En 1970, la presse alg�rienne relevait le grand succ�s commercial du film l�Opium et le B�ton r�alis� par Ahmed Rachedi. Toutefois, ce m�rite ne peut cacher les imperfections de cette �uvre cin�matographique, encore moins les excuser, car le r�alisateur disposait au d�part d�un atout majeur : le roman �ponyme du c�l�bre �crivain alg�rien Mouloud Mammeri. Aussi, cette adaptation �tant une �uvre importante dans la filmographie alg�rienne, nous allons lui consacrer une analyse exhaustive ponctu�e par des rappels historiques sur l�organisation du cin�ma alg�rien durant cette p�riode, accompagn�e d�une biographie succincte du r�alisateur. Par Hac�ne-L�Hadj Abderrahmane* Ahmed Rachedi est n� le 19 ao�t 1936 � T�bessa dans une famille de petits fellahs. Il fit ses �tudes primaires et secondaires dans cette ville. En 1956, � la suite de l�assassinat de son grand-p�re par la l�gion �trang�re, sa famille �migra en Tunisie o� son p�re, membre de l�ALN, succombera deux ans plus tard � ses blessures au maquis. C�est dans ce pays qu�en 1958 Ahmed Rachedi fera ses d�buts au cin�ma, initi� aux techniques du 7e art par le metteur en sc�ne fran�ais, Ren� Vautier. Ren� Vautier, pour fuir en 1956 une �ventuelle arrestation par les autorit�s fran�aises qui lui reprochaient d�accompagner la projection de son film Une nation, l�Alg�rie d�un commentaire d�non�ant la politique coloniale dans notre pays, d�cida de partir en Tunisie. �Ce n��tait pas une adh�sion au FLN, j�ai tout simplement d�cid� de mettre ma cam�ra au service d�une certaine v�rit� qui �tait cach�e aux Fran�ais�, nous confierat-il lors d�une interview qu�il nous a accord�e � Alger le 06.02.1982. A Tunis, il marquera juste une pause avant d�entrer en Alg�rie filmer des op�rations militaires. Les fronti�res n��tant pas alors infranchissables, Ren� Vautier ne restait pas plus de trois semaines au maquis, afin que les images film�es soient d�velopp�es et utilis�es rapidement par les services de l�information du FLN. C�est aux c�t�s de ce cin�aste qui a choisi de se solidariser avec la r�volution alg�rienne que Rachedi filmera ses premiers essais documentaires. Les bandes film�es � l��poque n�ont certes pas une valeur technico-artistique particuli�re, elles demeurent n�anmoins des t�moignages uniques et inestimables sur cette p�riode, d�autant plus que la valeur d�une actualit� film�e augmente d�ann�e en ann�e. En 1963, certains passages de ces bandes serviront � r�aliser au centre audiovisuel de Ben-Aknoun, dirig� par Ren� Vautier, un documentaire sur la premi�re ann�e de la vie de l�Alg�rie ind�pendante intitul� Peuple en marche. Ren� Vautier aime pr�ciser que �ce film est une �uvre collective r�alis�e par Ahmed Rachedi, Nasreddine Guenifi, Mohamed Guenez et Allel Yahiaoui�. (Interview du 06.02.1982). Dans ce centre qui avait pour missions de r�aliser des courts-m�trages en 16 mm, de former des animateurs pour les cin�-pops, les initier � la manipulation et � l�entretien des appareils de projection, Ahmed Rachedi r�alisera son premier documentaire en 35 mm Des mains comme des oiseaux d�une dur�e de 20 mn. D�autres jeunes enthousiastes tels que Bouguermouh, Guenifi, Bouafia, Bellil, Boumedi�ne et Bennacer y r�aliseront �galement une s�rie de courts-m�trages en 16 mm. Le court-m�trage de A. Rachedi relate les op�rations de d�minage aux fronti�res alg�riennes par une �quipe de sp�cialistes sovi�tiques dont un responsable paiera de sa vie cette op�ration qu�il supervisait. (Les informations relatives � la biographie et aux r�alisations d�Ahmed Rachedi sont extraites des interviews qu�il nous a accord�es � Alger les 15.03.1975 et 07.03.1987). Ayant saisi l�importance du r�le du cin�ma pour la r�g�n�ration du pays et son int�r�t pour la consolidation de la sph�re d�influence, l�Etat a d�cid� de cr�er en 1964 le Centre national du cin�ma alg�rien (d�cret du 8 juin 1964). Le CNCA allait permettre de regrouper, sous une m�me tutelle, tous les moyens humains et mat�riels de production existant �� et l�, car isol�s les uns des autres, ils ne repr�sentaient aucune force potentielle pour l��mergence d�un v�ritable cin�ma national. Malheureusement, ce pas en avant, annonciateur d�une politique de d�veloppement d�envergure pour ce secteur (asseoir les fondements d�une industrie du cin�ma, encourager la production de films, former dans les m�tiers du cin�ma, etc.) s�est av�r� insignifiant au vu des r�sultats obtenus. Toutefois, c�est gr�ce aux moyens du CNCA que Ahmed Rachedi r�alisera en 1965 son premier long m�trage documentaire L�aube des damn�s consacr� � la lutte de lib�ration des peuples d�Afrique et du Tiers-Monde. La r�alisation de ce film de montage a n�cessit�, selon Rachedi, le �visionnage� de 200 000 m de pellicules dans diff�rentes cin�math�ques europ�ennes. Le m�rite de ce documentaire r�side dans le fait que le r�alisateur, tout en faisant une incursion dans l�histoire, donne une perspective tr�s large des aspirations des peuples en lutte pour leur ind�pendance et le progr�s. Cependant, �pris d�mesur�ment des riches et rares mat�riaux en sa possession, Rachedi, en voulant trop en utiliser, a parfois rompu le rythme du film et d�truit les effets attendus. A notre avis, la grande faiblesse de ce documentaire, qui traite d�un th�me qui a boulevers� la carte politique internationale, r�side dans l�insuffisance, voire l�absence d�une analyse politique approfondie. Sans doute, par une sorte d�intuition, Rachedi at- il voulu, gr�ce au texte po�tique et g�n�reux de Mouloud Mammeri, racheter cette carence. Le commentaire qui accompagnait les images est un perp�tuel hymne au combat des peuples africains qui s�acheminaient vers un destin nouveau, mais comme il n��tait pas adapt� aux particularit�s des mat�riaux utilis�s dans ce film, il a pris un caract�re essentiellement illustratif. Combien de s�quences charg�es de luttes et d�histoires ont �t� ainsi escamot�es. Si Rachedi avait eu le courage de ne retenir que les s�quences qui v�hiculaient une charge politique effective, l��uvre aurait eu une r�sonance plus tragique. N�anmoins, L�aube des damn�s demeure un violent r�quisitoire contre la r�alit� coloniale avec tout ce qu�elle charrie de barbare, d�inhumain et de tragique. Prim� dans plusieurs festivals internationaux (prix du congr�s mondial de la paix au festival international de Leipzig en 1965 � prix d�honneur au festival de Karlovy Vary en 1966�), ce documentaire est pass� presque inaper�u en Alg�rie. �Il n�avait fait que 50 000 entr�es�, nous dira avec peine et regrets Ahmed Rachedi. L�indiff�rence affich�e par notre public