Fini le stress des rencontres de Championnat à niveaux variables et bonjour le suspense des matchs couperets. L'EN algérienne qui a franchi avec succès la phase des poules aura de nouveaux défis, d'autres challenges, autrement plus cruciaux qu'une qualification à un tour de barrages. Insoutenable suspense en ce mardi 16 novembre à Blida où les Verts de Djamel Belmadi faisaient face à plusieurs adversaires, en sus des Etalons du Burkina Faso arrivés la veille en Algérie avec pour seul objectif de s'imposer pour espérer décrocher l'unique billet de la poule A. Une mission que les joueurs de Kamou Malo ont failli conclure devant un ensemble algérien qui a évolué par intermittence. La peur au ventre, surtout. Un match-piège par excellence pour un champion d'Afrique qui avait pris l'habitude et le plaisir de marcher sur l'eau en ayant pas d'obligation d'obtenir un résultat précis pour sortir de l'engrenage. Les coéquipiers de Mahrez par trop crispés par cette «assurance» de pouvoir se contenter d'un nul pour passer l'écueil burkinabé ont manqué de sérénité et ont fait étalage de beaucoup de déchets dans leur football. Un manque de précision qui serait le résultat «naturel» de l'état de la pelouse grasse et lourde et qui empêcherait aux footballeurs dits «techniques» de s'exprimer correctement. Un raisonnement développé par Belmadi qui tient la route mais qui ne fait pas oublier au coach algérien qu'en face l'adversaire n'était pas composé de manchots. «Il y avait une opposition en face, il ne faut pas l'oublier. C'est une équipe burkinabè qui a de bons résultats. Elle progresse beaucoup. Si elle nous a tenus en échec, c'est surtout grâce à ses joueurs. Ils ont toujours été costauds, on se rappelle du match de 2013. Ils ont beaucoup de qualités individuelles et techniques.», dira le sélectionneur des Verts qui revient sur la difficulté de disputer une phase de groupes pour qu'en fin de compte le sort se joue sur le dernier match. «Sur un match, tu peux sortir en phases de groupe, tout le travail qui a été fait depuis 3 ans pouvait être réduit à néant», explique-t-il avant de rendre hommage à l'esprit des Burkinabés qui ont cru en leurs chances jusqu'au bout. «Ce pays n'a jamais eu la chance de jouer en Coupe du monde. On en a joué 4 et nous sommes champions d'Afrique donc ils n'avaient rien à perdre. On a fait un parcours quasi sans faute. Ça pèse malgré une bonne préparation psychologique», fait-il noter et de préciser que l'essentiel est fait pour son team. «L'objectif est atteint, il y a le résultat et la qualification, c'est le plus important, Al-Hamdoulillah», soupire Belmadi pour qui l'avenir commence demain. La CAN n'est pas un obstacle Libéré de ce premier challenge atteint, le groupe Algérie ne connaîtra pas de répit et doit se projeter sur son prochain objectif, celui de défendre son titre continental sur les terres du Cameroun, au tout début de l'année prochaine. Belmadi qui a «aimé» la difficulté d'un tour où les niveaux sont variables rappellera que : «Pour aller en Coupe du monde, il faut jouer différentes équipes, différents types de football. La crainte passe outre la qualité des joueurs, mais j'apprécie les prestations solides, difficiles comme celle-ci. Ce que les joueurs ont vécu ce soir nous aidera certainement lors des barrages et lors de la CAN également», assure le driver de la sélection algérienne déjà «chaud» pour lancer sa CAN. Une compétition où il ne compte pas se présenter pour faire de la simple figuration. «La CAN est une grosse compétition internationale. On veut garder notre titre même si ça ne sera pas évident, tout le monde nous attend. Mais on veut garder notre titre c'est sûr», confie Belmadi qui insiste sur la nécessité de préparer les échéances suivant leur survenance et non au vu de leur importance. «On aura peut-être les barrages de mars en tête mais on sera tous logés à la même enseigne. Après chacun a sa propre réflexion. On sera concentrés sur la CAN», répondra Belmadi quand il lui est demandé quelles seraient ses préférences à propos de l'adversaire approprié pour son équipe lors des barrages. Un challenge que le technicien algérien garde dans un coin de sa pensée. Lui qui avoue que la qualification au Mondial du Qatar est un «rêve» à réaliser. «La préférence ? Je n'en ai pas. Ça n'a pas d'influence sur le tirage. L'objectif sera la qualification quelque soit l'adversaire. On préparera bien la rencontre et on fera en sorte de se qualifier incha'Allah», tranche un Belmadi qui aura passé les trois mois les plus longs et les plus durs depuis son intronisation à la barre technique des Verts. Nouveaux challenges, de meilleures conditions En fait de sérénité qui a un petit peu fui les joueurs de la sélection, mardi contre le Burkina Faso, cette impression s'est également dégagée chez l'entraîneur national avant, pendant et après le dernier match de ce second tour de qualifications. Il n'est pas inutile de faire semblant de ne pas admettre que depuis l'arrivée d'une nouvelle équipe fédérale, Djamel Belmadi a multiplié les appels du pied et de détresse à ceux qui voulaient l'entendre et le croire surtout que la «transition» sera difficile si les conditions ne suivent pas. Et ces conditions de travail, mais pas seulement, Djamel Belmadi les a trouvées lamentables et les a dénoncées à chaque fois que l'occasion lui était offerte. La seule question de l'entretien de la pelouse du stade Mustapha-Tchaker a accaparé