Présidence de l'Algérie du Conseil de sécurité : défense des causes justes, efforts inlassables pour porter la voix de l'Afrique    Le groupe parlementaire d'amitié Algérie-Venezuela examine les moyens de renforcer la coopération avec l'Assemblée nationale vénézuélienne    29e édition du Prix du 1er Novembre 1954 : le ministère des Moudjahidine distingue les lauréats    Décès de l'ancien journaliste de l'APS Mohamed Bakir    Le ministre de la Santé se réunit avec le SNMGSP    Commission intergouvernementale mixte algéro-russe: signature de 9 accords et mémorandums d'entente dans plusieurs domaines    Championnat arabe de la course d'orientation: Alger abrite la 1e édition du 1er au 5 février    Football: Ahmed Kharchi seul candidat à la présidence de la LNFA    Foot/Ligue 1 Mobilis: Djezzy signe une convention de sponsoring avec l'US Biskra    Algérie/Mauritanie: Sonatrach signe un mémorandum d'entente avec la SMH pour le renforcement de la coopération énergétique    ONPO: le coût du Hadj fixé cette année à 840.000,00 DA    Constantine: Plus de 400 tonnes d'aides humanitaires collectées pour le peuple palestinien à Ghaza    Agrément à la nomination de la nouvelle ambassadeure d'Algérie à Oslo    La coopération bilatérale au centre des entretiens de Arkab avec le vice-ministre russe de l'Energie    Le Maroc empêche la visite de parlementaires basques au Sahara occidental    Pluies orageuses attendues sur des wilayas de l'Ouest à partir de jeudi soir    « L'appel à l'expulsion des Ghazaouis est une tentative désespérée et injuste »    «Le recensement vise à atteindre plusieurs objectifs politiques stratégiques»    Les moyens de renforcer l'efficacité énergétique examinés    Signature d'un protocole de coopération en matière de formation policière    Fédération tunisienne de football : Moez Nasri élu nouveau président    Le sélectionneur algérien plus objectif dans ses analyses    Débâcle des Verts au Mondial de hand : Les pouvoirs publics interviennent    Le Général d'Armée Saïd Chanegriha reçoit le SG adjoint délégué pour les affaires politiques et la politique sécuritaire de l'Otan    «Nous sommes maîtres chez nous !»    Poutine était prêt à rencontrer Zelenski au printemps 2022    Saisie de 1.700 kg de kif traité et 441 comprimés de Prégabaline 300 mg    A Monsieur le président de la République    A Monsieur le président de la République    Des milliers de déplacés au Darfour-nord en raison d'une escalade des attaques des FSR    Sansal, le Cercle algérianiste et le plan de partition de l'Algérie    Une commune en plein chantier    Arrivée à Skikda, la troisième halte    Tizi-Ouzou: la caravane Jeunesse et Mémoire nationale sur les traces des "novembristes"    Développement et modernisation de la capitale: une séance de travail consacrée au Plan blanc    Elaborer une stratégie nationale aux contours clairs        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La d�colonisation ch�re aux chouhada n�a pas eu lieu
(1re partie)
Publié dans Le Soir d'Algérie le 16 - 10 - 2010

�Il est tr�s dangereux de dire ce que l�on pense, tr�s p�nible de ne pas le dire et tr�s pernicieux de dire le contraire.�
(Saint Augustin de son nom berb�re Aouregh n�Aferfan)
Par Ahc�ne Bouaouiche, psychologue � Constantine
Question � propos de cette �pigraphie, faut-il d�duire de cette grave sentence, attribu�e � l�illustre penseur berb�re, que le danger de dire la v�rit� et celui de l�entendre soient une constante de la culture universelle ou seulement une exception culturelle alg�rienne constante ?
En guise d�avant-propos
Je sais qu�� la seule lecture de l��nonc� de cet article, tous ceux qui, par conformisme ou par conviction id�ologique, ne veulent, des r�alit�s humaines complexes et nuanc�es, observer que leurs manifestations historiques apparentes, me voueront probablement aux pires g�monies. Les moins incisifs parmi eux me reprocheront s�rement de situer indistinctement et arbitrairement au m�me niveau de r�pugnance morale et de d�sapprobation politique, la malfaisance du pouvoir colonial et les errements du pouvoir national.
Composition de cette contribution
Cette contribution r�dig�e dans l�obligation de la concision comprend deux parties :
- La premi�re partie est consacr�e � une r�trospective de l�Alg�rie colonis�e et � un rappel basique de la nature du colonialisme et de ses effets n�gatifs.