pour L�aube des damn�s s�expliquerait, � notre avis, par le fait qu�� cette �poque la quasi-totalit� de nos salles de cin�ma �taient programm�es, avec des westerns et des thrillers. Aussi, le go�t des spectateurs de L�aube des damn�s ne pouvait rivaliser avec ce type de productions. En 1967, le Centre national du cin�ma alg�rien est dissous par ordonnance n�67-49 du 17 mars 1967. Deux organismes lui succ�d�rent : le Centre alg�rien de la cin�matographie (CAC), cr�� par ordonnance n�67-50 du 17 mars 1967, et l'Office national pour le commerce et l�industrie cin�matographique (ONCIC), cr�� par ordonnance n�67-51 du 17 mars 1967. Le Centre alg�rien de la cin�matographie, plus connu sous la d�nomination de Cin�math�que alg�rienne, �tait charg� du contr�le de l�activit� cin�matographique, de la programmation des salles de cin�ma, de la conservation et de la diffusion des films et documents d�int�r�t cin�matographique. Certaines de ses missions seront transf�r�es plus tard au minist�re charg� de la Culture. L�essor de la Cin�math�que alg�rienne est d� aux efforts conjugu�s de deux hommes exceptionnels. Il s�agit d�Henri Langlois, directeur de la Cin�math�que fran�aise qui accepta d�aider et surtout d�ouvrir ses tr�sors � la cin�math�que alg�rienne, et d�Ahmed Hocine, directeur du Centre alg�rien de la cin�mathographie, dont l��rudition et l�immense culture cin�matographique ont permis d��riger cet espace en un carrefour international o� les plus grands noms du cin�ma mondial se succ�daient pour y pr�senter leurs �uvres et en d�battre avec le public. En 15 ans de gestion, Ahmed Hocine a insuffl� � la cin�math�que alg�rienne un rythme d�activit�s absolument remarquable. La mythique salle de la rue Larbi Ben M�hidi �tait devenue non seulement le rendez-vous et le miroir du cin�ma mondial, mais a servi aussi de tribune pour les causes justes o� des cin�astes engag�s venaient projeter leurs �uvres militantes. Enfin, c�est dans ce temple du cin�ma que des valeurs naissantes du 7e art, alg�riennes et africaines, ont connu un d�but de gloire. Ahmed Hocine, en dehors de son r�le d�terminant pour faire d�couvrir au public alg�rien le cin�ma mondial, a contribu� efficacement � l�essor du cin�ma national. Il a accompli cette mission avec un d�sint�ressement et un d�vouement qui forcent le respect. Le deuxi�me organisme, l'ONCIC, �tait charg� de la distribution de films et de la production cin�matographique. Ahmed Rachedi sera son directeur. Parmi les objectifs urgents que s��tait fix�s cet organisme figurait en premier lieu la suppression du diktat des grandes soci�t�s de distribution am�ricaines et fran�aises, qui imposaient au march� alg�rien des films exclusivement commerciaux, et souvent pas les meilleurs. En pr�vision de cette bataille que seule l�Alg�rie a pu remporter en Afrique, les responsables de cet office ont stock�, de l�aveu de Rachedi, pr�s de 2 000 films dans le plus grand secret. Et comme il fallait s�y attendre, d�s la publication de l�ordonnance 69-34 du 22 mai 1969, attribuant l�exclusivit� de l�importation et de la distribution de films � l�ONCIC, ces �majors�, qui n�acceptaient pas que leurs int�r�ts financiers et id�ologiques soient remis en cause, ont r�agi violemment en d�cidant de boycotter le march� alg�rien du film. Mais cet �embargo� n�a pas eu l�effet escompt�, car les dispositions prises par la direction de l�ONCIC en pr�vision d�une telle r�action et surtout l�int�r�t que repr�sentait le march� du film en Alg�rie dont le r�seau d�exploitation �tait constitu� � l��poque de 400 salles de cin�ma ont pouss� ces soci�t�s � assouplir leurs positions. C�est dans ce contexte de lutte et de r�organisation qu�est amorc� le tournage du film L�opium et le b�ton. L�aube des damn�sn�ayant pas re�u la cons�cration nationale qu�il m�rite, Ahmed Rachedi opte r�solument pour la r�alisation d�un film � spectacle. �Notre public aime les westerns, les films que nous avons faits en Alg�rie sont m�pris�s ou presque. Ce sont des �uvres dont les auteurs sont couverts de lauriers � l��tranger.� (A. Rachedi in Alg�rie-Actualit�, 26.04.1969). Un tel point de vue ne pouvait que nuire fatalement � la conception �id�elle� et artistique de l��uvre cin�matographique. Rachedi, par cons�quent, au lieu de rechercher une forme d�expression originale pour relater la lutte du peuple alg�rien face � l�une des plus grandes puissances militaires au monde, privil�giera la voie du spectacle et de l�action, au d�triment d�une r�flexion sur cette guerre horrible et cruelle. L�adaptation � l��cran de l��uvre de Mouloud Mammeri n��tait certainement pas une chose ais�e, encore moins au plus spatial. A ce propos, la rencontre de Bachir Lazrar avec ITTO au Maroc semble une digression inutile dans la mesure ou cet �pisode ne s�inscrit pas dans une continuit� dramaturgique qui vient renforcer le th�me principal du roman, � savoir la guerre de Lib�ration nationale. Qu�en pensait Mouloud Mammeri ? �Je commence d�abord par vous donner raison. Il y a deux raisons � cette digression qui est une pure technique romanesque, une esp�ce de parenth�se. La premi�re raison est personnelle. Ayant moi-m�me v�cu au Maroc, cette histoire faisait un peu partie de mon exp�rience. La deuxi�me raison, plus agr�able et plus essentielle, ce sont des interrogations sur le sens de la guerre. Il y a un sens que l�on donne � l�existence, des valeurs pour lesquelles on est pr�t � se sacrifier. Alors, dans cette histoire dure et cruelle, il fallait montrer un moment donn� qu�on ne tue pas pour tuer, mais parce qu�on a de la vie une certaine conception, une certaine vision. J�ai traduit cette vision en termes un peu l�gendaires, presque mythiques. C�est l��pisode au Maroc, qui est comme un petit il�t, une petite panse o� j�ai montr� la guerre mais aussi le sens de cette guerre. � (De l�interview que nous a accord� Mouloud Mammeri le 4 mars 1987 � Alger). Mais pourquoi avoir choisi ITTO et non pas une alg�rienne ? �Personnellement, je pense peut-�tre � tort que le Maghreb est le m�me sur le plan humain. Par ailleurs, si j�avais choisi une alg�rienne, cette histoire aurait �t� plus difficile � d�peindre car plus difficile � vivre�. (De l�interview avec M. Mammeri du 4 mars 1987 � Alger). Ahmed Rachedi a restreint utilement le champ d�action dans le film en concentrant les �v�nements dans le village de Thala, le bureau de la SAS et au maquis. C�est un choix judicieux. Mais au plan de la reconstitution des faits et des motivations psychologiques des h�ros, certains aspects positifs dans le roman prennent une tournure ambigu� dans