Par Hassane Zerrouky La mort de Ben Laden ne doit pas occulter ce fait majeur : ceux qui ont fait chuter Ben Ali, puis Moubarak, et ceux qui se battent en Alg�rie et ailleurs pour des changements d�mocratiques ne se r�clament pas des id�aux r�actionnaires du chef d�Al-Qa�da, mais des valeurs universelles de la d�mocratie. Reste que sa disparition, intervenant dans un contexte de bouleversements sociopolitiques sans pr�c�dent dans les pays arabes et maghr�bins, n�affectera pas le mouvement de d�mocratisation en cours dans le monde arabe et maghr�bin. Et c�est l�essentiel. Mais le silence de l�Alg�rie, th��tre d�un terrorisme islamiste d�vastateur (plus de 100 000 morts tout de m�me !), est incompr�hensible. En Tunisie, en voie de tourner la page de l�autoritarisme et de la pr�dation, les attentes sont � la mesure des espoirs suscit�s par la chute du r�gime de Ben Ali. Dans le d�bat qui se cristallise sur le type de r�gime � instaurer, certains acteurs politiques � Ennahdha par exemple � veulent effacer le �legs� positif de feu Habib Bourguiba, en remettant en cause le statut de la femme� au nom de la d�mocratie ! Pas s�r qu�Ennahda, qui n�a jou� aucun r�le dans la chute de Ben Ali, ne soit pas contraint de mettre un peu d�eau dans son l�ben ! L��gypte, c�est un autre cas de figure. Les Fr�res musulmans, qui ont pris le train de la r�volution en marche, ont cr�� un parti politique en vue des prochaines �lections. Au nom de la d�mocratie, ils comptent bien rafler la mise et, partant, embastiller les aspirations des vrais acteurs de cette r�volution (les jeunes) sans qui Hosni Moubarak serait encore au pouvoir. Au Maroc, l�attentat de Marrakech a redonn� espoir aux conservateurs du Makhzen. Dans ce pays o� le Mouvement du 20 f�vrier prenait de l�ampleur, les conservateurs et les partis politiques makhz�niens, avec la complicit� des partis de gauche parlementaires, tentent de reprendre la main� au nom de la lutte contre la menace terroriste ! Objectif : emp�cher l��mergence d�une monarchie parlementaire o� le roi r�gne et ne gouverne pas. Au Y�men, Abdallah Saleh, qui a paru c�der, fait de la r�sistance : il a refus� de signer l�accord au terme duquel il devait quitter le pouvoir dans un mois ! La Syrie, pays multiconfessionnel � Alaouites minoritaires qui d�tiennent la r�alit� du pouvoir, chr�tiens, druzes, chiites, Kurdes et sunnites majoritaires � c�est un peu plus compliqu� que la vision qu�en donnent les m�dias occidentaux. C�est un peu le Liban � une plus large �chelle. Reste que le r�gime de Bachar Al-Assad croit r�gler le probl�me en �crasant une r�volte qui, pour l�heure, n�a lieu que dans les r�gions � majorit� sunnite. Pour ce r�gime, qui a cru gommer les diff�rences confessionnelles et ethniques au nom d�un panarabisme autoritaire d�pass�, l�alternative est simple : ou il compose avec ses adversaires ou il tombera. Quant � la Libye, pays min� par le tribalisme, o� le pseudo-r�volutionnaire Kadhafi a emp�ch� l��mergence d�une soci�t� civile par la gr�ce de la rente p�troli�re coupl�e � une f�roce dictature, elle est en train de s�installer dans la guerre civile. Et ce, au grand dam de Nicolas Sarkozy et du �g�n�ral� Bernard Henri- L�vy qui avait pr�dit une victoire �clair ! Et notre Alg�rie dans tout cela ! En ce mois de mai, et bien avant, on a assist� � une pluie de belles annonces. Des r�formes politiques confi�es au pr�sident du S�nat qui avait pr�sid� en 1993-94 la Commission du dialogue national. Des augmentations de salaires que l�UGTA, grande absente des luttes sociales, cherche d�sesp�r�ment � r�cup�rer. A quoi s�ajoute ce projet de d�p�nalisation des d�lits de presse. Et, quoi que tente le pouvoir politique pour contenir le m�contentement et les aspirations au changement, sous la double pression de ce qui se passe dans le monde arabe et maghr�bin et occidental, une chose est certaine : dans la nouvelle configuration sociopolitique en train d��merger dans les pays arabes et maghr�bins, l�Alg�rie ne pourrait pas se recroqueviller sur elle-m�me, parier sur la survie de Kadhafi ou du r�gime syrien, rester � l��cart des changements en cours, et continuer � v�g�ter dans une semi-modernit� o� le religieux a le dernier mot.