- La deuxi�me partie aborde la probl�matique de la d�colonisation inachev�e de l�Alg�rie, de ses paradoxes et des effets r�gressifs qu�elle a engendr�s.
PREMI�RE PARTIE
Une analogie critique
Imaginer, m�me dans une vision positiviste, une analogie critique entre les effets n�gatifs du colonialisme et les effets r�gressifs de la d�colonisation est une repr�sentation politique � la limite des convenances sugg�r�es par une certaine lecture crisp�e de l�histoire nationale. Les censeurs scrupuleux de la raison patriotique, farouchement r�tifs � toute forme d��tudes critiques de l�histoire nationale, ne manqueront pas d�assimiler ma d�marche � une inadmissible h�r�sie id�ologique.
Approche inhabituelle et paradigmes singuliers
Sans doute, d�aucuns me suspecteront de verser subrepticement dans un grave et malencontreux m�lange des genres cat�go-riellement antinomiques. Il est vrai que la probl�matique pos�e ici, sensible du point de vue �motionnel, historique et politique, inhabituelle dans sa formulation et singuli�re de par ses paradigmes, n�est pas � l�abri de la critique.
Retour � quelques notions de base du colonialisme
Depuis son av�nement intempestive dans l�histoire moderne, tant�t glorifi� par ses supp�ts, tant�t vilipend� par les hommes d�intelligence et de progr�s, en final vaincu par les peuples, qui en p�tissaient, le colonialisme rel�ve, d�sormais, d�un pass� r�volu. Il n�est plus, de nos jours, qu�un sujet d�histoire, � propos duquel tout a �t� dit et �crit. Si, toutefois, je tiens � revisiter bri�vement les notions basiques qui le d�finissent, c�est dans le but de donner quelques r�f�rences th�oriques au d�bat engag� dans cet �crit. Bien que les manuels sp�cialis�s de valeur universitaire, traitant avec comp�tence du colonialisme, abondent dans les librairies librairies et biblioth�ques, j�ai intentionnellement orient� mes recherches bibliographiques vers les seuls lexiques encyclop�diques ; j�ai consult� ainsi quatre d�entre les plus connus : Hachette, Larousse, Quillet et Robert.
D�finition du colonialisme selon les encyclop�dies
Ce que ces lexiques, usant d�une terminologie acad�mique, �crivent dans un style pond�r� � propos du colonialisme conforte enti�rement les th�ses qui lui sont hostiles. Il n�est question que de doctrines politiques tendant � l�gitimer un syst�me arbitraire d�occupation de territoires d�autrui, d�usurpation et d�exploitation des richesses naturelles des pays colonis�s au profit des pays colonisateurs, et d�asservissement des populations colonis�es. En effet, il n�est nulle part fait la moindre mention d��uvre civilisatrice ou d�effets positifs de la colonisation.
Le colonialisme : rapine, despotisme, immoralit� et corruption
A la diff�rence des d�finitions dispens�es par les encyclop�dies, la litt�rature sp�cialis�e produite par des hommes de r�elle comp�tence et de grande qualit� intellectuelle et morale, activement engag�s dans l�actualit� sociale �conomique et politique de leurs pays et du monde, consid�re le colonialisme comme ayant �t� la plus abjecte, la plus barbare et la plus raciste des aventures que les peuples colonis�s aient eu � subir et que l�histoire humaine contemporaine ait eu � conna�tre :
- l�usurpation des richesses naturelles, des biens mat�riels, et des biens culturels, est toujours et partout le motif principal de toute entreprise de conqu�te des territoires d�autrui ;
- les m�mes fins justifiant les m�mes moyens, tous les conqu�rants s�inspirent des m�mes doctrines politiques, adoptent les m�mes modes op�ratoires, fonctionnent selon les m�mes sch�mes et usent des m�mes m�thodes de r�gentation des pays et des peuples soumis ;
- pour avoir connu toutes les formes de domination politique, les Alg�riens ont appris � ne point faire de distinction entre elles ; il n�y a gu�re de dominations �trang�res plus cl�mentes que d�autres ; il n�y a que des dominations plus ou moins longues les unes par rapport � d�autres.
