Ces autochtones négroides Maugrebins, ou ancêtres primordiaux des Paléoamazighs, selon les recherches actuelles, disposaient aussi, si l'on se réfère aux travaux de divers paléoanthropologues, de leur propre écriture, la plus ancienne écriture de l'Afrique du Nord qui aurait plus de 3 000 ans d'âge ! Des attestations épigraphiques qui dateraient, probablement, de plusieurs siècles avant J.C., et dont notamment des figurines d'art rupestre de la fin de la période bovidienne et du début de la période caballine, semblent témoigner, dès cette phase culturelle importante, de l'amorce d'une tendance nette à la schématisation à base géométrique, forme préludant à l'écriture à venir ! L'apport de l'arabité –islamité Il est important de rappeler que la langue arabe, qui s'est répandue à la faveur de l'expansion du message de l'Islam, ne s'est imposée qu'en zones favorables à l'extension de son idiome, car le Coran n'a arabisé ni les Turcs, ni les Iraniens, ni les Indiens, ni les Malais, ni les Chinois, islamisés qui ont préservé leurs langues. Concernant le Maghreb, «on pense, actuellement, que c'est le punique, langue sémitique, qui a préparé les Berbères à l'emploi de l'arabe dialectal, différent de l'arabe classique, langue sacrale (…), la parenté des langues sémitique est très étroite, si bien que des penseurs comme Arnobe, Saint Augustin, Procope, attestent que, de leur temps , les paysans de l'Afrique du Nord parlaient encore le punique. On a pu dire, à juste titre : «il est donc, probable, que la langue punique fut parlée jusqu'à l'invasion musulmane. Peut-être, la facilité avec laquelle l'arabe prit possession de ces contrées et la disparition complète du latin tenaient-elles à la présence de cette première couche sémitique. L'arabe, en effet, insistons-y, n'absorba que les dialectes qui lui étaient congénères , tels le syriaque, le chaldéen, le samaritain. Partout, ailleurs, il ne put effacer les idiomes établis. (Ernest RENAN, Histoire générale des langues sémitiques , in : œuvres complètes , volume VIIIe siècle, réédition Calmann –Lévy, Paris 1958). Au Maghreb, c'est bien connu que les dialectes berbères sont issus des langues parlées régionales avant la conquête arabe, au VIIIe siècle, et même après l'avènement de l'Islam des zones importantes sont demeurées berbérophones jusqu'à nos jours. Cela va sans dire que le Berbère, qui est apparenté au groupe Chamito-sémitique, s'est sensiblement enrichi de nombreux emprunts à l'Arabe, puis au Français. Parmi les nombreux dialectes berbères , signalons en Algérie : le Kabyle, le Chaouia, le Mozabite, ou autres variantes du Tamazight en général, comme le Targui, Zouawa, etc. ; au Maroc : le Chleuh dans le sud, le Tamazight dans le Moyen Atlas, le Rifain dans le Nord, etc., et en zone restreinte en Tunisie. Ces dialectes étaient courants durant la période du règne romain. Selon les historiens, le Grec, le Latin, tenaient lieu de langues savantes, tandis que le punique, rapportent ces derniers, était largement répandu parmi les peuplades berbères de l'époque . Et selon le chercheur-linguiste Abdou Elimam, le punique comporterait des éléments de parenté insoupçonnables, jusqu'ici, avec le parler populaire dialectal de la Daridja, généralisé dans l'ensemble du Maghreb, et c'est ce qui aurait permis également à la langue arabe de s'établir, sans grandes difficultés, dans ces zones conquises d'implantation. La langue arabe aurait, ainsi, trouvé au Maghreb et dans les pays arabisés, en général, un terrain de germinaison qu'elle n'a pas rencontré dans toutes les zones islamisées du globe : la parenté de l'idiome de famille chamito-sémitique y étant, certainement, pour quelque chose. Pour évoquer un exemple proche, et édifiant, citons ce que rapporte le Pr Chems Eddine Chitour, dans un article intitulé «De l'errance identitaire à la nation», évoquant Colette Beaune, l'émérite professeur d'histoire à Paris X qui dira, à propos de l'histoire culturelle de son pays : «la France n'est pas née en un jour! Elle s'est bâtie au gré des conquêtes, des soubresauts dramatiques. Au IVe siècle, à la suite des invasions franques, des populations germaniques s'installent en Gaule. Elles forment des royaumes qui vont être réunis par Charlemagne, après un couronnement, en 800. C'est l'empire Carolingien, qui englobe pratiquement toute la chrétienté latine. En 843, l'empire est divisé en trois, lors du traité de Verdun (…). Les rois commandaient des histoires officielles, élogieuses et dithyrambiques, que l'on appelait les Grandes Chroniques de France. Les dynasties royales, et le peuple, étaient censés descendre de Francion, qui serait venu de Troie, via le Danube, puis le Rhin, avant d'arriver à Paris. Clovis aurait donc eu un ancêtre en Asie mineure ! Au Moyen Age, il était plus glorieux de venir d'ailleurs… A la Renaissance , on redécouvre qu'il y avait des peuples sur place quand sont arrivés les Francs , en l'occurrence les Gaulois. Les Francs étaient bel et bien des immigrés venus, il y a très longtemps, pour fonder Paris, puis le royaume. C'est, seulement, à partir de