le film. Prenons, � titre d�exemple, le personnage du h�ros principal Bachir Lazrak. Dans le roman, ce fils de paysan, apr�s des �tudes de m�decine � Paris, s�installe confortement � Alger dans un appartement cossu et vit en bonne entente avec la couche europ�enne. Ses allures de petit-bourgeois contrastent avec la dure r�alit� dans laquelle vivent ses compatriotes. Ebloui par sa r�ussite professionnelle, les �v�nements qui secouent son pays l'int�ressent peu. Mais sous l�effet d�un certain nombre de situations, il finit par comprendre que sa place dans ce conflit est du c�t� des siens. Ce cheminement psychologique vers cette prise de conscience se fait graduellement mais d�une mani�re probante. Nous apprenons m�me de diff�rentes sources que le FLN a un point de vue positif sur lui et le consid�re comme un homme de devoir. C�est pour cette raison que le colonel Amirouche fait appel � ses comp�tences pour r�organiser le service de sant� de la Wilaya III. Dans son village o� il marquera un arr�t en attendant la liaison qui l�acheminera au maquis, Bachir d�couvre les horreurs de la guerre. Thala est entour�e de barbel�s. Des postes de garde contr�lent les entr�es et sorties des villageois. Les vivres sont rationn�s par l�arm�e. La faim s�vit si fort que les enfants en pleurent jusque dans leur sommeil. La population est constamment soumise aux brimades et aux humiliations des soldats. Sous l�effet de ces pratiques inhumaines et terrifiantes, nous avons l�impression que le village s�est engourdi. Mais la r�alit� est tout autre : chaque maison bouillonne de vie. Les gens de Thala ne fl�chissent pas, ils r�sistent. C�est durant ces journ�es pass�es aupr�s des siens que le docteur Lazrak prend conscience de la r�alit� effroyable dans laquelle vivent les gens de Thala et du devoir � accomplir. Dans le film, cette analyse est �lud�e au profit de l�action et du spectacle. Bachir Lazrak n�appara�t � l��cran que pour nous introduire au c�ur des �v�nements qui se d�roulent dans son village. Pourtant la place que lui r�serve Ahmed Rachedi dans le pr�-g�n�rique laissait croire qu�il �tait, tout comme dans le roman, le personnage central autour duquel allaient graviter tous les �v�nements du film. Ce ne fut pas le cas. Aussi, il nous est permis d�affirmer que le r�alisateur a commis une erreur grossi�re dans la mani�re de traiter ce personnage � l��cran. Par ailleurs, ayant transpos� litt�ralement � l��cran certains �v�nements et dialogues du roman sans les adapter pour la version cin�matographique, Rachedi a d�natur� certains faits. Par exemple, ce qui pousse Bachir dans le film � rejoindre le maquis c�est la peur. Il fuit d�abord Alger lorsque Arezki est arr�t�, puis Thala quand son fr�re Bela�d l�informe que Ramdane venait de subir le m�me sort dans la capitale. Il quitte pr�cipitamment son village avant m�me d�avoir pris conscience de l�ampleur des horreurs commises par l�arm�e coloniale. Une fois au maquis, il se fond dans la masse des combattants. Quant aux �v�nements qui viendront apr�s, ils n�auront aucun lien direct avec ce h�ros. Il est vrai que le temps de projection ne permettrait pas de reprendre en d�tail les particularit�s des personnages ni de relater toutes les lignes narratives du roman. Cependant, ce temps de projection n��tait pas �triqu� au point d�emp�cher Rachedi de pr�senter ses h�ros d�une mani�re attrayante et d�ins�rer dans le personnage de Bachir un ou deux �l�ments qui auraient maintenu � l��cran les qualit�s av�r�es du h�ros de l��uvre de Mouloud Mammeri. Cette reproduction inexacte et superficielle du docteur Lazrak a non seulement d�personnalis� ce personnage mais a engendr� un ph�nom�ne inattendu pour la couche sociale qu�il est cens� repr�senter � savoir l�intelligentsia. En effet, les images que nous renvoie l��cran laissent supposer que les intellectuels alg�riens ont rejoint la r�volution soit par peur soit par force. Quel est l�avis de Mouloud Mammeri � ce sujet : �Je ne parlerai que du roman. Moi je voulais �crire un roman, des faits qui soient le plus fid�les � la r�alit� �vraie� et non pas � la r�alit� �vraie� et non pas la r�alit� reconstruite id�ologiquement apr�s l�ind�pendance. En tant qu��crivain, j�ai refus� de faire la d�monstration d�une th�se politique. Je sais tr�s bien qu�apr�s 33 ans, on a fabriqu� toute une saga de la guerre de Lib�ration. Plus on s��loigne des �v�nements, plus ils deviennent distanci�s. Tous les peuples sont pass�s par l�. Le pass� est tritur� car il devient un argument pour fa�onner le pr�sent que l�on veut. Est-ce qu�on �crit pour l�efficacit� politique ? Moi, je me suis refus� de faire une �uvre d�monstrative. Au contraire, je me suis astreint � montrer les �v�nements tels qu�ils se sont pass�s. Le docteur Lazrak n�est pas le repr�sentant d�une classe ni dans le film ni dans le roman. On peut tr�s bien pr�senter un individu qui ne soit pas sch�matiquement r�duit � sa couche sociale. Balzac a b�ti ses romans sur �a. En parlant du roman, je trouve que Bachir fait preuve d�honn�tet� intellectuelle � laquelle je rends hommage car cet homme aurait pu faire comme tant de gens qui ont rejoint le combat par peur ou par convenance. Entre 1954 et 1956, ce genre de type �tait tr�s fr�quent et pas seulement dans l�intelligentsia. C�est apr�s 1956 que le peuple alg�rien a adh�r� massivement � la R�volution. Bachir est rest� honn�te car il a commenc� par se dire : �Moi, je suis bien�. Ce n�est que lorsqu�il a �t� confront� aux �v�nements qu�il a d�cid� de rejoindre le bon combat�. (De l�interview que nous a accord�e M. Mammeri le 4 mars 1987). A la m�me question, Rachedi, r�pond par contre d�une mani�re laconique : �Il y avait d�autres intellectuels au maquis.� (Interview avec A. Rachedi, du 17 mars 1987). Au maquis oui, mais dans le film non. Bachir �tait l�unique. S�il y en avait d�autres, ils sont rest�s derri�re l��cran. A notre avis, cette image superficielle de Bachir Lazrak dans le film est dues en partie � l�acteur choisi pour interpr�ter ce r�le. Mustapha Kateb, puisque c�est de lui qu�il s�agit, ne convenait ni int�rieurement ni ext�rieurement, pour ce personnage. Entre deux �ges, de corpulence forte, il donnait l�impression d��tre un homme accompli, loin des vicissitudes de la vie. Son visage respire l�opulence. Quant � l�ardeur juv�nile, ce n��tait qu�un lointain souvenir. Dans le roman de Bachir Lazrak est jeune. Il est en pleine possession de ses forces. Il n�a que trente ans. Il d�sire vivre et aimer. Son jeune �ge et son retour r�cent en Alg�rie peuvent expliquer son d�tachement momentan� vis-�-vis des �v�nements qui secouent son pays. Cependant, dans l��uvre de Mouloud Mammeri, Bachir n�est pas d�nu� de qualit�s. C�est pourquoi d�ailleurs Arezki venu demander son aide lui lance cette phrase significative : �Le professeur a dit le docteur Lazrak ne reculera pas devant son devoir de m�decin... et d�Alg�rien.