La subordination : principe de r�gentation coloniale
En g�n�ral, quand une petite minorit� se donne pour vocation ill�gitime de vouloir gouverner tout un peuple, elle s�oblige ipso facto � produire un mode politique d�embrigadement arbitraire en pr�conisant brutalement une implacable inversion de la hi�rarchie des valeurs morales et sociales traditionnelles et � recourir � des proc�d�s cyniques de subordination en direction de la partie corruptible de la population, qu�elle instrumentalise pour entreprendre de soumettre par la violence l�autre partie de la population qui lui est r�fractaire. En envahissant l�Alg�rie, les forces coloniales fran�aises avaient conscience qu�elles ne pouvaient ni l�occuper durablement ni l�administrer efficacement sans s�adjoindre imp�rativement de larges complicit�s indig�nes soumises. Au tout d�but de la colonisation, les Fran�ais n�ont pas eu besoin d�inventer de mod�le d�administration et de gestion de l�Alg�rie ; ils avaient trouv� sur place un mod�le idoine laiss� en d�sh�rence par les Ottomans en capitulant. Ils l�ont imm�diatement adopt� et appliqu� dans l�int�gralit� de sa conception : sch�ma organique, mode de fonctionnement et nomenclature des t�ches assign�es aux agents indig�nes (ca�d, bachagha, agha, etc.) Ils l�ont conserv� et reproduit jusqu�� l�ind�pendance de l�Alg�rie, sans rien modifier � sa structure initiale et � son usage.
DEUXI�ME PARTIE
La d�colonisation, c�est quoi au juste ?
Cette question peut para�tre, � double titre, sp�cieuse et saugrenue. D�abord, parce qu�elle est pos�e presque un demi-si�cle apr�s la proclamation de l�ind�pendance, autrement dit un demi-si�cle apr�s la d�colonisation de l�Alg�rie, ensuite parce que le terme d�colonisation exprime par lui m�me l�action qu�il implique, � savoir le d�passement et/ou la n�gation de la colonisation. Les historiens, les sociologues, les philosophes et les politiques engag�s ont t�moign�, en toute v�rit�, que le peuple alg�rien avait endur� la colonisation comme on endure une odieuse injustice de l�histoire. Par cons�quent, la d�colonisation pour laquelle les Alg�riens ont consenti d�incommensurables sacrifices doit logiquement leur restituer la dignit�, la justice et les droits essentiels dont les avait syst�matiquement frustr�s le colonialisme. Consid�r�e dans cette perspective, la question pos�e s�av�re ni sp�cieuse ni saugrenue. Car il s�agit moins de savoir ce qu�est le colonialisme, que de savoir si apr�s un demi-si�cle d�ind�pendance nationale, la d�colonisation a ou non r�pondu aux aspirations l�gitimes des alg�riens. Somme toute, il faut exister dans une bulle scrupuleusement aseptis�e, haut plac�e au-dessus des lois des hommes, tr�s �loign�e des r�alit�s de la quotidiennet� alg�rienne, pour ignorer les al�as et les avanies de tout genre, qui sans r�pit, assaillent les citoyens : injustice sociale, tracasseries administratives, vexations bureaucratiques, humiliations au moindre contact avec les services publics, pratiques �hont�es de passe-droit, m�pris affect� sans vergogne � l�endroit des citoyens sans d�fense, et j�en passe ; tous des fl�aux et vices sociaux et moraux oppressifs, qu�on disait n�appartenir en propre qu�au syst�me politico-administratif colonialiste. Comment, diable, sans user de d�magogie politicienne et sans malhonn�tet� intellectuelle, qualifier un pouvoir politique qui reproduit et cultive toutes ces vilenies d�un pass� colonial, qu�on croyait avoir � jamais bannies, au prix de l�immense sacrifice humain, dont tout le monde en a t�moign� ? A ce niveau d�analyse, il convient d�observer que pour un esprit avis�, les actes syst�matiquement r�pr�hensibles perp�tr�s par le pouvoir colonial ne doivent en aucun cas, par le jeu dangereux d�une quelconque duplicit� intellectuelle, absoudre les actes condamnables que commet le pouvoir national.
D�colonisation : concept universel, significations divergentes
D�finitions des encyclop�dies
Les lexiques encyclop�diques, usant comme � l�accoutum�e de formulations lapidaires et sobres, d�finissent la d�colonisation en ces termes : - Action d�accorder l�ind�pendance � un pays colonis�.
- Voies et processus par lesquels un pays colonis� acc�de � l�ind�pendance.
