La tendance baissière des cas de Covid-19, même si elle se confirme, ne pousse pas les acteurs du secteur de la santé à un optimisme démesuré. La bataille, disent-ils, est loin d'être encore gagnée. Et pour cause, de grands défis attendent encore l'Algérie : la rentrée scolaire, la reprise du transport entre les wilayas mais également la réouverture des frontières constitueront de véritables tests. Nawal Imès - Alger (Le Soir) - Le bilan quotidien des contaminations au Covid-19 fait état d'une diminution régulière du nombre de personnes testées positives. Il n'en fallait pas plus pour que la panique des premières semaines cède la place à non seulement un discours officiel des plus rassurants mais également à une baisse quasi généralisée de la vigilance au sein de la population. Une grosse erreur, affirment les acteurs du secteur de la santé pour qui la bataille du Covid-19 n'est pas encore gagnée. Le Pr Salim Nafti, pneumo-phtisiologue, estime qu'il est encore « trop tôt pour se prononcer » en raison, dit-il, de la circulation du virus qui reste toujours actif mais également des contaminations et du nombre de personnes asymptomatiques qui continuent de circuler. « On peut penser que 200 cas ce n'est pas beaucoup mais ce qu'il nous faut connaître c'est l'incidence et la prévalence du Covid-19 en Algérie qui ne peuvent être connus que grâce aux études épidémiologiques. En l'absence de ces dernières, j'ai beaucoup de doutes au sujet des bilans avancés », dit-il. Pour le Pr Nafti, le virus est loin d'être parti, lui faisant dire que « ce que racontent nos responsables et nos amis du Conseil scientifique c'est peut-être de l'optimisme mais la victoire n'est pas pour demain. L'OMS le dit bien : il faut absolument apprendre à vivre avec et la décrue ne doit pas justifier la baisse de la garde ». Ancien chef de service de la clinique des maladies respiratoires au sein du CHU Mustapha, il fait le parallèle avec la lutte contre la tuberculose, rappelant qu'il aura fallu 40 ans pour la circonscrire et estimant qu'il s'agit d'une expérience dont il faut s'inspirer. Il faut, dit-il, « avoir le souffle long. C'est un marathon et pas un 100 mètres », ajoutant que « crier victoire actuellement, c'est une utopie et une hérésie qui va induire en erreur la population ». Un point de vue partagé par le Dr Mohamed Yousfi, chef du service épidémiologique à l'EPH de Boufarik. Pour lui, il est « trop précoce » de se prononcer ni encore moins crier victoire, expliquant qu'il « est vrai que nous sommes dans une courbe descendante. C'est une réalité qu'on ne peut pas nier mais il faut savoir que dans plusieurs wilayas comme celle de Blida, la prévalence par rapport à la population reste élevée. On est sur la bonne voie mais la vigilance reste de mise ». Il s'agit pour le Dr Yousfi d'un « acquis fragile » qui, dit-il , reste « lié à nos habitudes et aux précautions à prendre pour vivre avec le virus ». Un acquis qui sera mis à rude épreuve en raison des défis qui attendent le pays à l'instar de la rentrée scolaire, universitaire mais également la reprise du transport interwilayas qu'il soit aérien ou terrestre. C'est à ce moment, ajoute le Dr Yousfi, « qu'on pourra tester nos capacités de réaction sans oublier l'ouverture des frontières extérieures qui nécessite des mesures encore plus spécifiques à appliquer et un protocole sanitaire strict ». Il s'agira à ce moment de tester les capacités de riposte du système de santé mais pas uniquement puisque la lutte contre la propagation du coronavirus nécessite une intersectorialité pas toujours facile à mettre en place. N. I.