� Cette phrase est capitale pour saisir le sens de la conversation qui se d�roulera plus tard � Thala entre le capitaine de la SAS et le docteur Lazrak, lorsque par pr�caution ce dernier dira � son interlocuteur : �Je ne crois pas en la m�decine, mais les autres y croient, il faut bien leur en donner pour leur argent.� Reprise textuellement dans le film, sans la faire pr�c�der des propos d�Arezki, cette phrase est per�ue au sens strict des mots. Quoi d��tonnant alors que ce m�decin aux allures de petit bourgeois, emp�t� et lourd, sans mouvement d��me, parlant d�une voix monocorde, puisse en fait penser ainsi. Rien ne le trouble, m�me pas son retour dans la maison natale qu�il n�a pas revue depuis dix ans. Aussi, si les propos et le comportement typiques du h�ros de trente ans dans le roman peuvent sembler justifi�s, par contre chez un homme qui a largement d�pass� la quarantaine dans le film, ils deviennent douteux. Mustapha Kateb a mal interpr�t� la sc�ne des retrouvailles avec sa m�re et sa s�ur Farroudja. Dans la maison o� il est n�, la faim s�vissait effroyablement. Cette situation Bachir l�ignorait totalement. Il propose de l�argent � sa m�re qui r�torque qu�� Thala, il n��tait d�aucun secours : �L�arm�e a tout rationn�.� Face � ces r�v�lations dures et am�res, Bachir est rest� impassible. Cette s�quence d�une charge psychologique intense devait, � notre avis, servir d�exposition au film, nous �difier sur les atrocit�s de la guerre endur�es par tout un village et provoquer le d�grisement chez ce h�ros. Mais comme la discussion entre la m�re et Bachir a pris un caract�re purement formel, nous avons l�impression que l�atmosph�re �prouvante dans laquelle vit cette famille est provoqu�e par la faim et non par les horreurs de la guerre. Aussi, ce qui dans le roman est ressenti et v�cu comme une trag�die, dans le film, il prend la forme d�un m�lodrame ordinaire. Peut-on imputer cet �chec � Mustapha Kateb quand nous savons que dans toute cr�ation cin�matographique le r�alisateur est le �ma�tre d��uvre�. Il dirige tout le staff artistique et technique. A notre avis, Rachedi pris d�engouement pour l�exotisme et le pittoresque a pr�f�r� dans la dure r�alit� de la sc�ne des retrouvailles, mettre en avant les couleurs chatoyantes des robes et des foulards des h�ro�nes, leurs parures d�argent, les objets � usage domestique, enfin toute une bizarrure inopportune dans un moment aussi dramatique. Ce choix a rel�gu� en arri�re-plan les souffrances endur�es par cette famille et les menaces qui p�sent sur elle. La beaut� envo�tante des sites de Kabylie emp�chera plus d�une fois le metteur en sc�ne de recr�er l�atmosph�re de danger permanent qui guette la population. C�est pourquoi l��pisode o� les soldats dynamitaient les oliviers par repr�sailles aux habitants de Thala qui refusaient de trahir les leurs, prenait plus l�allure d�un spectacle que d�un acte tragique, d�autant que nous savons que cette population puise essentiellement ses ressources de cet arbre ancestral. Quant aux combats qui opposent les moudjahidine aux soldats fran�ais, agr�ment�s de s�quences de corps-�- corps spectaculaires, film�s sur le fond de cette belle nature, donnaient l�impression d��tre une reproduction fid�le des films hollywoodiens de ce genre. A notre avis, ni le metteur en sc�ne ni le chef op�rateur ne se sont souci�s de faire endosser une charge dramaturgique au milieu ambiant dans lequel �voluaient les personnages. Aussi, nous avons l�impression que Rachedi et le chef op�rateur filmaient la nature pour ce qu�elle repr�sentait de beau, sans l�int�grer comme �l�ment dramaturgique. Dans le roman, par contre, la nature n�a pas une fonction illustrative. Mouloud Mammeri s�en sert comme un contrepoint qui accentue l�hymne � la vie et rend plus significatif le combat des moudjahidine. Les paysages et les �v�nements forment un tout harmonieux et coh�rent. Comme nous l�avons d�j� signal�, le docteur Lazrak qui appara�t au d�but du film dispara�t comme par enchantement dans la deuxi�me partie. En fuyant Thala vers le poste de commandement de la Wilaya III, on le voit porter en bandouli�re une mitraillette. Cette image inattendue fait perdre � cette s�quence sa cr�dibilit� et sa vraisemblance. En effet, nul n�ignore que les maquis souffraient d�un manque cruel d�armes. Des moudjahidine de la premi�re heure continuaient � braver l�ennemi avec de simples fusils de chasse. Comment donc, cette nouvelle recrue, destin�e de surcro�t au service de sant� de la Wilaya III, at- elle pu b�n�ficier g�n�reusement d�une arme automatique avant m�me d�avoir endoss� la tenue de combat ? Avec l��clipse de Bachir, le film prend le caract�re d�une chronique sur la guerre. Les actions sont alors transpos�es tant�t au village, tant�t dans les bureaux de la SAS ou au maquis, sans que ces parties ne soient reli�es entre elles par des proc�d�s cin�matographiques ad�quats. Aussi devant cette conception �clectique du film, nous avons l�impression que les actes de bravoure des moudjahidine affrontant un ennemi sup�rieur en nombre et dot� d�un arsenal de guerre d�une des plus grandes puissances militaires au monde prenaient la tournure de simples combats entre deux bandes rivales. Les id�es forces du roman s��clipsent dans le film pour c�der la place � des descriptions de sc�nes de batailles. Nous assistons alors � un d�fil� de tableaux sur la guerre qui se juxtaposent sans s�imbriquer. Evidemment, une telle d�marche ne pouvait que rompre l�homog�n�it� conceptuelle de l��uvre cin�matographique et rendre imperceptible la relation existante entre la population et les moudjahidine. Pourquoi Rachedi a-t-il trait� sommairement le personnage de Bachir � l��cran : �Celui-ci n�est pas le personnage central dans le film. Le h�ros c�est le village.