- Mesures politiques et juridiques conf�rant � un �tat colonis� le statut d�un �tat libre. Cette conception id�ologiquement neutre a l�inconv�nient de consid�rer que les aspects conventionnels et la phase ultime de la d�colonisation. Elle occulte totalement les processus historiques qui l�ont longuement anim�e et in fine impos�e � l�histoire g�n�rale.
La d�colonisation, les Am�ricains, les Alg�riens et De Gaulle
L�id�e de d�colonisation, en tant que concept g�opolitique a �t�, pour la premi�re fois, �nonc�e par les Etats-Unis d�Am�rique vers la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cependant, bien avant que cette id�e bienvenue ne vint heurter la conscience politique universelle, et particuli�rement la mauvaise conscience coloniale europ�enne ab�m�e par l�aventure fasciste, le peuple alg�rien menait depuis d�j� plus de cent quinze ann�es un combat rude, constant et solitaire contre un colonialisme fran�ais des plus farouches. L�id�e de d�colonisation venue d�Am�rique fut diversement per�ue par les Europ�ens. Par rapport, tout particuli�rement � l�Alg�rie, consid�r�e trois d�partements fran�ais d�outre mer, la classe politique fran�aise, dans son ensemble, r�cusa cette id�e avec v�h�mence. Max Gallo �crivait, cependant, que le g�n�ral de Gaulle n��tait pas, quant � lui, tout � fait hostile � une certaine id�e de d�colonisation. L�histoire nous apprendra que sur cette question, De Gaulle avait une id�e bien � lui, dont n�avaient la confidence que ses tr�s proches. C��tait � Constantine, en 1944, que De Gaulle �voqua, pour la premi�re fois, l�avenir de l�Alg�rie et aborda le th�me de l��mancipation de l�homme et le droit des peuples � disposer d�eux-m�mes. En ce temps-l�, la France �tait encore sous domination allemande. C��tait s�rement le sort de la France occup�e, qui, le plus, pr�occupait le g�n�ral.
Les �v�nements de mai 1945 et leurs r�percussions politiques
Au mois de mai 1945, au moment m�me o� le peuple fran�ais c�l�brait dans une grandiose jubilation populaire �la France lib�r�e�, le peuple alg�rien endurait, de la part des autorit�s coloniales fran�aises, l�une des plus sanglantes r�pressions de son histoire. De Gaulle et ses compagnons du Comit� fran�ais de lib�ration nationale (CFLN) �taient alors aux commandes de la France lib�r�e. Peu apr�s ces �v�nements tragiques de mai 1945, les soubresauts d�une situation politique fran�aise chaotique et impr�visible oblig�rent De Gaulle � prendre ses distances par rapport aux affaires courantes de l�Etat. Mais persuad� d�incarner seul la grandeur de la France, il n�avait, � vrai dire, jamais d�sert� les hautes sph�res de souverainet� o� se m�ditaient s�rieusement les grandes orientations de la France. De Colombey-les deux Eglises, le petit bourg o� il s��tait retir� en 1947, le g�n�ral de Gaulle suivait avec un int�r�t particulier, disait-on, l��volution politique, sociale et s�curitaire de l�Alg�rie. Il avait acquis l�intuition que cette colonie fran�aise, � la fois trop proche et tr�s lointaine, allait bouleverser le devenir de la France et d�cider de son propre destin politique. Esprit avis� et homme de grandes exp�riences De Gaulle pressentait que la brutalit� particuli�rement f�roce avec laquelle les manifestations de mai 1945 furent r�prim�es, ne pouvait qu�exacerber significativement les sentiments anticolonialistes des alg�riens, radicaliser dangereusement leur volont� ind�pendantiste et les d�terminer � forger des modes d�organisation, des formes et des moyens de lutte in�dits, de force � mettre en grave p�ril l��quilibre politique et social de la France, et contaminer ses relations avec ses colonies africaines, �quilibre d�j� sensiblement inqui�t� par l�effet de d�labrement moral de la caste politique parisienne et de l�aveuglement suicidaire du puissant colonat pied-noir d�Alger.
