Pas d�accalmie pour le budget. Apr�s un long et sinueux chemin de p�nitence, parsem� d��cueils budg�tivores, la mercuriale continue � faire des siennes, au grand dam des m�nages qui ne savent plus sur quel pied danser. Le tierc� perdant, Ramadan- A�d-rentr�e scolaire, a mis les comptes � sec. Mais l�h�morragie ne semble pas pour autant vouloir s�arr�ter en si bon chemin. Les grosses t�tes ! Les fruits et l�gumes ont pris la grosse t�te. Dans les march�s, contrairement au couffin de la m�nag�re, r�solument vide, le vase est, quant � lui, plein ! Un petit tour dans les diff�rents souks de la capitale a suffi pour mesurer l�intensit� du brasier. Au jour d�aujourd�hui encore, au march� Ali-Mellah, � la place du 1er-Mai, de nombreux �tals sont vides. Quant aux autres, ils font carr�ment fuir les rares clients qui tournent en rond, pestant contre des prix compl�tements fous. �Mais, ma parole, ils sont tomb�s sur la t�te !� laisse �chapper une bonne femme qui �r�fl�chissait � � haute voix. Laitue et tomate � 120 DA, courgettes et aubergines se sont donn� le mot � 70 DA, carottes et poivrons roulent les m�caniques � 80 DA, le haricot vert joue les stars � 140 DA, m�m� �Dame pomme de terre� fait sa mijaur�e � 55 DA� Du c�t� des fruits de saison, aucune concession non plus. Le raisin dandine entre 160 DA et 250 DA le kilo, la past�que caracole � 50 DA, les pommes � 120 et plus et les figues � 140 DA. Apr�s avoir fait trois fois et demie le tour du march�, une m�nag�re, qui ne voulait pas c�der � la duperie, d�cide de quitter les lieux sans rien dans son petit couffin. �Ya latif a�l miziria ! On regarde avec les yeux, mais on ne peut rien acheter. La derni�re fois, je n�ai m�me pas pu satisfaire l�envie de mon petit gar�on qui salivait � la vue des p�ches. A pr�sent, j��vite de le tra�ner avec moi. Je suis dans l�incapacit� de satisfaire son caprice d�enfant !� d�plore-t-elle. Selon un vendeur, c�est du c�t� des mandataires du march� de gros qu�il faut aller voir. Une vieille rengaine qu�on conna�t par c�ur. Un autre marchand nous expliquera que cette envol�e des prix au d�tail est due � la raret� des fruits et l�gumes� Un troisi�me justifie le brasier par l�absence de beaucoup de grossistes et d�taillants, encore en cong� depuis l�A�d. Ce qui n�a pas �chapp� au commentaire d�un retrait� �Seraient-ils encore en train de compter leurs sous ?� Un Ramadan en cache un autre ! A l�entr�e du march� Ferhat- Boussa�d (ex-Meissonier), pr�s de la placette, une sc�ne des plus affligeantes s�offre � nos yeux. Autour des bennes � ordures, tournoient une nu�e de mouches, une escadrille de chats et� des femmes en qu�te de quelques aliments jet�s, n�anmoins susceptibles de remplir l�estomac de leurs enfants. Feuilles de salade encore fra�ches, tomates � moiti� pourries, pattes et croupions de poulets� elles trient et emportents des restes � m�me de les aider � pr�parer un semblant de repas. Appr�hendant notre question, une quinquag�naire occup�e � faire une derni�re s�lection des aliments r�cup�r�s de la benne � ordures tient � r�pliquer. �Vous savez, de nos jours, il n�est pas facile de trouver du travail. Et entre voler ou tendre la main, je pr�f�re encore venir ici. J�essaye quand m�me de faire attention � ce que je prends pour ne pas mettre en p�ril la sant� de mes enfants !� Sur ces propos exprim�s avec tant de dignit� et d�authenticit�, nous ne pouvions qu�esquisser un hochement de t�te, en signe d�impuissance et poursuivre notre chemin. Ferm� pendant plusieurs mois pour des travaux de r�novation, le sous-sol de ce march� a rouvert depuis quelques jours seulement. �C�est la montagne qui accouche d�une souris. On a priv� les citoyens de ce march�, nous entassant comme des sardines dans sa partie sup�rieure pendant presque une ann�e, juste pour un voile de peinture et un peu plus d��clairage ! De qui se moque-t-on ?� s�exclame un riverain exasp�r� par les �tals vides. Les commer�ants qui ont r�investi leurs casiers mettent les bouch�es doubles pour faire recette. Les prix ont la fi�vre. On a m�me aper�u des mini-tomates rachitiques et �crabouill�es � 90 DA et des feuilles de laitue fl�tries � 130 DA. Selon une dame rencontr�e sur place, le Ramadan joue les prolongations. �Tant que durera le mois o� les gens je�nent �essabrin�, les prix des fruits et l�gumes ne fl�chiront pas !� argue-t-elle. N�cessit� oblige ou par facilit�, les alentours de tous les march�s sont pris d�assaut par de nombreux mendiants. L�ordonnance qu�ils brandissaient est pass�e de mode. A pr�sent, ils vous supplient de leur faire quelques emplettes, histoire de faire bouillir la marmite. La paup�risation de la classe moyenne a d�j� commenc�. �Je touche 40 000 DA, j�ai deux enfants et je vous avoue que les fruits et la viande ne rentrent chez moi que rarement ! Alors, que dire de tous ces pauvres indigents��, nous r�v�le ce p�re de famille, cadre dans une entreprise nationale. �Il est temps que l�Etat prot�ge la dignit� de ses citoyens !� explose-t-il. Pour �viter une houleuse discussion qui se pr�parait comme une temp�te sans BMS, on a pr�f�r� s�extraire au d�bat qui devenait de plus en plus passionn� En tout cas, le nuage s��paissit toujours un petit peu plus ! A bon entendeur