la IIIe république que l'on a commencé à célébrer la nation comme étant composée de «Gaulois, blonds et moustachus» (cf .Colette Beaune : «La France n'est pas née en un jour», Propos recueillis par Marcello Wesfreid , cités in l'Expression du 13/09/2007). Comme il est donné de le constater, l'apparentement entre les membres d'une communauté territoriale, ou géo-historiquement façonnée, est très souvent d'ordre culturel, cultuel, linguistique, essentiellement, mais point d'ordre biologique racial. Ainsi, les Algériens sont des Algériens tout comme les Australiens sont des Australiens, ou les Japonais sont des Japonais, ou les Egyptiens des Egyptiens, ou les Chinois des Chinois, dans toute l'étendue et complexité de leurs diversités nationales. Dans cette optique, il convient de ne point passer sous silence cet aspect, contradictoire, de la question, négatif, improductif et carrément rétrograde, de cette fâcheuse attitude tendant à se chercher coûte que coûte une parenté mythique de pureté Arabe , Berbère, ou autre, de souche «Latine» , «Turque », «Basque», de descendance du Moyen Orient ou d'Occident, ou encore autre de filiation locale spirituelle de «purs saints Cherifs marabouts», etc., «noblesses distinctives», en quelque sorte étrangers à la «plèbe», etc., etc., et non se vouloir Algérien, tout simplement Algérien, comme l'Américain est Américain, malgré ses diverses et complexes origines, davantage plus marquées que toutes autres, mais se définissant, néanmoins, Américain avant tout ! Pour rappel, c'est la pensée coloniale qui avait voulu percevoir dans la société algérienne une certaine dimension «exogène», latine ou orientale, etc., à laquelle une frange infinitésimale d'Algériens fut tentée d'y croire, afin de diviser pour régner. Ainsi, un mythe chasse l'autre ! Algérianité plurale mosaicale Cependant, l'évolution inéxorable des choses, le processus mutationnel, complexe, du cours de l'histoire, et ses bouleversements multiples, avec notamment ses formidables brassages multiethniques, multiculturels et multilinguistiques, que ce soit en Algérie ou à l'échelle internationale, ont radicalement modifié, aujourd'hui, la perception des choses : l'apport inestimable de l'historique Révolution Algérienne de Novembre 1954, avec ses implications socio-culturelles multiples, d'exaltations des fraternités et solidarités nationales pour l'idéal commun de la souveraineté Algérienne, est passé par là ! Ce qui a contribué à faire prendre conscience, au sein du menu peuple, de ce constat souvent colporté dans la rue : depuis des siècles que des fils et des filles issus de couples Oranais -Kabyles, ou Constantinois- Chaouias, Bechari- Mozabites, Annabis- Bedjaouies, Algérois- Immigrés, etc., se marient avec des concitoyens d'autres régions, engendrent des enfants qui, à leur tour, prendront femmes et maris de Blida, du M'Zab, de Tizi-Ouzou, Chlef, Tlemcen, Skikda, Bouira, Ouargla, ou des Targuis du Sud ou de notre communauté algérienne immigrée etc. , etc., qui, aujourd'hui, objectivement parlant, des descendants de cet extraordinaire brassage multiethnique remontant à la nuit des temps, peut se targuer de se définir comme «Arabe pur», «Berbère pur», ou autre ? Qui donc, sachant que, de nos jours, la science ou l'usage des marqueurs biologiques est à même de mettre à nu tout mythe de «pureté ancestrale» ! Mais, fort heureusement, la majorité des concitoyens Algériens, loin de manquer de sagesse, à l'opposé des éventuelles sirènes des visions extrémistes des «arabistes», «berbéristes», «occidentalistes», «islamistes», et autres tendances réductrices ou unilatéralistes, se perçoivent dans l'ensemble, tout simplement, comme Algériens : Algériens de culture et de langues plurielles, mais point de pureté biologique raciale ou ethnicise chère aux idéologues-séparatistes, de quelque coté ségrégationniste qu'ils soient, de celui des clans du pouvoir, négateurs autoritaristes, ou de celui de leurs opposants radicaux régionalistes - séparatistes, tous deux en contradiction, flagrante, avec les vertus de l'entente, et symbiose démocratique, garantes de l'unité dans la diversité de la nation Algérienne. Autrement dit, les Algériens, d'une manière générale, se définissent comme ni d'Est, ni d'Ouest, ni du Nord ni du Sud, ou du Centre, mais, simplement, comme Algériens, partout chez eux à travers l'ensemble de leur territoire national, comme le dit si bien l'air d'une chanson populaire, citoyen ni «chargui» (d'Est), ni «gharbi» (d'Ouest), ni «djanoubi» (du Sud), ni «chamali» (du Nord), mais «Djazairi» (d'Algérie), refrain célèbre du grand Cheikh Algérien El Hadj Rabah Deriassa). Et aujourd'hui, la plupart des Algériennes et Algériens s'accordent sur le fait qu'ils sont, originellement, Afro-Amazighes, culturellement-cultuellement Arabo-Berbéro- musulmans et d'ancrage sociologique-économique méditerranéen, de proximité internationale, aspirant à la Modernité démocratique pluraliste, l'idéal des valeurs nobles solidaristes de l'Humanité, et le progrès technologique, technique et scientifique de l'universalité. (A suivre)