Juguler le PPA/MTLD : premi�re priorit� de De Gaulle
Les gardiens du temple r�publicain fran�ais et � leur t�te le g�n�ral De Gaulle, alors en r�serve de la r�publique, ne pouvaient se r�soudre � laisser la France sombrer, � cause de l�Alg�rie, dans un d�sordre historique fatal. Conjurer le danger repr�sent� par les ind�pendantistes alg�riens fut l�une des t�ches engag�es en priorit� par le g�n�ral De Gaulle et son compagnon de la r�sistance Roger Wibot, alors tout puissant patron de la Direction de la surveillance du territoire (DST). L�objectif strat�gique arr�t� n��tait pas tant d��radiquer totalement du paysage politique le PPA/MTLD, porteur radical et exclusif de l�id�al ind�pendantiste alg�rien, que de l�infl�chir � la vision gaullienne d�une �d�colonisation� aux couleurs de la France gaulliste. La mission d�infl�chissement du mouvement nationaliste alg�rien fut confi�e � un service de police expert en manipulations, lequel n�avait pas la r�putation de faire dans la dentelle et pour qui �la fin justifie tous les moyens� : le recours aux mensonges, aux d�nigrements, aux chantages, aux harc�lements administratifs, aux trafics d�influence. Tout �tait permis, rien n��tait proscrit ; l�essentiel �tait de parvenir � infiltrer les rangs du PPA/MTLD, y d�ployer des actions sourdes de sape visant ses �lites, ses instances d�encadrement et ses meilleurs militants. La finalit� politique recherch�e �tait de d�biliter le mouvement nationaliste alg�rien de le vider s�v�rement de toutes ses ressources vivifiantes afin de le mettre en dissonance flagrante, par rapport � son propre id�al politique. Dans l�histoire du mouvement national alg�rien, les cas de manipulation polici�re ont �t�, certes, nombreux, n�anmoins, je n�en citerai que les deux qui, � mon avis, lui ont �t� les plus pr�judiciables et qui dans la dur�e se sont av�r�s les plus nocifs � la nation alg�rienne.
- Le complot dit �berb�riste� 1949/1950
Les historiens enclins aux raccourcis et � l�amalgame ont attribu� ce soi-disant complot � l�antagonisme �berb�re-arabe� sur fond d�un irr�dentisme amazigh r�current en Kabylie. Dans ses M�moires d�un combattant, livre paru en 2009, aux �ditions Barzakh, Hocine A�t Ahmed, acteur et t�moin vivant de cet �pisode, donne une version authentique et �difiante des faits. Rien � l��poque ne pr�sageait d�un tel complot ; il n�y avait au sein du PPA/MTLD aucune raison objective, aucune exigence id�ologique, aucune n�cessit� organique partisane, aucune urgence politique � d�battre, encore moins � s�affronter, � propos d�un sujet purement th�orique et tellement �tranger aux devoirs du moment. Il n�est pas n�cessaire de chercher ailleurs les vrais motifs de ce pseudo complot : les instigateurs aux ordres des services de renseignements du gouvernement g�n�ral d�Alg�rie, command�s par le colonel Schoen, sp�cialiste des op�rations de manipulation des partis politiques, avaient pour mission prioritaire de d�membrer le PPA/MTLD et d�affaiblir principalement le courant ind�pendantiste radical. En l�occurrence, ils visaient tout particuli�rement � neutraliser en l�isolant et en la diabolisant une r�gion sensible fortement engag�e dans la lutte de lib�ration nationale. De cet �pisode tragique de faux complots berb�ristes et de r�elles intrigues polici�res, on ne retient plus, aujourd�hui, que les noms de quelques militants braves et valeureux, tous issus de la toute premi�re origine du nationalisme alg�rien, accus�s � tort d�une �instigation ethnique� dont en v�rit� ils n��taient eux-m�mes que d�innocentes victimes.
- La scission du PPA/MTLD de 1953/54
Cette scission survenue en 1953 entre les fid�les � Messali Hadj et les partisans du comit� central du parti (messalistes et centralistes) avait, � l��poque, provoqu� un v�ritable s�isme politique en Alg�rie et en France �galement. Ce d�saccord d�opinions � propos du leadership n�avait aucun caract�re exceptionnel de r�el gravit� id�ologique, organique et/ou strat�gique de nature � exposer � un danger fatal et irr�m�diable l�existence d�un parti glorieux, solidement ancr� dans le pays et tr�s largement populaire. Cette diff�rence de points de vue, ordinaire s�il en �tait, n�aurait probablement jamais d�g�n�r� en conflits fratricides jusqu�� conduire le parti � son implosion int�grale � politique et organique � sans les intrusions corrosives sournoisement men�es par la police politique coloniale plac�e sous l�autorit� de Jean Vaujour, directeur des renseignements g�n�raux d�Alger. Les incidences politiques engendr�es par cette crise furent ind�niablement les plus nuisibles et les plus tenaces de l�histoire du nationalisme alg�rien.
