Entretien réalisé par Salima Akkouche L'Institut Pasteur d'Algérie a annoncé que le variant Omicron représente 93% des variants circulants. Le sous-variant BA.2 a également fait son apparition en Algérie avec un pourcentage de circulation de 57% contre 43 du sous-variant BA.1. Risquons-nous de voir apparaître une nouvelle vague de ce sous-variant BA.2 qui est plus contagieux que le variant BA.1 ? Que connaît-on de ce sous-variant ? Peut-il représenter une nouvelle menace ? Explications du professeur Kamel Djenouhat, président de la Société algérienne d'immunologie clinique et chef de service de biologie et du centre de transfusion sanguine de l'EPH de Rouiba. L'Algérie a enregistré des cas du sous-variant Omicron. Que sait-on de ce variant ? En se basant sur les dates et les pays d'identification ou d'apparition des deux variants d'Omicron BA.1 (l'Omicron classique) et le BA.2 (le nouveau sous-variant), les experts de la phylogénie moléculaire estiment que le sous-variant BA.2 ne dérive pas du BA.1, il s'agit plutôt de deux sous-variants parus presque en même temps mais ayant évolué différemment. L'origine du BA.1 est l'Afrique du Sud alors que le BA.2, bien que prépondérant au Danemark, le pays qui réalise le plus grand nombre de séquençages dans le monde puisque ils séquencent toutes leurs PCR positives, il serait identifié pour la première fois aux Philippines et en Inde. On sait que le BA.2 se propage plus rapidement que le BA.1 mais on admet qu'il n'est pas plus dangereux. Reste le problème de l'efficacité de l'immunité acquise par l'un des variants contre le deuxième, qui est toujours d'actualité et les avis sur ce sujet sont disparates. Il est bien de savoir que les tests diagnostiques disponibles actuellement, test antigénique et PCR, détectent les deux sous-variants. Risque-t-on de connaître une nouvelle vague de ce sous-variant qui commence à prendre le dessus sur le BA.1 dans certains pays ? Vous savez, on est en train de constater depuis l'apparition du variant Omicron un fait non vécu avec les variants précédents du virus SARS-CoV-2. On reçoit des patients qui font presque la même symptomatologie, quelques jours après guérison du Covid. On est en train de les explorer à l'EPH de Rouiba pour étudier ce phénomène et on aura les résultats dans quelques jours. Plusieurs hypothèses sont émises, à savoir une réinfection par un variant différent, infection due à un des coronavirus existants depuis des décennies, patients non producteurs d'anticorps ou autres. L'éventualité d'une réinfection par le sous-variant BA.2 des patients guéris du variant Omicron classique n'est pas écartée par quelques experts bien qu'il ne soit pas facile pour moi, en tant que professeur en immunologie, d'admettre cette idée, vu la grande similitude des structures entre les deux sous-variants. Si cette dernière éventualité s'avère vraie, ce sous variant BA.2 pourra éventuellement être responsable d'un léger rebond sans atteindre le nombre de nouveaux cas enregistré durant le pic de cette quatrième vague (2 500 nouveaux cas). Si comme le BA.1, il se propage rapidement parmi les enfants, y a-t-il un risque sur l'année scolaire ? Quel que soit le sous-variant, BA.1 ou BA.2, il n'y aura aucun risque sur l'année scolaire. On s'attend à une très légère augmentation de nouveaux cas quelques jours après la reprise des élèves. Nos enquêtes locales relèvent qu'une grande partie de la population n'a pas été épargnée par cette vague. Dieu merci, le nombre de décès n'a pas suivi le nombre de nouveaux cas et cela est dû certainement au fait que l'Omicron est moins pathogène que le Delta et aussi à un certain degré d'immunité acquise par l'infection naturelle et la vaccination. La décrue que nous sommes en train de connaître et l'accalmie que semblent connaître les hôpitaux risquent-elles d'être perturbées avec ce sous-variant ? A la fin du mois de décembre, nous avons annoncé et déclaré à travers les médias que le mois de janvier serait un mois difficile. On avait peur du fait qu'on allait vivre une quatrième vague mixte Delta-Omicron, le premier connu par sa dangerosité et le deuxième par sa vitesse de propagation et son échappement à la réponse immunitaire acquise. Etant en phase de décrue, le constat aujourd'hui est clair, record du nombre de contaminations mais pas celui de cas graves ou de décès, et j'estime que nous avons bien géré cette vague. Par ailleurs, mon humble avis personnel est que ce sous-variant BA.2 ne peut pas faire une nouvelle vague dans les pays où une grande partie de leur populations a déjà contracté le BA.1 Vous avez prédit un retour à la vie normale au mois de mars prochain. Vos prévisions sont toujours les mêmes ? En effet, ceci reste mon avis et celui partagé par une grande partie des experts internationaux. L'arrivée du BA.2 ne peut qu'aider à infecter le reste de la population qui n'a pas encore contracté le virus ce qui va augmenter le taux de l'immunité collective. En réalité, on est en face d'une vaccination naturelle et non artificielle obligatoire pour tout le monde où le droit de refus ou d'hésitation n'existe pas. De ce fait, nous prévoyons le retour à une vie normale à partir du mois de mars suite à l'évolution de la maladie d'une forme pandémique vers une forme endémique durant laquelle le SARS-CoV-2 rejoindra fort probablement les membres des virus bénins de la famille des coronavirus avec lesquels nous vivons depuis des décennies. Il est important de noter et de savoir que la médecine n'a jamais été et ne sera pas une science exacte et reste toujours basée sur des évidences. S. A.