� Ce refus d�utiliser un h�ros central dans l�Opium et le B�ton n��tait pas un fait nouveau dans le cin�ma alg�rien. En effet, nos r�alisateurs pour mettre en �vidence le caract�re authentiquement national de la R�volution, pr�f�raient mettre l�accent sur le peuple plut�t que sur des h�ros individuels. Pourtant, dans le roman s�ouvre � nous toute une galerie de personnages int�ressants, repr�sentant des forces antagoniques. Il y a ceux qui ont �pous� la R�volution et ceux qui l�ont combattue. Mouloud Mammeri les a d�peints minutieusement. Les personnages des trois fr�res Lazrak n��chappent pas � cette rigueur. Le jeune Ali (interpr�t� par Sid Ali Kouiret) a rejoint d�embl�e la R�volution. Le docteur Lazrak, apr�s quelques h�sitations, a choisi lui aussi le bon combat. Quant � Bela�d (interpr�t� par Abdelkader Safiri), fr�re a�n� des Lazrak et ancien �migr� que les d�boires de la vie ont pouss� � la boisson, il passait ses journ�es dans la buvette de la SAS. Ha�, m�pris� et rejet� par les habitants de Thala qui le consid�raient comme un tra�tre, Bela�d, en r�alit�, est rest� fid�le � son peuple et � la R�volution. Ces trois personnages dont les motivations psychologiques sont diff�rentes, n�ont pas, h�las, b�n�fici� dans le film de traitements aussi �loquents que dans le roman. Ils sont rest�s � l��tat d�esquisses. Les seuls moments o� les particularit�s psychologiques sont bien mises en valeur, c�est lorsqu�on retrouve ensemble Ali et le soldat fran�ais, Georges, interpr�t� par Jean-Louis Trintignant. Fait prisonnier apr�s un dur combat, Ali attend avec r�signation le lever du jour qui le conduira au supplice et fatalement � son ex�cution. Soudain, devant lui et le soldat charg� de sa surveillance, se d�roule une sc�ne horrible : des militaires balancent d�une h�licopt�re son fr�re d�armes Omar, arr�t� en m�me temps que lui. Au moment o� Omar, transform� en loque humaine par ses tortionnaires, montait dans l�h�licopt�re, Georges disait � Ali : �Tu vois, vous nous tuez et nous, on vous paie des voyages � l��il. Dix jours d�h�pital et il sera r�tabli.� Ce soldat, vraisemblablement depuis peu en Alg�rie, obnubil� par la propagande coloniale, ne pouvait s�imaginer que l�arm�e fran�aise qui repr�sentait � ses yeux un id�al de justice et d�humanisme, pouvait commettre un tel acte barbare. Cette sc�ne l��branla profond�ment. Apr�s un moment d�h�sitation, il propose � son prisonnier de s�enfuir. Pensant � un pi�ge, Ali refuse. Mais l�insistance du soldat chassa le doute et Ali d�campa � toutes jambes. Au bout de quelques instants, Georges r�alisant la gravit� de son acte, ramasse son paquetage et se lance � la poursuite d�Ali. D�s qu�il l�aper�oit, il lui crie d�sesp�r�ment de l�attendre : �Arr�te ! Emm�nes-moi chez tes copains, j�en ai marre de tout �a...�. Au d�but un climat de m�fiance s�installe entre les deux hommes, obligeant chacun � rester sur ses gardes. Puis, Georges voulant prouver sa bonne foi, d�cide de remettre � Ali tous les chargeurs en sa possession y compris celui engag� dans sa mitraillette. Ce geste rassura Ali qui esquissa un sourire. Mais le moment path�tique dans cet �pisode c�est lorsque le soldat, dans un �lan de solidarit�, jeta la derni�re bo�te de corned-beef que son compagnon a refus�e de partager avec lui, croyant que c��tait du porc : �Maintenant on a plus qu�� crever de faim�, s��cria Georges. Emu, Ali r�v�la � Georges que le poste de commandement de la Wilaya III �tait tout pr�s. Cet �pisode a �t� con�u et r�alis� avec une grande sensibilit� d�artiste. Rachedi a su nous transmettre la profondeur humaine de deux hommes que la guerre a mis face � face. Malgr� le juste combat de l�un et la participation � une guerre d�oppression par l�autre, les deux protagonistes ont su en ces moments complexes et difficiles transcender leur position pour privil�gier la beaut� des actes humains. Ce passage, � notre avis, r�sonne aussi bien dans le roman que dans le film, comme un hommage aux jeunes du contingent qui avant d�embarquer en France � destination de l�Alg�rie ont manifest� leur d�sapprobation pour cette guerre. Il se veut aussi un hommage aux Fran�ais qui ont d�nonc� courageusement la torture qui s�y pratiquait, sachant pertinemment que leur action allait provoquer le courroux des gouvernants de l��poque. Parmi ceux qui ont fait les frais d�une telle bravoure se trouvait le g�n�ral Jacques Paris de Bollardi�re. En effet, ce grand officier de l�arm�e fran�aise rentra � Paris le 28 mars 1957 pour demander � �tre relev� de son commandement en Alg�rie car il d�savouait les m�thodes de son chef hi�rarchique, le g�n�ral Massu, nomm� depuis le 7 janvier 1957 au commandement du Grand Alger. Le g�n�ral de Bollardi�re refusait de cautionner la pratique de la torture et le massacre odieux de prisonniers alg�riens. La r�action fut imm�diate : le 15 avril 1957, il a �t� mis aux arr�ts de forteresse. Il est certain que la r�ussite de cette s�quence est due en partie � Jean-Louis Trintignant qui a su recr�er � l��cran un personnage d�une profondeur psychologique remarquable. Il a su s�duire et gagner la sympathie du public en reproduisant d�une mani�re convaincante les qualit�s humaines et exceptionnelles de son h�ros. Malgr� la place restreinte qu�il occupe dans le film, il demeure dans l��uvre de Rachedi le personnage le plus int�ressant et le plus marquant. Lorsque avec Ali il arrive au poste de commandement de la Wilaya III, il est tout simplement subjuguant. Dans cet �pisode, les moudjahidine accueillent avec joie leur fr�re de combat. Quant au soldat, adoss� � une paroi, d�contenanc� par ces retrouvailles chaleureuses auxquelles il n��tait pas associ�, son visage laissait trahir un sentiment de g�ne, de honte et de peur d��tre tax� de l�che. Soudain, cette crainte s�estompa : un moudjahid lui tend la main, Ali l�invite � partager le repas des combattants, quant au docteur Lazrak, il l�informa que la guerre est finie pour lui. Il partira avec le premier convoi aux fronti�res. De l��tat d�homme inquiet � celui d�un �tre apais�, il n�a suffi que de quelques plans rapides pour nous transmettre ce bouleversement psychologique qui s�est op�r� en lui. Jean-Louis Trintignant a fait une prestation remarquable dans ce film. Rien d��tonnant, dirions-nous, de la part d�un professionnel de son envergure. Mais ce qui est fascinant, c�est qu�il a pu atteindre un degr� de cr�ativit� assez rare chez un com�dien : �Vivre la vie spirituelle d�un personnage�, pour reprendre Stanislavski. Quelques jours plus t�t, dans ce m�me poste de commandement, Si Abbas fit irruption pour instruire le docteur Lazrak de sa mission difficile au vu des moyens limit�s dont dispose le service de sant� de la Wilaya III. Mustapha Bellil, acteur non professionnel, a su en l�espace d�une apparition furtive, nous transmettre l�allure imposante de ce h�ros et mettre en �vidence ses rapports simples et cordiaux avec les djounoud. Cependant, dans le roman, ce h�ros s�appelle Amirouche. Pourquoi donc Rachedi a pr�f�r� lui substituer le nom de Abbas ? : �Le film