De Tunis, Hassane Zerrouky Des milliers de femmes dans la rue, partis de gauche et progressistes, artistes, soci�t� civile, syndicalistes se concertent, des walis limog�s, d�autres ont fui, des responsables de la culture d�gomm�s, des journalistes de la presse du RCD se r�voltent. Les islamistes adoptent un profil bas. Samedi matin, avenue Bourguiba, terrasses de caf�s bond�es, boutiques prises d�assaut (p�riode des soldes) donnaient l�image d�un retour � la normale, quand vers dix heures, des centaines d��tudiants et de lyc�ens envahissent l�art�re pour d�noncer la r�pression. �Don�t kill�, lisait-on sur une pancarte brandie par une �tudiante. Manifestation aussit�t suivie, moins d�une heure apr�s, par une autre, autrement plus imposante, organis�e par le �Front du 14 janvier � (regroupements de sept organisations de gauche (PCOT), de nationalistes arabes et des nass�riens), scandant �Dissolution du RCD, Ghannouchi d�mission�, �A bas la r�pression� devant le minist�re de l�Int�rieur prot�g� par des militaires. La veille en effet, la place de la Casbah, o� des centaines de manifestants observaient un sit-in de jour et de nuit, avait �t� �vacu�e par la force par les forces anti-�meutes, et les tentes d�mont�es, ce qui a donn� lieu � de violents incidents, qui se sont prolong�s sur l�avenue Bourguiba, jusqu�aux environs de 20 heures. En tout cas, des partis si�geant au gouvernement � Ettajdid (communiste) et PDP de Nejib Chebbi, des avocats, ont demand� l�ouverture d�une enqu�te. Le Premier ministre, toujours contest� par une partie de la population qui exige son d�part et la dissolution du RCD, se d�fend et affirme que les autorit�s sont intervenues sur demande des riverains et des commer�ants importun�s par les manifestants ! Des milliers de femmes dans la rue Dans l�apr�s-midi, � l�appel de l�AFDT (Association des femmes d�mocrates tunisiennes) et d�autres associations, des milliers de femmes manifestaient avenue Bourguiba, scandant en arabe �Non aux id�es r�trogrades �, �Non � l�obscurantisme �, �Libert�, �galit�, dignit�, � bas la r�action�. Sur les pancartes �crites en arabe, �Ne me lib�rez pas, je m�en charge� ou �Pour une Tunisie la�que et d�mocratique� ! �On est l� pour soutenir la r�volution, pas de retour en arri�re�, dit Fatiha, jeune employ�e, allusion au statut accord� en 1956, sous l��re de Habib Bourguiba, interdisant la polygamie, autorisant le droit au divorce et � l�avortement (bien avant la France et de nombreux pays d�velopp�s). �C�est un message fort aux islamistes qui veulent remettre en cause nos droits�, assure Selma, �tudiante. Elle ne croyait pas si bien dire. Vers 17 heures, une dizaine de salafistes tente de casser la marche des femmes. �Sans Leila (�pouse de Ben Ali) vous ne serez pas l�, criaient-ils. Les femmes font face, scandent de plus belle et parviennent � les faire reculer. Leur marche se termine sans incidents. Elles exultent. �Il fallait qu�on nous entende �, assure Amel, fonctionnaire. En soir�e, nouveaux incidents dans le centre de Tunis avec intervention muscl�e de la police. Grand d�ballage et retour de Rached Ghanouchi A l�arri�re-plan, le grand d�ballage, sur la mise � sac de la Tunisie par Ben Ali et son clan, se poursuit. Pas un jour sans que la presse ne rapporte des cas d�hommes d�affaires spoli�s de force par les Trabelsi. Annonces de purges � venir afin de permettre � certains clans du RCD de se refaire une virginit� et de se maintenir au pouvoir ? �On charge Ben Ali pour sauver les meubles�, assure Djellal Zoghlami, avocat de gauche. Une chose est s�re, alors que des syndicalistes, artistes, partis continuent de se concerter en vue de donner une suite au mouvement, les autorit�s annoncent que 24 walis vont �tre limog�s, que des actions en justice vont �tre intent�es contre Ben Ali, son �pouse et son clan. A Bej�, le wali a fui. Ailleurs, sans attendre, sur la sc�ne culturelle, des responsables sont d�barqu�s par les artistes. C�est le cas du directeur du Th��tre de Tunis, Mohamed Diss, chass� de son poste, ou de Mohamed Mokdad � Gafsa. Dans la presse du RCD, la r�volte a �galement sonn�. Non, la r�volution n�est pas termin�e. Les islamistes, qui n�ont jou� aucun r�le moteur dans la r�volte qui a emport� Ben Ali, adoptent un profil bas. Pas un seul slogan islamiste n�a �t� entendu, mais des mots d�ordre la�ques et politiques. Peu ou pas de barbus dans les rangs des manifestants. Dimanche, ils �taient entre deux et trois mille personnes, au lieu du million annonc� par les �nahdhaouis�, pr�sents � l�a�roport de Tunis pour le retour de Rached Ghanouchi, le leader d�Ennahdha, lequel avait assur� dans la presse europ�enne que son mod�le est le Parti de la justice et du d�veloppement (AKP) au pouvoir en Turquie. Mieux, il a indiqu� qu�il ne se pr�senterait pas � l��lection pr�sidentielle.