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INTERVIEW DE DERRI BERKANI
�Une grand-m�re de Dellys nous a toujours dit de nous souvenir que nous sommes andalous�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 02 - 07 - 2011

Le Soir d'Alg�rie : Votre roman s'inspire de l'histoire du peuple morisque de Grenade. Qui sont-ils et quel fut leur destin ?
Derri Berkani : � la chute de Grenade en 1492, les Maures avaient obtenu, moyennant finances, de garder leurs noms, de pratiquer leur religion, de parler leur langue, et de garder leurs coutumes. Puis, peu � peu, les royaumes de Castille et d�Aragon imposent des restrictions. Le pape, par le biais du clerg� et des congr�gations, exige l��vang�lisation de tous les Maures. Les Morisques, ce sont donc des Maures convertis au christianisme. Les �Vieux chr�tiens� les guidaient dans leur nouvelle foi. Soup�onn�s de pratiquer clandestinement l�islam, ils furent d�abord d�port�s vers des r�gions majoritairement chr�tiennes du nord du pays. Beaucoup p�rirent au cours de ce voyage. Somm�s d�abandonner leurs pratiques suppos�es et de vivre en bons chr�tiens, ils eurent � subir la rigueur de l�Inquisition, avec le b�cher en corollaire. Puis, enfin, en 1609, un arr�t� royal de Philippe II d�cr�te leur expulsion en �Berb�rie�, certains furent carr�ment noy�s � quelques milles des c�tes espagnoles. En Alg�rie, pendant longtemps, on les a appel�s �les chr�tiens de Galice �. Ils �taient mal install�s entre les deux rives comme on est mal assis entre deux chaises.
En quoi vous sentez-vous concern� par ce peuple ?
Une grand-m�re de Dellys nous a toujours dit de nous rappeler toujours que nous �tions andalous. De ne jamais l�oublier. Pourquoi ? Je n�en sais rien. Peut-�tre pour se distinguer des autres, peut-�tre �tait-ce simplement une m�thode d��ducation. �tant Andalous, nous devions mieux nous tenir, mieux faire, mieux �tudier que le reste des enfants. De ce point de vue, elle a r�ussi.
Qu'est-ce que le serment andalou dont parle votre narrateur ?
Le serment poss�de un vecteur, LA CL� cens�e �tre celle de la maison d�une anc�tre grenadine (de Grenade) qui l�aurait emport�e lors de l�expulsion. Le serment se fait autour de cette cl�. Avec deux objectifs :
1) se pr�munir contre l�oubli du bannissement qui des si�cles plus tard continue toujours d��tre v�cu comme une injustice impos�e par la loi du vainqueur.
2) Il affirme une appartenance non pas pour se distinguer de l�autre, mais au contraire s�ouvrir.
3) Il souligne l�imp�ratif d�humilit�. Parce que pour ces exil�s, l�ostentation, le faste des souverains andalous n�est pas pour rien dans la perte d�Al Andalous.
Le narrateur du p�riple andalou se sent investi d'un devoir de transmission. Ce devoir est-il selon vous un imp�ratif, en particulier pour les peuples ou les individus d�plac�s ? Comment vaincre � cet �gard l'indiff�rence des jeunes g�n�rations ?
Pour transmettre, il faut un r�cipiendaire. L�indiff�rence des jeunes g�n�rations vient de leur d�senchantement. Ils se m�fient du pass�. Il n��claire plus leur pr�sent. Ou alors � la mani�re d�un flash, non d�une lumi�re continue qui finit par les aveugler. Il est vrai qu�� conduire l��il riv� sur le r�troviseur, on risque t�t ou tard un accident majeur.
Vous ancrez votre fiction dans l'actualit� politique de la France, celle du durcissement des lois fran�aises sur l'immigration. Comment la politique actuelle du gouvernement Sarkozy peut-elle par analogie �voquer le triste sort des Morisques ?
Tous les jours Sarkozy d�l�gue ses chiens de garde (Hortefeux, puis Gu�ant sans oublier les pizzaiolos du sud-est) pour stigmatiser le rebeux, qui devient le bouc sacrificiel de la Sarkosie. La peur fait le reste. On parle de revoir l�attribution de la nationalit�. Sarko lui-m�me oppose maintenant citoyennet� et peuple. C�est un th�me typiquement fasciste, voire nazi. Le wolk, la loi du sang. � terme, une expulsion massive pourrait bien �tre envisag�e par un gouvernement de droite alli� au FN.