n�est pas localis� dans l�espace. C�est un microcosme qu�on peut situer dans n�importe quelle wilaya. Le d�coupage du territoire national en wilayate a �t� impos� par l�histoire, il n�y a pas lieu de l�accepter comme un d�coupage ethnique. C�est un personnage choisi sur le mod�le de Amirouche, mais c�est plut�t un hommage aux martyrs anonymes. Pour cela, je n�ai pas voulu faire une identification au premier degr�. (De l�interview que nous a accord�e Rachedi le 17/03/1987). Nous sommes tout � fait d�accord quand Rachedi affirme que le d�coupage du territoire national en wilayate ne peut �tre accept� comme un d�coupage � caract�re ethnique. Seulement, en d�clarant ce qui pr�c�de, ce dernier semble oublier que l�une de r�gles essentielles en adaptant un roman pour l��cran consiste � reproduire avec un maximum de fid�lit� les particularit�s de l��uvre litt�raire. Certes, un r�alisateur est libre d�apporter les modifications qu�il juge utiles aux situations pr�sent�es dans un roman, mais dans le but exclusif d�am�liorer le contenu dramaturgique du sc�nario. Rachedi s�est-il seulement inspir� du roman ou l�a-t-il transpos� � l��cran ? En d�clarant que �le film n�est pas localis� dans l�espace, c�est un microcosme qu�on peut situer dans n�importe quelle wilaya�, celui-ci semble ignorer que l�art ne peut s'accommoder d�aucune forme de standardisation. Chaque individu, chaque objet poss�de des traits particuliers qui lui sont propres. Et par d�finition nous savons aussi que le g�n�ral n�existe qu�� travers le particulier. Quant aux donn�es historiques, elles ne doivent faire l�objet d�aucune alt�ration, quand bien m�me il s�agirait d�un film de fiction o� une part de subjectivit� est tol�r�e comme dans toute cr�ation artistique. Mais cette part de libert� que s�octroie l�artiste ne doit nullement r�pondre � des caprices personnels. Elle doit �tre soumise aux lois de la cr�ation artistique et refl�ter n�cessairement une r�alit� objective qui, dans le cas du film, se veut la r�alit� historique. La question demeure donc toujours pos�e : pourquoi le r�alisateur a substitu� le nom de Abbas � celui de Amirouche ? Car, et quels que soient les arguments peu convaincants avanc�s par Rachedi, les p�rip�ties de son film se d�roulent bel et bien en Kabylie, ne serait-ce que pour les raisons ci-apr�s : 1- Le village dans le film s�appelle Thala, tout comme dans le roman. Son architecture est typique des villages de Kabylie. 2- Les noms des h�ros et des h�ro�nes sont aussi maintenus tels quels dans le film et leur consonance nous rappelle fort bien ceux en usage dans cette r�gion. 3- Enfin, les costumes des personnages, notamment ceux des h�ro�nes, �voquent avec force les v�tements port�s par les gens de Kabylie. Le seul point dans le film en d�calage flagrant avec la r�alit� des sites, les us et coutumes de la r�gion, la v�rit� historique, est celui de la langue. Cependant, n'ignorant pas le monolithisme linguistique qui r�gnait alors, nous ne pouvons que comprendre, sans le justifier, le choix de l�arabe. En effet, des d�cennies durant, certains responsables frapp�s d�une myopie politique aigu�, ne pouvaient concevoir l�unit� nationale en dehors d�une certaine uniformisation de notre mode de pens�e et de notre univers socioculturel. N�est-ce pas pour ces raisons que Abderrahmane Bouguermouh a attendu 15 longues ann�es, jalonn�es de lutte et d�espoir, pour obtenir l�autorisation de r�aliser enfin La colline oubli�e dans la langue maternelle de Mouloud Mammeri ? A notre avis, la seule r�ponse plausible � notre question sur le changement de nom aurait �t� de dire que ce symbole de notre r�volution, le colonel Amirouche, m�rite qu�on lui consacre tout un film � sa gloire. Une apparition furtive � l��cran ne pouvait restituer toute la grandeur et la personnalit� exceptionnelle de ce r�volutionnaire qui a marqu� avec force l�histoire de notre guerre de Lib�ration nationale. Mouloud Mammeri, que pensait-il de ce changement de nom ? : �Je n�ai pas �crit un roman sur Amirouche mais sur la r�sistance du peuple alg�rien. C�est pourquoi j�ai accept�, bien qu�� contre c�ur, que le nom de Amirouche soit chang�, mais changer le nom d�Akli par celui de Bouguelb, je n��tais pas d�accord�. (De l�interview qu�il nous a accord� le 04/03/1987). Sid-Ali Kouiret a fait une prestation louable dans cet �pisode. Il a subi d��vidence l�influence de Jean-Louis Trintignant qui l�a drain� dans le sillage de son professionnalisme. Ce qui nous rappelle un des principes du �syst�me� de Stanislavski qui �nonce dans sa th�orie sur �La formation de l'acteur� que �le com�dien d�pend de son partenaire�. Mais dans l��pisode final o� Ali est au centre d��v�nements lourds de cons�quences, son jeu versait par moment dans le �m�lodramatisme�. En effet, de nouveau prisonnier, Ali savait cette fois-ci que son sort est scell� et qu�il n��chappera plus � son destin. Cette situation suffisait pleinement pour nous transmettre toute la tension des imminences graves. Mais Kouiret emport� par le contexte accentuait son jeu, pensant qu�ainsi il transmettrait �mieux� l��tat d��me d�un homme qu�on allait ex�cuter. Mais si en math�matiques plus devant plus donne plus, en art dramatique, lorsque le sens de la mesure n�est plus ma�tris�, l�effet devient contraire. Il est �vident que Sid-Ali Kouiret jouait intuitivement, sans s�appuyer sur les proc�d�s psychologiques qui font na�tre chez le com�dien �l��tat cr�ateur�. Mais lorsque l�intuition est d�brid�e, le jeu s�emballe et devient artificiel ou, pour reprendre l�expression d�Anton Tchekhov lorsqu�il n��tait pas satisfait de l�interpr�tation de ses pi�ces par le Th��tre artistique de Moscou : �Les com�diens jouaient trop.