[email protected] Par son caract�re massif et d�termin�, la r�cente d�monstration estudiantine a certainement mis en relief la nature timor�e de l�opposition politique et notamment son relatif ancrage dans la soci�t� qui fait que sa capacit� de mobilisation n�est gu�re significative. Or, si ce constat vaut pour quelques chapelles du monde politique et certaines associations de la soci�t� civile pourquoi ne le serait-il pas pour le syndicat officiel, qui bat en retraite en rase campagne, au moment o� il aurait d� �tre en premi�re ligne ? Depuis janvier, qui a vu l�explosion de la col�re sociale se r�pandre dans l�ensemble du pays, l�UGTA de Sidi Sa�d se terre silencieusement. Trois mois apr�s cette alerte grandeur nationale, alors que les gr�ves sectorielles se multiplient, le sommet de cette �centrale� demeure dans la m�me expectative. Cette d�sertion du front social, qui est pourtant le seul lieu o� doit s�affirmer sa l�gitimit� syndicale, interroge justement les commentateurs de presse(1). D�j� y d�c�lent-ils une sorte de chant de cygnes d�une �quipe compromise par ses pratiques et peut-�tre m�me la disparition, � terme, du sigle lui-m�me qui viendra clore une �poque historique. La projection ne manque pas de pertinence lorsque les travailleurs rappellent que la derni�re fois o� ils ont entendu l�actuel SG s�inscrire en faux contre les options �conomique et sociale du gouvernement remonte � 1993 ! Huit ans apr�s ce dernier sursaut d�indignation, jamais plus les caciques de cette CEN copt�e n�ont os� contrarier les choix �dict�s. Il est donc loin le temps o� Sidi Sa�d trouvait � redire sur les �m�pris� (sic) � l��gard des travailleurs et � critiquer m�me ouvertement les technocrates du r�gime les qualifiant de �techniciens d�nu�s de sens politique�. Entretemps, deux �pr�sidentielles � sont pass�es par l� ainsi que quelques sulfureuses suspicions d�affairisme qui ont fini par �assagir � un leadership syndical re-caporalis� comme � l��poque du parti unique. Son d�clin conna�tra plusieurs paliers selon les exigences du pouvoir politique. D�abord �amicalement � insistantes sur le soutien de l�UGTA, celles-ci devinrent clairement comminatoires au lendemain de l�affaire �Khalifa�, entre autres. Devenue une institution sans ressort et totalement aspir�e par le jeu du pouvoir, l�UGTA tra�nera, de surcro�t, une r�putation peu conforme � l��thique de son combat. De moins en moins exigeante dans la m�diation au c�ur des conflits sociaux, elle a vu, d�s l�ann�e 2001, l��mergence de courants autonomes remettant en question un monopole d�finitivement asservi par la sph�re du r�gime. Eloign�s des revendications ouvri�res et concubins de la classe dirigeante, ses animateurs ne pouvaient que subir toutes les disgr�ces publiques. De celles qui leur furent inflig�es � Rouiba o�, sur le carreau de leurs usines, les gr�vistes les �conduisirent sous des quolibets inf�mants. Sidi Sa�d et ses pairs de la CEN, violemment qualifi�s de �cols blancs� par les �bleus de chauffe�, ne sont plus en mesure de jouer le moindre r�le dans la crise structurelle que traverse l�Alg�rie. D�vitalis�e en termes de syndicalisation, l�UGTA est aujourd�hui contrainte de constater la mont�e en puissance d�autres formes d�organisations se structurant aussi bien � travers des affinit�s corporatistes que par des convergences transversales d�un m�me secteur d�activit�. Parce que la �Maison du 1er-Mai� a d�sert� publiquement le champ de la confrontation avec les pouvoirs publics et qu�elle s�est laiss�e corrompre � travers les privil�ges du carri�risme, n�est-elle pas d�sormais per�ue sous le prisme peu enviable de faire-valoir ? Une sorte d�annexe des f�odalit�s politiques et des puissances de l�argent instrument�e pour faire le �m�nage � sur le front social. Sidi Sa�d r�duit � un hochet dans le complexe �chiquier des sph�res du pouvoir, ne s�est-il pas finalement content� des simulacres ? Un exercice qui lui a assur� une long�vit� � son poste (1998 � ce jour) mais en revanche a contribu� � dilapider une certaine philosophie du syndicalisme unitaire avec ce que le concept d�unit� dans la lutte suppose de puissance dissuasive dans la relation avec le pouvoir d�Etat. Apr�s lui, il ne restera plus rien de cette solide profession de foi laiss�e en h�ritage. Celle qui appartient aux Benhamouda et Djermane qui avaient milit� contre les d�mons de la caporalisation � deux �poques diff�rentes. Bradeur � son corps d�fendant, ce secr�taire g�n�ral vient de solder l�existence d�un syndicat historique. B. H. (1) Se r�f�rer � l�article paru dans El Watan du jeudi 14 avril �La longue agonie d�une centrale syndicale�.