Vos romans sont un r�quisitoire contre l'intol�rance en g�n�ral et religieuse en particulier, qu'il s'agisse ici du fondamentalisme catholique ou de l'islam de combat. L'islamisme estil la sainte Inquisition d'aujourd'hui ?
Le monoth�isme en g�n�ral tend vers le totalitarime. L�islam qui pr�tend r�gler la vie du croyant m�me dans ses aspects les plus intimes en est l�illustration. De ce point de vue juda�sme et islam sont tr�s proches, certains th�ologiens ont m�me avanc� que le Coran n��tait que la traduction en arabe de la Thora. Le christianisme lui s�est temp�r� par la parole d�amour et de pardon de J�sus. L�islamisme politique qui contraint, assassine corrompt pour s�imposer est � mon avis pire que l�Inquisition.
Vous soulignez �la parfaite compl�mentarit�, dites-vous, des islamistes et des Sarkozystes. En quoi repr�sentent-ils, selon vous, �les deux faces d'une m�me m�daille� ?
Les fondamentalistes mettent leur femmes sous niqab, c�est pain b�ni pour Sarkozy qui pond aussi sec une loi. Les islamistes envahissent la rue le vendredi pour soidisant prier, Sarkozy d�nonce l�atteinte intol�rable � la libert� de circuler, alors qu�il lui �tait simple de demander � la police d�interdire ces pri�res. Il a besoin du clash pour d�noncer. Que deviendraient Sarko et ses sbires si les islamistes ne lui offraient pas ces occasions politiques ?
Par son registre de langage et le cadre de son action qui se d�roule en partie en mer, Le p�riple andalou est aussi un roman de la mer. Quelle place cet �l�ment tient-il dans votre vie ? Qu'apporte � l'�crivain que vous �tes la navigation en solitaire ?
Pour acc�der � l�humilit� de l��me ch�re � la grand-m�re, rien ne vaut une navigation � la voile en M�diterran�e. C�est une mer hyst�rique qui passe du calme plat au coup de vent de force 8 en quelques heures. Ses vagues sont courtes, r�geuses donc tr�s dangereuses. Face � cette force, il faut �tre humble. Faire le dos rond. Attendre. C�der quand il le faut. Pr�parer le bateau. Choisir l�allure et prier Neptune (pas un autre) de calmer cette furie. D�autre part, �crire est une navigation en solitaire.
Propos recueillis par Meriem Nour
Note bio
Derri Berkani est n� le 3 septembre 1937 � Dra�-El-Mizan. Apr�s des �tudes de m�decine, il int�gre l'Institut des hautes �tudes cin�matographiques (IDHEC). R�alisateur, documentariste, il est aussi l'auteur de 5 romans, tous parus aux �ditions L'Harmattan : Ne montre � personne (1995), la Kahena de la Courtille(2002), le Tournesol fou (2004), le Retourn�(2007), le P�riple andalou(2011).
Signet
Nostalgie ? L'Andalousie est le paradis perdu de ceux qui n'ont pas de paradis. C'est pourquoi le regret se cristallise dans cette r�gion d'Espagne o� le r�ve d'une fraternit� et d'une harmonie s'est r�alis�, du moins en est-il ainsi dans la m�moire gard�e vivace. Mais le r�ve finit en cauchemar ou plut�t n'en finit pas de finir. C'est ce que nous raconte le roman de Derri Berkani. Avant d'�tre chass�s d'Andalousie, les Maures ont �t� oblig�s de se convertir au christianisme en prenant le nom de Morisques. Discrimin�s en Andalousie en tant que musulmans et en Afrique du Nord, apr�s le reflux, en raison de leur christianisme, ils ressemblent aux �migr�s d'aujourd'hui qui sont toujours de l'autre rive. Une histoire qui repart avec d'autres noms.