� Si le choix de Jean- Louis Trintignant pour jouer le r�le du soldat fran�ais est fond�, par contre l�invitation lanc�e � Marie-Jos�e Nat pour interpr�ter le r�le d�une femme kabyle (bien que la ressemblance physique existe) peut para�tre non fond�e. Ce r�le presque sans dialogue et sans charge psychologique importante �tait � la port�e de n�importe quelle actrice alg�rienne. Rachedi, quant � lui, justifie son choix : �Le choix d�un com�dien est toujours subjectif. Mais dans le cas de ce film, l�int�r�t commercial m�obligeait � faire appel � des t�tes d�affiche�. (De l�interview qu�il nous a accord� le 17/03/1987). Dans le film, Rachedi a fusionn� deux destin�es celle de Farroudja et celle de Tassadit, �pouse de Omar et agent de liaison dans le secteur de Thala. Dans le roman, apr�s l�assassinat de son mari par les soldats fran�ais, Tassadit est rest�e seule avec son enfant, sans aucune protection. Tayeb (un tra�tre interpr�t� par Rouiched), la soup�onnant de travailler pour le FLN, lui fait subir d�horribles tortures pour lui arracher des informations sur l�emplacement des caches des moudjahidine. Tassadit r�siste sto�quement aux s�vices de Tayeb. Mais ce serviteur z�l� de la SAS, pour la faire parler, d�cide de s�questrer son enfant. Alors, folle de douleur, Tassadit perd la raison et commet l�irr�parable. Dans le film, Farroudja n�est pas une militante active de la r�volution. Ce qu�elle endure comme souffrances n�est pas comparable � ce que subit Tassadit dans le roman. Ses aveux ne lui sont pas arrach�s par la torture, ni dans un moment d��garement. Elle les a fait � Tayeb chez lui, dans sa maison, en �change de son fils, uniquement. L�alt�ration des mobiles psychologiques a d�natur� le personnage de Farroudja. Par cons�quent, si la douleur et la folie de Tassadit peuvent susciter la compassion du public, par contre l�acte commis d�lib�r�ment par Farroudja pour r�cup�rer son fils ne peut pr�tendre � aucune indulgence de sa part. Celui-ci consid�re que cette femme de surcro�t saine d�esprit a trahi les siens, car d�autres m�res, au m�me moment, assistaient sto�quement � l�immolation de leurs enfants sans broncher ni fl�chir. Pourtant, il aurait suffi de montrer chez Farroudja l��volution psychologique vers cet acte regrettable, pour que celle-ci soit lav�e de ce travers. Dans ce film, Marie-Jos�e Nat n�a pas eu un r�le � la hauteur de son talent. Son personnage est d�une telle platitude que, malgr� ses capacit�s de com�dienne, elle n�a pu lui conf�rer une quelconque originalit�. Elle �tait ainsi presque r�duite � une simple pr�sence physique devant la cam�ra. Certes, elle jouait juste les circonstances propos�es, mais ce r�sultat qui ne nous �tonne pas est d� � une parfaite ma�trise par l�actrice des techniques de �l�art de la repr�sentation� o� les effets ext�reurs remplacent la vraisemblance des sentiments. Aussi, lors des diff�rentes projections du film, nous avions l�impression que le public �tait plus fascin� par la star que par le personnage qu�elle incarnait. Pourquoi le trait de folie, �l�ment important dans le personnage de Tassadit, dispara�t dans celui de Farroudja ? Rachedi s�explique : �Il est vrai que dans le film le trait de folie n�est pas perceptible chez Farroudja, cette s�quence ayant �t� mal r�gl�e. Mais il y a peut-�tre une volont� d�lib�r�e de faire admettre l�id�e d�une trahison. Les hommes sont avant tout des �tres humains.� (De l�interview que nous a accord� Rachedi le 17 mars 1987). Il est vrai que les hommes sont avant tout des �tres humains. Ils sont courageux ou l�ches, patriotes ou tra�tres. Mais ce que nous reprochons � Rachedi, c�est de n�avoir pas choisi r�solument un camp pour Farroudja. Cette demi-mesure a trahi l�esprit du personnage de Tassadit et n�a pas sauv� l��me de Farroudja. Rachedi en fusionnant les personnages des deux h�ro�nes du roman, sans tenir compte des particularit�s psychologiques de l�une et de l�autre a obtenu un condens� qui fait de Farroudja l�antith�se de Tassadit. A notre avis, le personnage de Farroudja �tant le seul r�le f�minin important dans le film, le r�alisateur aurait d� nous montrer � travers cette h�ro�ne l�image vraie et dominante de la femme alg�rienne durant la guerre de Lib�ration nationale. En faire le symbole de la femme alg�rienne engag�e dans le combat lib�rateur. Un autre personnage qui, malheureusement, n�a pas b�n�fici� � l��cran d�une transposition ad�quate est celui de Tayeb, interpr�t� par Rouiched. Ce personnage de tra�tre est camp� d�une mani�re caricaturale. Il v�hicule cette signification de �tous� plut�t que de �lui�. Il pr�tend �tre typique sans pour autant �tre particulier. Pourtant, Mouloud Mammeri le pr�sente fort bien. Il en donne une caract�ristique si pr�cise et si d�taill�e que sa reconstitution � l��cran aurait d� se faire sans difficult�. Jugez-en vous m�mes. Aigri par sa condition sociale qui le place en �tat d'inf�riorit� par rapport aux gens de son village, humili� et m�pris� par les siens, devenu la ris�e de tous, Tayeb n�h�site pas pour se venger � rejoindre les forces du mal. Son ressentiment, il l�exprimera avec violence, cruaut� et sadisme. Son �pouse indign�e par son comportement et sa position �d�ennemi des musulmans� bougonne sa col�re et le qualifie de gueux. Le capitaine de la SAS, malgr� la servilit� inconditionnelle de cet �nergum�ne, le traite avec m�pris. D�ailleurs, au moment de commencer le pilonnage de Thala, Tayeb lui demande si sa maison allait �tre �pargn�e : �Bien quoi ? Tu es de Thala toi aussi, non ?� r�pond s�chement et avec d�dain l�officier. Tous ces �l�ments constitutifs de la personnalit� de Tayeb du roman n�ont pas trouv� place dans le personnage au destin tragique du film. Vid� de sa substance, il est devenu sch�matique, astreignant Rouiched � un jeu bas� sur des clich�s. Comme cons�quences, certaines situations comiques dans le film prenaient parfois une tournure de bouffonneries et le s�rieux perdait de son effet dramatique. Les seuls moments o� Rouiched a bien mis en �vidence son talent d�acteur, c�est lorsque les villageois entonn�rent �Allahou akbar� apr�s l�assassinat d�Ali par les soldats. Cette �vocation r�p�t�e de Dieu r�sonnait chez Tayeb comme une sentence pr�monitoire. A partir de ce moment, une m�tamorphose s�est op�r�e dans le jeu de l�acteur. Il paraissait meurtri dans son �me, hant� par le remords et le pardon qu�il ne pouvait esp�rer de personne. Le visage hagard, il �tait devenu soudain fragile et vuln�rable. Il prit enfin conscience qu�il �tait absolument seul, rejet� par tout le monde, y compris par ceux aupr�s de qui il esp�rait trouver refuge. Eux aussi l�ont abandonn�. C�est le sort que l�on r�serve aux tra�tres dont on a plus besoin et qui risquent de devenir encombrants plus tard. Tayeb a compris que son existence n�avait plus de sens. Autour de lui, c�est le vide. M�me les saints de son village l�ont maudit et lanc� l�anath�me contre lui. Il mourra comme un ren�gat, enseveli sous les d�combres des maisons de Thala, sans s�pulture ni Fatiha. Dans ce passage, Rouiched a �t� sublime. La r�partition ad�quate des forces dramaturgiques dans cette s�quence et la forte tension dramatique dont sont impr�gn�s les �v�nements ont permis � Rouiched de mener la trag�die � son paroxysme. Dans son ensemble, la version cin�matographique de l�Opium et le B�tonn�est pas une adaptation tout � fait r�ussie. Ce film p�che essentiellement par une d�marche dramaturgique simpliste, une