rien, encore moins en ce qui concerne un prêt de 92 milliards de centimes évoqué par la présidente. «La société paie-t-elle les employés ?», interroge la juge. «La société était ouverte mais sans aucune activité», a répondu son représentant. La juge appelle le représentant de la filiale Mobilink qui explique qu'il n'y avait aucune activité économique au sein de la société, ajoutant qu'il ne sait même pas à qui elle appartient parmi les frères Kouninef. Il ne sait rien non plus en ce qui concerne un prêt de 166 milliards de centimes et du foncier qui lui avait été accordé. Idem pour la Sarl Général Maghrébine Construction qui a affirmé n'avoir aucun lien avec la société. Le représentant de la SARL Continentale 2000 a indiqué, pour sa part, qu'il ignorait sa mission juridique au sein de la société «car je n'ai jamais travaillé pour elle». Appelé à la barre, le représentant de la société Hydro Construction Company a déclaré que cette société n'avait aucune activité économique alors que le représentant d'une autre filiale a soutenu n'avoir aucun lien avec elle. Dans des déclarations aux journalistes, l'avocat de Karim et Abdelkader Kouninef, Me Smaïn Chamma, a indiqué que «les procédures d'audition des personnes morales ont été bafouées», ajoutant que «des sociétés qui n'ont jamais existé ont été convoquées». Et de s'étonner du fait que les partenaires étrangers du groupe KouGC n'ont pas été concernés par le procès. Après les personnes morales, la juge interpelle Abdelkader Kouninef à propos de deux appartements qu'il détient à l'étranger. L'accusé confirme. Puis elle appelle Chikhaoui Mohamed, ancien cadre de Sonelgaz, à la barre en tant que témoin. Ce dernier a relevé la gabegie dans le secteur, citant quelques projets remportés par les Kouninef «suite à des appels d'offres» mais qui ont bénéficié par la suite de rallonges budgétaires «injustifiées» à coup de centaines de millions de dinars. Le témoin a évoqué, en outre, les retards dans la réalisation des projets. Il cite un projet de réalisation d'une ligne de haute tension entre Bouira et El-Kseur à Béjaïa qui a bénéficié d'une rallonge de 140 millions de DA et d'une autre ligne à Jijel à qui une rallonge de 135 millions de DA a été accordée et une autre rallonge de 35 millions de DA réservée à une société de sécurité alors que le chantier a été sécurisé par...l'ANP. La présidente lève la séance à 13h30mn. À la reprise, la parole a été donnée au représentant du Trésor public, avant que le procureur de la République ne prononce son lourd réquisitoire contre les prévenus en fin de journée. Ainsi, une peine de 18 ans de prison est requise contre le principal accusé Réda Kouninef, assortie d'une amende de 8 millions de dinars ainsi que la confiscation de tous ses biens l'intérieur et à l'extérieur de pays. Une peine de 15 ans de prison, une amende de 8 millions de dinars ainsi que le confiscation de tous les biens à l'intérieur et à l'extérieur de pays est requise à l'encontre de Abdelkader-Karim Kouninef alors qu'une peine de 15 ans de prison et une amende de 8 millions de dinars est requise contre Tarek Kouninef. La plus lourde peine est requise contre Souad-Nour, en fuite à l'étranger, à savoir 20 ans de prison ainsi qu'une amende de 8 millions de dinars. Le procès s'est poursuivi avec les plaidoiries des avocats de la défense. K. A.