Bachir Agour
P�riple andalou
A l'�ge o� ses confr�res jouent au golf ou se mettent � l'�tude du piano, Abderrahmane Avercane, m�decin urologue � la retraite, embarque en solitaire sur une trinquette baptis�e Jugurtha. Il part � la recherche des traces laiss�es par ses anc�tres morisques, conform�ment � la promesse faite � l'a�eule, Mina, de retourner un jour en Al-Andalous. �Des gamineries� pour sa femme Myriem qui ne le comprend pas, pas plus que ses filles Nadia et Safia plus sensibles au combat pour l'�galit� entre les sexes, � travers la lutte anti-niqab, qu'� la qu�te de leur p�re. La fiction s'ancre dans l'actualit� politique de la soci�t� fran�aise. Un projet d'introduction des tests ADN dans un ensemble de lois sur l'immigration propos�es par le gouvernement Sarkozy, et leur cons�quence imm�diate, la stigmatisation de toute une population, renvoie le narrateur quatre si�cles en arri�re. S�vissaient alors les th�ories de la puret� du sang � l'origine de la pers�cution puis de l'an�antissement des Morisques. Le devoir de transmission, une forme de �r�sistance contre l'in�luctable�, est symbolis�e par une cl� en bronze cens�e avoir appartenu � l'anc�tre chass�e de Grenade en 1609 : �Cette cl� m'a appris le caract�re sacr� de mon existence. Elle a replac� l'individu isol� que je suis dans la cha�ne des g�n�rations.� Ce th�me de la qu�te illustr� par l'objet conf�re au roman de Derri Berkani un caract�re initiatique. Il induit une r�flexion philosophique sur le sens de l'histoire, son �ternel recommencement et la responsabilit� interg�n�rationnelle. Le p�riple donne lieu, � travers l'�vocation du sort de la lign�e, au r�cit de l'histoire tragique des Morisques qui, d'Espagne en Berb�rie, furent condamn�s au silence, � l'errance, au vagabondage. En bateau d'abord, puis conform�ment aux prescriptions de l'anc�tre, humblement � pied ou � dos d'�ne, le narrateur tente d'accomplir son destin, celui de passeur de la tradition. L'auteur m�le avec audace et habilet�, histoire et actualit�, l'une �clairant l'autre et inversement. Il donne � la premi�re une dimension �pique illustr�e par des personnages puissants, haut en couleur, embl�matiques de la qu�te. De Baba Lakhdar, le patriarche, homme de culture sauvant les �uvres d'Averro�s des flammes de l'Inquisition, � son �pouse Lalla Khadidja d�chir�e par le rapt de ses fils convertis de force au catholicisme, et pourtant jamais an�antie, en passant par la tante amti Khe�ra, adepte du ma�tre soufi Ibn Arabi ou Ibrahim son �poux m�cr�ant, mauvais chr�tien et musulman ex�crable, la lign�e des Avercane t�moigne de la grandeur et de l'an�antissement d'un peuple. Grandeur et d�cadence aussi de l'esprit d'Al-Andalous tu� hier par la Reconquista et aujourd'hui par l'esprit mercantile qui sacrifie la culture � la recherche du profit. Ainsi, au rythme du cheminement du narrateur d�file l'histoire morisque de l'Espagne chant�e sur les po�mes de Garcia Lorca avant d'aborder les terres de Berb�rie et les heures tragiques de la conqu�te de l'Alg�rie. L'�criture de l'auteur est cisel�e, pr�cise et luxuriante. Le registre de la mer, un th�me r�current chez ce marin en solitaire, est particuli�rement d�lectable. Il alterne le bruit des pales frappant l'eau sur un air de zambra �musique morisque � au lamento scand� par les femmes �voquant l'histoire des pers�cutions. Pour �tre po�tique son �criture n'en est pas moins ac�r�e et critique tant � l'�gard des fondamentalistes de tous les temps, qu'ils soient catholiques ou islamistes, que des populistes qui stigmatisent des populations qu'ils vouent � l'opprobre et au lynchage, actionnant les peurs pour des raisons �lectoralistes. �A quoi rime cette recherche tardive de racines fantaisistes ?� lorsque l'oubli a fait son �uvre. Question lancinante qui n'appelle d'autre r�ponse que la sagesse du narrateur : �Des odeurs, le bruissement des fontaines, le reflet des bassins. Voil� tout le legs de mes anc�tres andalous.�


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