Coup de tonnerre au Maracana ! Lionel Messi a enfin remporté son premier titre avec l'Argentine en domptant le Brésil de Neymar en finale de la Copa América (1-0), mettant fin à une disette de 28 ans de son pays. La cinquième était la bonne : après quatre finales de tournois majeurs perdues avec l'Albiceleste (Mondial-2014, Copa America 2007, 2015 et 2016), le sextuple ballon d'or a enfin soulevé un trophée avec le maillot de son pays. Porté en triomphe par ses coéquipiers après le coup de sifflet final, Messi, 34 ans, termine meilleur buteur et passeur du tournoi (4 buts et 5 passes décisives). Mais le héros de la finale se nomme Angel Di Maria : le joueur du Paris SG a marqué le but de la victoire argentine d'un splendide lob après une ouverture lumineuse de Rodrigo De Paul, lui-aussi, excellent au Maracana. «On a tellement rêvé de ça, on s'est tellement battu», a déclaré Di Maria après le match. Neymar, lui, n'a pas su peser sur le match et a fondu en larmes après le coup de sifflet final, avant d'être réconforté par une accolade de Messi, son ancien coéquipier au FC Barcelone. A Buenos Aires et dans toute l'Argentine, la victoire de l'équipe nationale a été saluée par des pleurs et des cris de joie, après 28 ans de défaites pour l'Argentine. «Enfin, enfin !», a lancé le commentateur argentin de ce match, Juan Pablo Varsky, à l'unisson de millions d'Argentins, libérés par le coup de sifflet final de l'arbitre uruguayen Esteban Ostojich, et dont plusieurs milliers sont aussitôt sortis dans les rues pour fêter cette victoire. «C'est un titre énorme, tout particulièrement pour le peuple (...) Je crois qu'ils (les supporteurs) se sentent proches de cette équipe qui n'a jamais baissé les bras», a déclaré le sélectionneur argentin Lionel Scaloni. Pour le Brésil, on est loin du traumatisme du Maracanazo de 1950 face à l'Uruguay ou de l'humiliation du 7-1 infligé par l'Allemagne en demi-finale du Mondial-2014, mais cela reste une cruelle désillusion pour les tenants du titre, qui avaient triomphé lors des cinq autres éditions de la Copa jouées à domicile. Les hommes de Tite étaient invaincus en matchs officiels depuis le quart de finale de la Coupe du monde 2018 contre la Belgique (1-2). Ils avaient battu leurs grands rivaux argentins lors de leurs deux dernières confrontations en finale de Copa América (2004, 2007) et lors de la demi-finale de la dernière édition, en 2019. L'Argentine, qui ne remportait pas le moindre trophée depuis la Copa America de 1993, en Equateur, a rejoint l'Uruguay en tête du palmarès de la compétition, avec 15 trophées, maintenant les Brésiliens à distance (9). Pour ce match de gala, la mairie de Rio avait permis la présence de quelques milliers de supporters, avec une jauge de 10% au Maracana pour le point d'orgue d'une compétition dont tous les matchs précédents avaient été joués à huis clos en raison de la pandémie de Covid-19 qui a fait plus de 530 000 morts au Brésil. Venu spécialement à Rio pour la finale, le président de la Fifa Gianni Infantino était aussi de la fête. Tension palpable Le sélectionneur argentin Lionel Scaloni avait décidé d'aligner une équipe résolument offensive, avec Di Maria, remplaçant lors des trois derniers matchs, aux côtés de Messi et Lautaro Martinez en attaque. Comme tout «superclassico» entre les deux monstres sacrés du football sud-américain, la tension était palpable dès le coup d'envoi. La Seleçao a commencé à imposer un gros pressing, avec une agressivité vite sanctionnée par un carton jaune pour Fred dès la troisième minute de jeu. Neymar a aussi voulu marquer aussitôt son territoire, avec un coup du sombrero sur son ex-coéquipier du PSG Lo Celso au niveau de la ligne médiane (7e). Mais après un début de match haché, avec un grand nombre de fautes des deux côtés, l'éclair est venu de Di Maria. Bien lancé par De Paul sur la droite à limite du hors-jeu, l'ailier parisien a pris de vitesse Renan Lodi avant de tromper le gardien Ederson d'un lob de toute beauté (22e). Ce but a quelque peu assommé le Brésil et les vagues argentines ont continué à déferler, avec des frappes de Di Maria (28e) et Messi (30e). Tite a tenté le tout pour le tout en faisant rentrer un attaquant supplémentaire à la mi-temps, Firmino, à la place de Fred et la Seleçao a retrouvé de l'allant. Richarlison s'est vu refuser un but pour