De Gaulle ne change pas de th�orie, il change de fusil d��paule
En un laps d�une d�cennie, de 1945 � 1955, De Gaulle reconsid�rera sensiblement sa vision et ses vis�es � propos de la probl�matique alg�rienne et de la nature des rapports que la France se devra de d�velopper avec l�Alg�rie. De sa conduite et des discours politiques essentiels d�coule la certitude que De Gaulle n�a jamais �t� un convaincu f�ru de l�Alg�rie fran�aise. Esprit conservateur, tr�s vieille France, il �tait oppos� au m�tissage culturel. Par rapport � l�Alg�rie, il craignait, par-dessus tout, qu�avec la conjonction des produits certains de la d�mographie et des effets pervers du temps, la France par la v�rit� du nombre, ne devienne inexorablement alg�rienne. En fait, De Gaulle ne tol�rait la diversit� et les diff�rences culturelles que dans la fiction et la d�magogie de la rh�torique, jamais dans leurs r�alit�s sociales v�cues, faites de proximit� et d�intimit�. De son exil d�Alger, le g�n�ral a, entre autre, retenu qu�on ne pouvait ind�finiment jouir de l�Alg�rie, de ses ressources naturelles, de son ciel bleu, des contrastes saisissants de ses paysages, tout en ignorant impun�ment ses hommes, sa culture et ses traditions.
La guerre de lib�ration : ultime duel Alg�rie-De Gaulle
Revenu aux commandes effectives de la France en mai 1958, intimement et secr�tement convaincu de l�in�luctabilit� historique de l�ind�pendance de l�Alg�rie, De Gaulle n�avait plus vraiment pour dessein de maintenir l�Alg�rie dans le giron de la France, ni m�me de persister � vouloir infl�chir les Alg�riens � sa conception de la d�colonisation d�clar�e aux couleurs de la France. Il savait, d�sormais, ces deux missions impossibles, rendues toutes deux anachroniques par l��volution acc�l�r�e et irr�versible de l�histoire des peuples. Quarante-deux mois apr�s le d�clenchement de la lutte arm�e de Lib�ration nationale, il ne restait au g�n�ral De Gaulle, d�tenteur l�gal de l�ensemble des pouvoirs civils et militaires, qu�autant de mois pour mener � terme le programme engag� d�s apr�s les �v�nements sanglants de mai 1945 � savoir l�an�antissement syst�matique des �lites du mouvement ind�pendantiste alg�rien : - il se devait, le temps pressant, d�intensifier la guerre d�j� �pre et tenace contre les maquisards de l�int�rieur, avec la ferme d�termination d�exterminer les chefs charismatiques de la lutte arm�e de Lib�ration nationale ; - le prestige et l�autorit� morale incontestable, dont ces combattants jouissaient aupr�s des populations alg�riennes, pouvaient, en effet, contrarier les intentions politiques inavou�es de De Gaulle. Cette ultime mission anim�e par le ressentiment et le d�pit, inspir�e par des motifs politiques d�une grande indignit� morale, De Gaulle et les siens la consacr�rent � an�antir rigoureusement les forces vives du peuple alg�rien d�j� �prouv� par une longue histoire coloniale et une guerre impitoyable, et � ensemencer les ferments de la discorde dont la finalit� n��tait rien moins que de vouer fatalement l�Alg�rie ainsi affaiblie et gravement �t�t�e � une gouvernance d�grad�e, � un chaos g�n�ralis� et aux ordres occultes d�une certaine France.
