La vente concomitante qui a conduit le Maroc à rétablir des relations officielles avec Israël contre la reconnaissance des Etats-Unis d'Amérique de la légitimité du Maroc sur le Sahara Occidental continue de provoquer des réactions à travers le monde. Si la normalisation entre les deux Etats a été plutôt bien accueillie, la question de la «marocanité» du Sahara Occidental imposée par Donald Trump n'a pas trouvé d'écho. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - Annoncées jeudi 10 décembre dans un «pack» de tweets publié par le Président américain sortant, les deux décisions sont intimement liées. La normalisation avec Israël est bien la contrepartie d'un deal entre Mohammed VI et Donald Trump qui a conduit ce dernier à signer une proclamation officielle reconnaissant la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental. Au niveau international, les réactions positives des Etats se concentrent sur le rétablissement des relations entre Rabat et Tel Aviv. Pour ce qui est de la question sahraouie, les réactions sont essentiellement pour un règlement de cette question dans le cadre de l'ONU. A commencer par le secrétaire général des Nations-Unies qui a réagi jeudi à cette annonce, par la voix de son porte-parole, en annonçant que la position d'Antonio Guterres reste «inchangée». «Il pense que la solution à cette question peut toujours être trouvée sur la base des résolutions du Conseil de sécurité», a précisé Stéphane Dujarric. De son côté, la Russie a condamné l'acte de proclamation signé par le Président sortant Donald Trump. «Ce que les Américains ont fait ici, c'est une décision unilatérale qui sort complètement du cadre du droit international. Cet acte ne respecte pas les décisions de la résolution du Conseil de sécurité des Nations-Unies, avec lesquelles les Américains eux-mêmes étaient d'accord», a déclaré vendredi 11 décembre le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov, cité par les agences de presse Ria Novosti et TASS. L'Espagne, ancienne puissance coloniale au Sahara Occidental, a également réagi en mettant en avant la nécessité de s'en tenir aux résolutions des Nations-Unies, tant pour le dossier sahraoui que pour celui de la Palestine. «Maintenant, il reste à résoudre le problème de la paix entre les Israéliens et les Palestiniens et il reste à résoudre la position sur le Sahara Occidental. Dans les deux cas, la position de l'Espagne est très claire : je respecte les résolutions des Nations-Unies pour trouver une voie de sortie sur ces deux sujets», a indiqué le ministre espagnol des Affaires étrangères Arancha Gonzalez. Paris, principal allié de Rabat qui n'a pourtant jamais reconnu la «marocanité» du Sahara Occidental, a maintenu sa position traditionnelle consistant à soutenir «le plan d'autonomie marocain». James Baker dénonce un «chantage absurde» Par ailleurs, plusieurs personnalités américaines ont dénoncé l'acte de proclamation de Donald Trump. Parmi eux James Inhofe, sénateur de l'Etat de l'Oklahoma, et président de la Commission de défense du Sénat. «L'annonce de la Maison-Blanche d'aujourd'hui alléguant la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental est choquante et profondément décevante. Je suis attristé que les droits du peuple du Sahara Occidental aient été troqués. Depuis que l'Assemblée générale de l'ONU a décidé en 1966 qu'un référendum d'autodétermination doit être tenu au Sahara Occidental, la communauté internationale a prôné une seule politique claire et définie, à savoir, le Sahara Occidental mérite un référendum d'autodétermination pour déterminer son propre avenir», a annoncé ce fervent soutien du peuple sahraoui que la presse marocaine accuse d'avoir ralenti la décision de Trump. L'ancien conseiller à la Sécurité nationale, John Bolton, a, lui aussi, condamné la proclamation du Président sortant. «Trump a tort d'abandonner trente ans de politique américaine sur le Sahara Occidental juste pour remporter une victoire rapide en politique étrangère.» Pour Bolton, «un accord israélo-marocain était possible sans abandonner l'engagement des Etats-Unis en faveur d'un référendum sahraoui sur l'avenir du Sahara Occidental, comme l'a déclaré à juste titre le sénateur James Inhofe». James Baker, ancien secrétaire d'Etat américain et ancien envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara Occidental, a rejeté ce qu'il considère être un «chantage absurde sur le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination». Lui également estime que Trump aurait pu conclure un «tel accord de normalisation entre Israël et le Maroc, comme ce fut le cas avec les Emirats arabes et Bahreïn». T. H.