Le projet d�accord sur les retraites compl�mentaires en France, boucl� et ouvert � la signature des syndicats depuis le 18 mars, n�est pas � la hauteur des difficult�s financi�res de l�Association g�n�rale des institutions de retraite des cadres (Agirc), cr��e en 1947, et de l�Association des r�gimes de retraite compl�mentaire (Arrco). Les deux r�gimes sont devenus d�ficitaires en 2009, et leurs r�serves seront �puis�es en 2023 pour l�Agirc (cadres) et en 2033 pour l�Arrco (non cadres). A l�horizon de 2030, leur d�ficit, de l�ordre de 3,6 milliards d�euros en 2011, atteindrait 117,2 milliards en l�absence de rel�vement des bornes d��ge de la retraite (60 � 62 ans pour l��ge l�gal de d�part et 65 � 67 ans pour celui de la pension sans d�cote). La r�forme des retraites de 2010, impos�e par le pr�sident Sarkozy, ram�ne ce d�ficit � 43,6 milliards, le passage � 67 ans rapportant � lui seul 23,5 milliards. Les autres mesures d��conomies n�goci�es depuis l�ouverture de la n�gociation le 25 novembre ne rapportent in fine qu�une broutille : quelques milliards. L�alignement du rendement de l�Agirc sur celui de l�Arrco en deux ans (2011-2012) renfloue les caisses de retraite compl�mentaire de 8,7 milliards. Mais leur stabilisation entre 2012 et 2015 co�te 9,1 milliards. Des �conomies sur les dotations de gestion et d�action sociale rapportent plus de 3 milliards. Le chiffrage des mesures relatives aux majorations familiales n�est pas encore connu, mais il devrait �tre de l�ordre de quelques milliards. La mensualisation des allocations de retraite compl�mentaire est ce qui rapporte le plus : 20,9 milliards � l�horizon de 2030, du fait notamment des possibilit�s de placement que l�op�ration rend possible. Sans elle, la situation serait nettement plus mauvaise. Les retrait�s sont plus nombreux et la dur�e de vie � la retraite s�allonge M�me si ces chiffrages sont affin�s dans les prochains jours, une chose est s�re : les r�gimes de retraite compl�mentaire sont fragilis�s par la non-augmentation de leurs ressources. Celles-ci peuvent provenir soit d�une hausse des cotisations mais le patronat fran�ais y a oppos� son veto, soit de financements compl�mentaires par l�imp�t, ce qui change la nature du syst�me. Le syndicat Force Ouvri�re l�a fait observer : �Les r�serves de l�Agirc et de l�Arrco changent de nature. D�amortisseurs, elles deviennent r�servoirs et s�il n�y a pas de volont� de mettre du carburant dans la machine, nous ne tiendrons pas.� Le projet d�accord, sur lequel les syndicats doivent se prononcer, pr�voit, certes, un rendez-vous au second semestre de 2015 pour faire le point sur la situation �conomique, pour actualiser les pr�visions d��quilibre et examiner, le cas �ch�ant, la question d�une augmentation des ressources que le vieillissement de la population � les retrait�s sont plus nombreux et la dur�e de vie � la retraite s�allonge � rend n�cessaire. Sauf, bien s�r, � vouloir privatiser le syst�me et l�ouvrir davantage � la capitalisation. �Derri�re tout cela, on change de mod�le. Je ne suis pas l� pour brader la retraite par r�partition. Les assureurs n�attendent que cela�, a insist� la pr�sidente de la Caisse nationale d�assurance vieillesse (Cnav). Les associations de retrait�s volent au secours des veuves A la veille de la reprise de la n�gociation sur les retraites compl�mentaires, les associations de retrait�s de tous bords d�noncent les �conomies envisag�es par le patronat pour �quilibrer les comptes de l�Agirc (r�gime des cadres) et de l�Arrco (non cadres). De fait, l�Union des industries et m�tiers de la m�tallurgie (UIMM), qui pr�side de la commission protection sociale du patronat, a imagin� de r�duire de mani�re draconienne le co�t, pour les r�gimes de retraite compl�mentaire, de la pension de r�version. Celle-ci est vers�e au conjoint survivant. Le chef de file de la d�l�gation patronale propose deux modifications substantielles. D�une part, il veut ramener le taux de l�allocation de r�version � l�Agirc et � l�Arcco de 60% actuellement � 54% au 1er janvier 2016. D�autre part, il propose de lier le montant de la pension � la dur�e du mariage. Ces deux propositions, r�cus�es par les syndicats, rapporteraient 5,7 milliards d�euros � l�horizon de 2030. Mais les associations de retrait�s ont assez vite d�couvert le pot aux roses. Et elles s�insurgent contre l�id�e que l�on puisse faire autant d��conomies sur le dos des veuves et des veufs. Si elle �tait appliqu�e, la premi�re mesure p�naliserait deux cat�gories de retrait�s qui se recoupent largement : ceux qui ont des petites pensions et les femmes, car vivant plus longtemps que les hommes, elles sont plus nombreuses qu�eux � percevoir une pension. Tous r�gimes confondus, 3,75 millions de personnes �g�es de 54 ans ou plus percevaient une pension de r�version au 31 d�cembre 2004 (derni�re ann�e pour laquelle on dispose de statistiques inter-r�gimes). Parmi elles, 1 million de retrait�s, essentiellement des femmes, n�avaient pas d�autres revenus. En 2008, le montant moyen de la pension vers�e par les r�gimes de retraite �tait de 534 euros � la Caisse nationale d�assurance-vieillesse (Cnav, r�gime de base), de 283 euros � l�Arrco et de 721 euros � l�Agirc. Les pensions de r�version �tant respectivement de 288,36 euros, 169,8 euros et de 432,6 euros. Au 1er janvier 2016, en appliquant les 54%, elles tomberaient alors � 152,82 euros � l�Arrco et � 389,34 euros � l�Agirc. �Se lancer, aujourd�hui, dans une telle r�forme est impossible. Cela p�naliserait trop fortement les femmes et les petites pensions�, estime la pr�sidente de la Cnav. Quant � la proposition de lier la pension de r�version � la dur�e du mariage, elle n�est pas chiffr�e. Mais elle risque fort de p�naliser les jeunes qui se marient plus tard et divorcent davantage que leurs a�n�s. Les associations familiales, de leur c�t�, critiquent les propositions d�alignement des avantages familiaux, qui n�apparaissent pourtant d�favorables qu�aux seules familles nombreuses et ais�es. Cela fait beaucoup de m�contents.