Les crises du PPA/MTLD : croissance ou nuisance
Les crises nuisibles v�cues par le PPA/MTLD ne sont pas de celles �voqu�es par la th�orie qui professe que les crises, en g�n�ral, conditionnent, rythment et jalonnent la croissance et l��volution naturelles des hommes et des peuples. Le fait que le mouvement nationaliste alg�rien n�ait pas, en d�pit de ces nuisances, d�vi� de sa trajectoire ind�pendantiste, jusqu�� l�ind�pendance arrach�e, ne prouve absolument pas l�innocuit� ou l�inop�rance de ces crises ; il atteste, tout au plus, de la volont� puissante du peuple alg�rien � se lib�rer du joug colonial. En r�alit�, toutes les crises politiques ayant affect�, d�une fa�on critique, le mouvement nationaliste alg�rien et particuli�rement le PPA/MTLD, ne pr�sentaient aucun caract�re de n�cessit� objective de croissance ou d��volution, elles furent, � chaque fois, artificieusement foment�es dans l�unique intention de nuire profond�ment et durablement. Comme il est impossible de d�tourner l�histoire de la perspective qu�elle a d�cid� de prendre, De Gaulle et ses acolytes se sont alors engag�s dans une politique meurtri�re d��limination physique s�lective des �lites fondatrices de l�histoire alg�rienne moderne. Les Alg�riens qui, aux temps de ces crises majeures n�avaient pas encore atteint l��ge de raison, ne pourront jamais deviner la grande qualit� morale, l�ind�niable valeur intellectuelle, l�incroyable courage et l�ind�fectible patriotisme des �lites et des militants nationalistes de l��poque. Tous des braves � jamais disqualifi�s ou disparus, victimes innocentes, tout � la fois, de l�ambition suicidaire de certains de leurs propres compagnons de lutte et des conspirations ourdies par les agents de l�administration coloniale. Les stigmates de ces crises concoct�es, il y a de cela plus d�une soixantaine d�ann�es, r�vis�es continuellement au gr� des conjonctures, entachent toujours notre destin national. Dieu seul sait, combien de temps encore nous aurons � subir leurs n�fastes incidences ! Certes, la liquidation violente de tous ces hommes d�exception, anonymes et/ou connus, a laiss� un immense espace compl�tement �rod� et particuli�rement propice au surgissement fr�n�tique d��tres insolites p�tris de m�diocrit�, d�immoralit�, d�arrogance et agit�s par une inimaginable propension � la pr�dation. Il me pla�t de me poser la question, d�sormais, vaine, je le sais, de savoir ce qu�aurait �t�, aujourd�hui, l��tat de la nation alg�rienne si ce mouvement nationaliste alg�rien n�avait pas subi toutes ces crises assassines, et si le pouvoir gaulliste n�avait pas dix-sept ans durant pratiqu� sa sinistre politique de liquidation physique ciblant sp�cialement les patriotes alg�riens poss�dant indubitablement l�envergure et les qualit�s d�hommes d�Etat.
La d�colonisation inachev�e
Certains ind�pendantistes r�duisaient la d�colonisation � un simple programme de renversement formel du pouvoir politique colonialiste. En fait, ils ambitionnaient secr�tement de d�coloniser l�Alg�rie en pr�servant et en conservant intacte et op�rationnelle l�architecture politico-administrative coloniale : son organisation, son style et r�gles de fonctionnement, expurg�e seulement des hommes, des symboles et de la rh�torique � r�sonance colonialiste. De l�Alg�rie ind�pendante, ces militants de la d�colonisation artificieuse ne visaient qu�� investir les hauts lieux du pouvoir et des honneurs et s�emparer des fortunes mirifiques d�sert�es par leurs poss�dants, victimes expiatoires des lois de l�histoire. Je pr�sume que c�est � leur sujet que Larbi Ben M�hidi, dans un document dat� de f�vrier 1957, �crivait : �J�ai la hantise de voir se r�aliser mon plus cher d�sir ; lorsque nous serons libres, il se passera des choses terribles, on oubliera toutes les souffrances de notre peuple pour se disputer des places ; ce sera la lutte pour le pouvoir. Nous sommes en pleine guerre et certains y pensent d�j� et les clans d�j� se forment.� De son c�t�, le colonel Lotfi, chef de la Wilaya V historique, se confiant � Ferhat Abbas, pr�sident du GPRA, en termes indign�s mais combien pr�monitoires, disait : �Certains chefs r�vent d��tre des sultans au pouvoir absolu. Ils n�ont aucune notion de la d�mocratie, de la libert� et de l��galit� entre les citoyens. Que deviendra l�Alg�rie entre leurs mains ?� Obnubil�s par l�exaltation effr�n�e de leurs r�ves insens�s, ayant perdu toute lucidit� politique, ces hommes refusaient farouchement d�entendre raison et d�admettre qu�une d�colonisation inaccomplie, qui plus est, d�vi�e de sa trajectoire morale et politique, encourait le risque inexorable de s�av�rer aussi n�faste et aussi cruellement injuste que le colonialisme.
A. B.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.