Avec le mois de Ramadhan, tout un régime alimentaire est mis en place. Le corps bien portant devra jeûner près de 12 heures. Les traditions de consommation liées à ce mois béni font que le sucre, caché ou pas, occupe une place très importante. Attention aux excès ! Pour parodier une célèbre marque algérienne, qui a fait tout une campagne durant le mois de carême, il est de circonstance de reprendre ce slogan : «Peut-on passer un Ramadhan sans «gazouz» ? Ah, non !» Et c'est une réalité ! La consommation de ce type de produits explose durant les 30 prochains jours. Jus de fruits, eaux fruitées, boissons carbonatées, lactées de différentes marques garnissent les étals des grandes surfaces et de ce qui reste des épiciers de quartier. En plus de producteurs connus possédant leur signature en bonne place sur le marché national, de petits «fabricants» se lancent aussi, notamment pour la mise en sachet des «cherbets». L'occasion pour les producteurs occasionnels d'essayer de tirer profit de la fièvre acheteuse qui s'empare des consommateurs, dont bon nombre sont loin de se soucier de la qualité. Mois de piété où l'illégal bat son plein avec la montée en puissance de l'informel. «Franchement, je suis conscient que ce n'est pas de la bonne cherbet, et que le goût du citron est à peine détectable. C'est une boisson censée être à base de jus de citron, mais dont les intrants sont souvent d'origine douteuse. Mais je fais avec, je me dis c'est plus pour garnir la table que la laisser vide. Avec l'inflation du dinar, mon salaire ne pourrait pas tenir longtemps. Les premiers jours, je fais en sorte d'acheter les cherbets et autres boissons, puis j'arrête pendant quelques jours», explique Cherif, la quarantaine, cadre dans une entreprise publique. Souhila, mère au foyer, abonde dans le même sens : «Il y a eu la cherbet industrialisée qui est un peu plus chère. Nous l'avons essayé pendant quelques jours, mais je trouve que rien ne remplace une gazouza, que ce soit Coca-Cola ou Hamoud Boualem. Durant le mois de Ramadhan, c'est important d'avoir ce genre de breuvages. Cela permet une bonne digestion.» Eh oui, c'est l'idée fausse la plus répandue entourant ces types de liquides gazeux. La plupart pense que cela permet une digestion des plats généralement très gras consommés lors de l'iftar. Ils oublient qu'avant tout, il s'agit de sucre caché dont le corps n'a pas besoin et provoque encore plus la sensation de soif. Et la consommation de sucre ne s'arrête pas avec cette boisson mais s'accentue encore avec le plat l'ham lahlou «Viande sucrée». Et comme son nom l'indique, il y a énormément de sucre qui est cuit. Et cela n'est que la première partie de l'iftar, car ce qui va venir pour la soirée est le moins que l'on puisse dire très... sucré. Des friandises, encore et toujours La soirée ne peut débuter qu'avec un bon verre de thé à la menthe bien sucré ! C'est le rituel. Le moment de repos privilégié qui arrive après avoir lavé une tonne de vaisselle, et les heures passées en face de ses fourneaux. Les yeux fixés sur sa télévision à déguster son feuilleton ramadanesque, la famille se retrouve pour engloutir de petites... bombes glycémiques comme la zlabiya ou le kalb el-louze, sans compter les tartes. De toutes formes garnies d'une variété de fruits, la fraise étant classée à la première place ! «L'année dernière, avec le confinement et la fermeture de toutes les échoppes, beaucoup de personnes se sont essayées aux recettes du kalb el-louz et de la zlabyia. Inratables, elles ont été échangées entre les facebookers et les vidéos youtube et partagées des millions de fois. C'est dire combien c'est «vital» de les avoir sur la table durant le mois sacré», confie Nawel, enseignante. Et d'ajouter : «Je faisais partie d'un groupe sur facebook où les internautes ont partagé plein de secrets et d'astuces pour réussir ce genre de gâteaux. Franchement, c'est en les confectionnant que j'ai réalisé la quantité astronomique de sirop de sucre qui est utilisée. Mais cela n'est pas un obstacle, je continuerai à en acheter ou à en préparer.» Kalb el-louz est indétrônable ! «Même si l'on essaye durant cette période de faire attention, on ne peut se passer d'un succulent morceau . Il y a eu la volonté de le remplacer par quelques autres gâteaux comme baklawa ou samsa, mais chaque chose est à sa place», note Nouha, cadre dans une entreprise, qui poursuit : «Moi, j'essaye de faire des efforts pour ne pas consommer beaucoup de sucre, mais pour une part de cette friandise, je ne dis jamais non, et advienne que pourra ! Mon mari consomme beaucoup de gourmandises durant ces trente jours. Cela commence par la brioche fourrée au chocolat lors de la rupture du jeûne et il poursuit sur sa lancée avec des gâteaux de tous acabits, sans oublier bien entendu, les boissons gazeuses, jusqu'au s'hor. Il est convaincu qu'il ne peut faire autrement. Comme si cela faisait partie des règles du jeûne !» Flan, glace, mousse au chocolat... Et cela ne s'arrête plus aux traditionnels gâteaux. «Il y a les desserts. Je prépare régulièrement des flans, des mousses au chocolat, ou alors nous achetons des boîtes de crème glacée. Je trouve que c'est très rafraîchissant. En plus du fameux mojito, très tendance ces dernières années », relève pour sa part Mounia, la quarantaine, maman de trois enfants. « Ce genre de desserts, je les présente comme une récompense à mes enfants qui commencent à jeûner depuis peu. Ils sentent qu'ils ont bien grandi et cela les encourage à poursuivre leur jeûne.» Ainsi, comme dans pratiquement toutes les familles algériennes, l'erreur la plus souvent commise est celle qui consiste à consommer des produits sucrés hypercaloriques. Une idée préconçue et fausse veut que beaucoup pensent qu'en mangeant très sucré, ils disposent d'une énergie durable qui les aide à résister à la faim ! Sarah Raymouche