La Pieuvre, le nouveau roman de Salima Mimoune, pourrait être considéré comme une suite, dans le temps et «le destin» de l'Algérie, de son premier roman, Les ombres et l'échappée belle, paru en 2011 chez L'Harmattan, en France. Avec La bal des mensonges (Enag, 2017), l pourrait aussi constituer une trilogie féministe, surtout dans le sens où la femme occupe une place de choix dans les trois œuvres. La Pieuvre, paru aux éditions Les Presses du Chelif, commence comme dans un de ces beaux films d'auteurs du cinéma américain, russe ou italien. Mais ce que vont vivre certains villageois ressemble plutôt à un film d'horreur. «Le décor est planté, dès les premières lignes. La scène, édifiante à plus d'un titre, sur laquelle s'ouvre ce troisième roman de Salima Mimoune nous donne la tonalité sur laquelle va se construire l'histoire de Yousra, son héroïne. Deux adolescents cachés dans une maison abandonnée assistent, impuissants et désespérés, à la destruction d'un arbre, un olivier, par des hommes surgis des ténèbres de l'ignorance, dont la furie n'a d'égale que leur haine de toute vie, de toute beauté, de toute forme d'amour», écrit Maïssa Bey, dans la préface de l'ouvrage. Le nouveau roman de Salima Mimoune est aussi une histoire d'amour juvénile liant Yousra, une jeune lycéenne enjouée et passionnée par ses études, à Yanis, un «jeune transplanté de France en Algérie pour répondre aux exigences paternelles», comme l'écrit l'auteure et chroniqueuse littéraire Jacqueline Brenot, en quatrième de couverture du livre. Au lycée, il y a aussi l'instituteur Bachir qui étonnait ses élèves par sa culture, sa générosité, sa modestie et son sens de l'humour. «Vous rêvez d'un monde meilleur ? N'oubliez jamais alors que la femme en est la pierre angulaire ! La femme n'est ni la moitié de l'homme, ni son sujet, ni son objet d'ailleurs», disait-il souvent à ses élèves. Il était pour eux (et pour elles) la fenêtre ouverte sur les pulsations du monde, «l'Amérique par le biais d'Angela Davis, Rosa Parks, Joan Baez, Martin Luther King, Cuba avec Che Guevara, la France de Jules Vallès, celle d'Aragon, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Jacques Prévert... le Chili avec Pablo Neruda et Victor Lidio Jara Martinez...». Tout ce vraiment beau monde sera rattrapé par «la fureur de la décennie noire» et «la tempête aveugle» qui emporte le village et les espoirs de Yanis et Yousra, comme l'écrit Jacqueline Brenot dans sa présentation. Ainsi «s'avance une ''pieuvre'' aux multiples tentacules qui tente de projeter son encre pour chasser la lumière», comme écrit encore Maïssa Bey. Mais comme avait écrit Salima Mimoune, «ce que semblaient ignorer les semeurs de haine dans leur élan dévastateur est que la nature comme l'amour, même blessés, triomphent de l'adversité et que les rosiers repoussent, même mutilés». Kader B. Roman La Pieuvre de Salima Mimoune. éditions Les Presses du Chelif. 149 pages. Année 2021.