les débats depuis septembre dernier. Belmadi a même évoqué «un acte de sabotage» dont l'objectif est de freiner l'élan de la sélection nationale. Mais la seule «affaire Tchaker» n'est que l'arbre qui cache la forêt. Depuis l'intronisation de Charafeddine Amara à la présidence de la FAF, le courant ne passait pas vraiment bien entre le nouveau patron de la fédération et l'entraîneur national. Certes, peu d'informations ont fuité des discussions que les deux hommes ont eues en marge de la dernière virée de M. Amara à Doha, où la Fifa organisait la cérémonie du tirage au sort de la prochaine Coupe arabe des Nations. L'événement s'est déroulé une dizaine de jours après l'élection de l'ex-patron du CR Belouizdad à la présidence de la FAF en remplacement de Kheireddine Zetchi. Un Zetchi auquel Belmadi vouait beaucoup de respect pour le travail accompli en direction de la sélection et qu'il a «défendue» à sa manière en de nombreuses occasions. Un communiqué laconique ponctuait ce tête-à-tête qui se serait déroulé «dans une ambiance conviviale», selon les termes employés par le texte fédéral publié sur le site de la FAF. Il est précisé ensuite que : «Pendant cette rencontre, les deux hommes ont fait un large tour d'horizon sur les objectifs de la fédération et de l'équipe nationale A et ont fait le point sur plusieurs sujets d'actualité, notamment la préparation des deux matchs des éliminatoires de la Coupe du monde 2022 prévus début juin face à Djibouti et au Burkina Faso». Si, en effet, le stage du mois de juin sanctionné par trois matchs amicaux (Mauritanie et Mali à Blida et la Tunisie à Tunis), la suite des événements a été moins agréable. Un autre rendez-vous devait avoir lieu après le match contre les Aigles de Carthage avant qu'il ne soit remis en cause pour des questions de calendrier, avait-on expliqué alors. Dès le mois de septembre, Belmadi commençait à pester sur tout ce qui n'allait pas autour de l'équipe. Les médias ont bien tenté de prendre le pouls de cette relation Amara-Belmadi, peu d'éléments ont fuité. Un entretien en off d'un confrère de footafrique avec Belmadi fait ressortir un «petit malaise», l'entraîneur national qui semblait ironiser sur la relation, fera même rappeler la fable de Lafontaine sur le corbeau et le renard. Pour ensuite dire qu'elle était «au top, magnifique, au beau fixe, tout va bien, Hamdoullah». Une réplique qui laissait transparaître une certaine dissonance entre les discours et la réalité. L'ultime coup de froid entre les deux hommes est apparu au lendemain des déclarations du président de la FAF au sujet du renouvellement du contrat de Belmadi. Durant sa conférence de presse, ce dernier semblait «ravi» que l'on lui pose la question pour qu'il puisse répondre à son président qui estimait que «la prolongation de Belmadi est une question de cinq minutes». Renouvellement du contrat, ou les «5 minutes» de trop Une question (du journaliste celle-là, ndlr) qui a demandé un long plaidoyer de Belmadi. «Il y a le match de demain, puis la CAN, puis un éventuel barrage, ce n'est pas le moment de penser à mon futur. J'ai signé mon contrat en 5 minutes la première fois. Le président Amara a dit que ça s'arrangerait en 5 minutes, il s'en souvient», a-t-il d'abord fait savoir. Puis d'énoncer quelques unes de ses préoccupations auxquelles le président Amara doit trouver la parade. «Les détails du contrat ne seront pas un problème pour mon avenir. Moi, ce qui m'intéresse, c'est de savoir si je suis encore capable d'apporter plus, si j'ai la force et l'énergie de convaincre, d'aller plus haut. Le métier est usant. Dans le football, il y a des cycles, peut-être que les joueurs voudront entendre un autre discours, travailler autrement. On a encore le temps avant de penser à tout ça. Si je pars, il faudra recruter Pep Guardiola à ma place, mais il va falloir que le budget soit beau !», explique l'entraîneur des Verts dont le bail signé avec... Zetchi et sa fédération est valable jusqu'à décembre 2022. Ce «couplet» de la réponse de Belmadi renseigne bien sur le fossé qui sépare les deux responsables, du moins en ce qui concerne certains aspects d'un éventuel renouvellement du contrat. Le volet financier n'étant pas des moindres, Belmadi faisant référence au tarif d'un entraîneur de l'envergure de Guardiola, il est surtout question de certains écarts dans la compréhension de la chose liée au football, Belmadi en homme de terrain ne comprendrait pas que «son» président ne soit capable que de gérer une administration dans laquelle les services ont connu du mouvement ces derniers mois sans que la prestation ne s'améliore pour autant. Ce qui nous conduit à conclure, même hâtivement, que la communication entre les deux hommes doit être rétablie afin d'éviter ce que les Algériens, dans leur majorité, redoutent. Et puis quand Belmadi commence à penser à sa situation personnelle, en tant qu'être humain d'abord, sa sincérité est engagée. «Je revois des images de notre arrivée à la tête de l'EN... beaucoup de choses ont changé ! On a pris de l'âge, je ne veux pas encore aller à l'hospice !», pense celui qui lâche une dernière vérité quand un confrère lui demande s'il n'est pas possible de le voir suivre l'exemple de Joachim Low qui a dirigé la sélection d'Allemagne pendant 14 ans : «Mais c'est justement l'Allemagne ! Tout est carré là bas, il peut même y rester 35 ans s'il le veut.» Pas le moindre doute sur ses intentions... M. B.