hors-jeu (52e) et a buté sur le gardien Martinez (53e) après une belle ouverture de Neymar dans la surface. Gabigol s'est créé deux occasions en fin de match (82e, 86e), mais l'Argentine a tenu bon pour triompher dans le temple du football brésilien. Il ne lui manque désormais que le trophée d'une Coupe du Monde Et Messi gagna enfin un gros trophée en sélection... Il a tout gagné en club, empilé les reconnaissances individuelles, il jongle avec les superlatifs mais son palmarès restait très maigre en sélection : Lionel Messi, en remportant samedi la Copa America, s'est adjugé la reconnaissance éternelle du peuple argentin, qui lui voue un culte. Malgré son incroyable talent, le sextuple Ballon d'or restait essentiellement un joueur du Barça, l'institution qui l'a attiré alors qu'il était à peine entré dans l'adolescence, et pour laquelle il joue encore. Dix titres de champion d'Espagne, quatre Ligues des champions, entre autres titres majeurs... le petit Argentin traité pour des problèmes de croissance à son arrivée en Catalogne a depuis marqué 672 buts et adressé 288 passes décisives pour les Blaugranas, selon le site du Barça. Mais le génie argentin semblait freiné dans son élan dès qu'il rejoignait sa sélection. Hormis sa médaille d'or aux JO de Pékin en 2008 avec les espoirs albicelestes, son parcours avec l'équipe nationale n'est émaillé que de déceptions, les dernières en date, une Copa America en 2019 et un Mondial en 2018 où il a été transparent, ne parvenant pas à peser sur le destin de son équipe. L'héritage de Diego Maradona, son éternel modèle, décédé l'an passé, a longtemps semblé trop lourd à porter. Car le Pibe del Oro fut lui déterminant pour offrir son deuxième titre mondial à l'Argentine en 1986. 76 buts en 151 sélections, mais aucun titre majeur. Une multitude de finales manquées (Mondial-2014, Copa America 2007, 2015 et 2016) et d'occasions perdues. Un stress visible dès qu'il revêtait le maillot ciel et blanc, le rendant parfois pataud, un comble. La frustration de tout un peuple, aussi fier de l'idole Messi qu'incapable d'expliquer son blocage en sélection, s'est toutefois envolée samedi dans la nuit de Rio de Janeiro. «Le rêve d'une vie» L'Argentine, en s'imposant sur la plus petite des marges (1-0) face au Brésil au Maracana, a remporté l'une des Copa America les plus décriées de cette compétition plus que centenaire, ternie par la pandémie de Covid-19 qui fait des ravages en Amérique latine. Les Albiceleste étaient toutefois extatiques, se précipitant vers Messi dès le coup de sifflet final, puis jubilant sur le podium carioca, alors que «la Pulga» brandissait la coupe tant attendue. Ce même Messi qui, à deux minutes de la fin du temps réglementaire, ratait son face-à-face avec le gardien brésilien Ederson, d'un crochet complètement raté. Alors que toute l'Argentine sortait dans les rues pour célébrer son (ses) héro(s), oubliant jusqu'à l'existence de gestes barrières, les Albiceleste semblaient ne penser qu'à lui. Ils entouraient leur numéro 10 hilare, les yeux comme des billes de loto, l'énorme trophée entre ses mains. Puis ils le portaient à bout de bras, le faisant sauter en l'air. Faire gagner Messi, «c'était mon rêve. C'est ce que je voulais le plus au monde», a résumé quelques minutes après le match Emiliano Martinez, le gardien argentin, déterminant en finale. «Nous l'avons donnée (la coupe) à Messi, celui qui le méritait le plus. Dans un Maracana qui était contre nous. (...) Donner le titre au meilleur du monde, c'est ce que je désirais le plus dans ma vie», a-t-il insisté. Le Leo national, du haut de ses 34 ans, a lui qualifié le moment de «folie». «Ce que je ressens est impossible à expliquer. Je suis parti plusieurs fois triste (de compétitions) et je savais ce qu'on allait dire de moi», a expliqué l'enfant de Rosario, né dans une famille désargentée. «Il fallait que je m'enlève l'épine du pied pour gagner avec la sélection. Cela a pris énormément d'années. Je savais qu'à un moment, ça finirait pas arriver», a ensuite raconté Messi. «Cela s'est finalement passé au Brésil, en gagnant contre le Brésil (l'ennemi sportif de l'Argentine, NDLR). Je suis chanceux», conclut celui qui «égale» donc au palmarès international son grand rival Cristiano Ronaldo, vainqueur de l'Euro-2016 avec le Portugal. Un détail qui n'en est pas un...