direction d�acteurs peu ma�tris�e et un montage qui laisse � d�sirer. A propos de cette derni�re remarque, il fait rappeler que le montage du film a �t� confi� au Fran�ais Eric Pluet. Ahmed Rachedi, s��tant fi� exag�r�ment au professionnalisme de ce technicien, n�a pas jug� apparemment utile de suivre de pr�s cette phase d�cisive dans l'�laboration d�un film. En effet, en choisissant, en disposant des fragments de pellicules film�s s�par�ment, nous cherchons la forme la plus ad�quate pour exprimer les id�es d�une �uvre cin�matographique. Le montage est �le fondement esth�tique d�un film�, disait Vsevolod Poudovkine. Par cons�quent, la mani�re dont sont dispos�es les derni�res s�quences dans l�Opium et le B�tonconf�re � l��uvre de Rachedi une fin teint�e de pessimisme. En effet, dans la derni�re partie du film, nous assistons � des �v�nements tragiques : Ali est froidement abattu par les soldats devant les siens. Son fr�re Bela�d apr�s un acte h�ro�que subit le m�me sort. Quant � Bouguelb (interpr�t� par Abdel Halim Ra�s), il meurt en h�ros, entra�nant sous son �treinte le capitaine de la SAS � l�int�rieur de la poudri�re qu�il fait exploser. La d�flagration arrache du m�t le drapeau fran�ais qui s��l�ve dans le ciel. Ce cadre tel qu�il est pr�sent� � l��cran n�est pas d�nu� d�une symbolique, car juste apr�s, la cam�ra nous fait d�couvrir le village de Thala totalement an�anti par l�arm�e coloniale. S�agissant des derniers plans d�une histoire tragique, cet �pisode pris dans le contexte des actions pr�c�dentes peut insinuer � travers la destin�e apocalyptique de Thala l��crasement de la R�volution. Dans La Bataille d�Alger, nous nous retrouvons devant une situation similaire apr�s l�arrestation de Yacef Sa�di, chef de la zone autonome, et l�assassinat d�Ali la Pointe et de ses compagnons. Cependant, afin d��viter toute �quivoque sur l�issue de la guerre, Gillo Pontecorvo ins�ra judicieusement des s�quences sur les manifestations du 11 d�cembre 1960 durant lesquelles le peuple alg�rien est sorti massivement dans les rues pur clamer son droit � l�ind�pendance. Ces �v�nements, magistralement reconstitu�s par le r�alisateur, sont suivis d�un commentaire qui renseigne, sans ambages, sur le d�nouement de la guerre. Il est dit ceci : �Deux ann�es de lutte devaient encore passer et le 2 juillet 1962, avec l�ind�pendance naquit la nation alg�rienne.� l�Opium et le B�ton a �t� qualifi� en son temps par la presse nationale de �western alg�rien �. En effet, les p�rip�ties du film, la r�partition des forces dramaturgiques, les portraits des h�ros, tout nous rappelle la stylistique des films am�ricains de ce genre. N�anmoins, cette affirmation peut sembler exag�r�e, mais elle s�expliquerait par le fait que le r�alisateur, au lieu de d�velopper une r�flexion sur le combat du peuple alg�rien pour son ind�pendance, a pr�f�r� faire palpiter le c�ur du public en utilisant des effets cin�matographiques captivants : �clats d�armes blanches, murmures des eaux de rivi�res, combats film�s sur le fond d�une nature envo�tante, enfin tous les ingr�dients propres au genre. Et Mouloud Mammeri qu�en pensait-il ? �Apr�s avoir visionn� le film, j�ai eu cette remarque amicale pour Rachedi : tu as fait un western.� (De l�interview que nous accord� M. Mammeri le 04/03/1987). Il est certain qu�en adaptant pour l��cran le roman de Mouloud Mammeri, Rachedi s��tait fix� comme objectif de r�aliser un film � la gloire du peuple alg�rien. Mais cette noble intention n�a pas trouv� sa pleine expression dans le film pour 3 raisons essentielles : 1- Un film ne se fait pas avec des sentiments mais avec la force des plans. Plus la r�alit� d�un �v�nement est relat�e d�une mani�re concr�te, les traits individuels sont exacts, plus l�image devient forte et convaincante. 2- Rachedi n�a pas su reproduire dans le film ce qu�il y avait de pr�cieux et de profond dans l��uvre litt�raire. 3- Il n�est pas parvenu � faire plier les mat�riaux en sa possession aux exigences de ses nobles intentions, g�n� manifestement par la fronti�re qu�il n�a pu �tablir entre l�art et l�artifice. Il est �vident qu�il est difficile d�exprimer une �uvre d�art en utilisant les moyens d�un autre art. Cependant, lorsque les lois �tablies en mati�re d�adaptation sont respect�es et que le r�alisateur ma�trise parfaitement les moyens d�expression cin�matographiques, le r�sultat ne peut �tre que probant. A titre d�exemples, nous rappellerons certaines versions du cin�ma mondial qui sont des chefs d��uvre. Il s�agit, entre autres, de Guerre et paix de Serge Bondartchouk, d�apr�s Tosto�. Le Rouge et le noir de Claude Autant- Lara, d�apr�s Stendhal. Le Guepardde Luchino Visconti, d�apr�s Tomas. A la fin de l�interview, Rachedi nous a fait cette confidence : �Il y avait plusieurs points faibles dans le film. Le plus important concerne le choix des acteurs. Aujourd�hui, avec le recul, j�aurais certainement fait un autre film, car j�aurais fait une autre lecture du roman.� (De l�interview que nous a accord� A. Rachedi le 17/03/1987). Toutefois, il est n�cessaire de pr�ciser que l�Opium et le B�ton�tait le premier long m�trage de fiction de Rachedi. Son manque d�exp�rience � l��poque l�a emp�ch� d�utiliser des d�tails cin�matographiques significatifs et de bien concevoir les �pisodes de son film. N�anmoins, il faut reconna�tre deux m�rites � cette �uvre cin�matographique : primo, la litt�rature alg�rienne �tait devenue une source d�int�r�t pour nos metteurs en sc�ne. Certains n�h�siteront pas � les associer � l��criture de leurs sc�narios. Le premier � avoir tent� cette exp�rience c�est Abderrahmane Bouguermouh qui, en 1965, avait associ� Malek Haddad � l��criture du sc�nario de son film Comme une �me. Dommage que Rachedi n�ait pas sollicit� la collaboration de Mouloud Mammeri. Ce ma�tre de la plume, ma�trisant parfaitement les techniques romanesques, aurait �t� d�un apport ind�niable pour un meilleur agencement des mat�riaux du sc�nario. Secundo, l�Opium et le B�ton, contrairement � beaucoup de films alg�riens, a eu un retentissant succ�s commercial. Il a fait, selon Rachedi, 1 600 000 entr�es. Il est certain que l��uvre de Mouloud Mammeri et la pl�iade d�artistes de renom distribu�s dans le film ont contribu� � cette r�ussite. Il est incontestable que malgr� les imperfections relev�es tout au long de cette analyse, l�Opium et le B�ton d�Ahmed Rachedi demeure une �uvre cin�matographique majeure et marquante dans la filmographie alg�rienne. H.-L. A. * Dipl�m� de l�Institut du cin�ma de Moscou (V.G.I.K). Ex-directeur de la Cin�math�que alg�rienne.