La cheffe d'orchestre Zahia Ziouani a été l'invitée de l'émission «Diasporama» du quotidien Le Soir d'Algérie, jeudi 27 janvier 2022, présentée par Maya Zerrouki et qui va à la rencontre des Algériens dans le monde entier. Zahia Ziouani, qui a vu le jour le 27 juin 1978 à Paris, a parlé de son parcours artistique, de sa grande passion pour la musique, l'Algérie son pays d'origine et pour son orchestre le bien-nommé Divertimento. Elle a également parlé d'Idir, de la cantatrice Amel Brahim Djelloul, de Mohamed Iguerbouchen, de Camille Saint-Saëns, le compositeur de Suite algérienne et de l'opéra Samson et Dalila. Avec des parents mélomanes, Zahia Ziouani a, pratiquement, rencontré la musique le jour où elle est née. Et depuis ce temps-là, la musique et elle ne se sont plus quittées (pour paraphraser Enrico Macias). D'ailleurs, sa sœur jumelle et son frère sont musiciens eux aussi. En 1981, la famille Ziouani s'installe à Pantin, dans le département Seine-Saint-Denis, réputé pour autre chose que la musique, surtout quand elle est dite classique. A l'âge de huit ans, Zahia dirige la chorale de son école et suit des cours de guitare classique au conservatoire. À 12 ans, elle apprend l'alto et intègre l'orchestre des élèves. Cet instrument à cordes sera déterminant dans ses futurs choix musicaux. Comme elle l'explique à Maya Zerrouki, être artiste signifie être devant le chef d'orchestre lors des concerts et des répétitions. Ceci lui donne l'idée d'essayer de devenir cheffe d'orchestre elle aussi, un métier considéré partout «pas fait pour les femmes». La musicienne ambitionne, alors, de devenir cheffe d'orchestre professionnelle. Mais, elle ne veut pas se contenter des invitations, de temps en temps, à diriger des orchestres symphoniques à travers le monde. Elle crée alors l'orchestre Divertimento, constitué de 70 musiciennes et musiciens, se distinguant par une certaine parité hommes-femmes. Elle fait aussi le choix de l'installer (l'orchestre) en Seine-Saint-Denis, pour, notamment, essayer de montrer un autre visage de cette région «défavorisée» sur le plan social. Rencontre avec le maestro Sergiu Celibidache Dans la vie, il y a parfois des rencontres déterminantes, comme celle de Zahia Ziouani avec le maestro roumain Sergiu Celibidache, auprès duquel elle va étudier la direction d'orchestre. Elle fonde, ensuite, en 1998 l'orchestre symphonique Divertimento qu'elle dirige jusqu'à aujourd'hui, réunissant 70 musiciens de la région Ile-de-France et dont elle est la directrice musicale. En 2007, elle est nommée première cheffe d'orchestre invitée de l'Orchestre symphonique national d'Algérie dans le cadre de l'évènement «Alger, capitale de la culture arabe». Zahia Ziouani a aussi dirigé un concert en 2012 en Algérie, à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'indépendance. Elle est également cheffe d'orchestre associée de l'ensemble instrumental Densités 93. La cheffe d'orchestre se produit dans de nombreux concerts aux côtés de solistes de renom comme Raphaël Pidoux, Jean-Marc Phillips-Varjabédian ou Tedi Papavrami. Elle se produit aussi dans des lieux prestigieux : salle des concerts de la Cité de la musique, salle Pleyel, Olympia, Basilique Saint-Denis...). Zahia Ziouani a dirigé l'Orchestre national des Pays de la Loire, la Philharmonie nationale de Bosnie-Herzégovine, l'Orchestre régional de Cannes-Provence-Alpes-Côte-d'Azur, l'Orchestre philharmonique des jeunes de la Communauté arabe, l'Orchestre symphonique du Caire, l'Orchestre symphonique tunisien et de nombreux orchestres en Pologne et au Mexique, notamment. En 2013, elle a été invitée à la tête de l'Orchestre symphonique Divertimento à se produire au Grand Théâtre de Provence et dans de nombreux sites de la région Provence-Alpes-Côte, d'Azur dans le cadre de la manifestation Marseille-Provence 2013, capitale européenne de la culture. En juillet 2010, elle est nommée membre du conseil d'orientation du Musée de l'histoire de l'immigration. Elle est aussi chevalier des arts et des lettres (en France). Diplômée en analyse musicale, orchestration et musicologie de l'université Paris-Sorbonne, Zahia Ziouani a remporté plusieurs prix de conservatoire (alto, guitare classique, musique de chambre). Très sensible aux problèmes d'accès à la culture de tous les publics, Zahia Ziouani se consacre à des actions et projets permettant de sensibiliser les publics à la promotion de la musique symphonique et lyrique. Elle est aussi associée à la direction artistique et pédagogique du projet Demos (Dispositif d'éducation musicale à vocation sociale). Dans le cadre de ses missions avec Divertimento, elle a donné des concerts pour les enfants, et s'est produite avec son orchestre en milieu carcéral, dans les centres sociaux, les salles de provinces, etc. Divertimento est devenu avec le temps «un vrai centre de formation», fait-elle remarquer. Pour elle, la musique est aussi un moyen « d'accès à la beauté artistique et à l'émotion» qu'elle veut partager avec toutes les catégories sociales en France, en Algérie et ailleurs. Idir symphonique Lors d'un de ses concerts en Algérie, l'orchestre avait interprété des œuvres de musique universelle, mais aussi une œuvre du répertoire algérien, ce qui va lui donner une autre idée sur l'inspiration diversifiée qui a marqué des œuvres de compositeurs européens notamment Camille Saint-Saëns durant son séjour en Algérie. C'est aussi dans ce sens que sont considérées ses adaptations symphoniques des chansons du chanteur kabyle Idir, Aya lkhir inou et Amadyaz, interprétées avec la cantatrice Amel Brahim Djelloul. «C'est un peu dans la continuité de ce que je fais», précise-t-elle, avant d'ajouter qu'Idir était très heureux et très fier de ces adaptations. Elle espère d'ailleurs renouveler cette expérience avec des œuvres d'Idir et aussi d'autres auteurs et compositeurs algériens. A la maison, Zahia Ziouani écoute des chansons d'Idir et de Cherif Kheddam, notamment. Elle estime que sa vie d'artiste lui a fait découvrir l'Algérie, un «beau pays», et que la diaspora algérienne a contribué grandement à faire découvrir et faire connaître la culture algérienne dans les différents pays. Elle considère, en outre, qu'il n'y a pas de différence entre un Algérien vivant en Algérie ou à l'étranger et que tous sont des Algériens à part entière. Aujourd'hui, elle tient particulièrement et fièrement à ce que le titre «cheffe d'orchestre» soit écrit au féminin. Kader B.