Par Abdelmadjid Bouzidi [email protected] Chine, Inde, Indon�sie, Turquie, pour ne citer que ces exp�riences sont des �conomies exportatrices de biens et notamment de produits manufactur�s et un des moteurs de leur croissance qui fonctionne bien est constitu� pr�cis�ment par ces exportations. Nous avons d�j� eu l�occasion de montrer cela. Ce que nous voulons souligner aujourd�hui c�est le fait que ces �conomies doivent en grande partie leurs bonnes performances exportatrices � l'accueil, sur leurs sites, d�IDE de plus en plus nombreux et � une strat�gie judicieuse de partenariat externe. D�s lors, l�Alg�rie qui fait face au d�fi de diversification depuis plus de deux d�cennies, a-t-elle raison d�appliquer une l�gislation sur les IDE aussi restrictive que celle actuellement en vigueur et peut-elle se permettre de n�gliger, comme elle le fait, de construire son attractivit� ? Dans le domaine des IDE, nous savons que l�Etat alg�rien a �resserr� les boulons�. Veut-il se passer des IDE ? Les nouvelles exigences vis-�-vis de ces derniers sont en effet assez contraignantes. � Balance de devises exc�dentaire (l�investisseur �tranger doit �faire rentrer plus de devises dans le pays qu�il n�en sort�). � Imp�t sur les dividences. � Capital d�tenu � un taux de 51 % au moins par des op�rateurs nationaux (m�me si ce taux est atteint par la r�union d�actionnaires alg�riens publics et priv�s). � Mobilisation du financement de l�IDE sur le march� bancaire alg�rien. Les commentateurs concluent � une indiff�rence, sinon carr�ment � un rejet, des IDE par les pouvoirs publics alg�riens. L�observation est certainement exag�r�e m�me si elle peut effectivement laisser perplexe quand on conna�t la concurrence qui r�gne entre les pays du Sud pour attirer les IDE, la place que ces IDE occupent dans l��conomie mondiale et le r�le qu�ils peuvent jouer dans les pays du Sud qui ont faim d�investissements, de technologie et de savoir-faire. Un peu d�histoire Une premi�re remarque : Nous avons d�j� eu l�occasion de produire l�analyse qui suit. Nous la rappelons pour aider � lire les r�centes d�cisions des autorit�s alg�riennes et en �valuer les cons�quences en termes de strat�gie de croissance et de d�veloppement �conomiques. Les d�cennies 60 et 70 ont �t� marqu�es comme nous le savons par une hostilit� ouverte des firmes multinationales. L�investissement direct �tranger (IDE) �tait per�u comme le vecteur de la pire exploitation que pouvaient subir les travailleurs et les richesses des pays du Sud de la part du capitalisme mondial. Rappelons-nous les th�ories du �Centre� exploiteur et de la �p�riph�rie� exploit�e ch�res notamment � Samir Amine ou encore celles de �l��change in�gal� d�Emmanuel. Bref, le d�veloppement �conomique ne pouvait �tre que le �compter-sur-soi� et la strat�gie du �self reliance� faisait flor�s. Depuis les ann�es 80, l��chec des mod�les �conomiques de type sovi�tique et le triomphe de l��conomie de march� ont entra�n� un changement d�analyse y compris chez les �experts� et autres sp�cialistes des �conomies en d�veloppement et la plupart des gouvernements des pays du Sud tendent de plus en plus � faire des IDE une composante de leurs strat�gies de d�veloppement et des firmes multinationales, des partenaires efficaces pour la diffusion du progr�s technique. Leur pr�occupation n�est plus de combattre les grandes entreprises internationales mais bien au contraire, celle de savoir comment faire pour attirer leurs investissements sur le territoire ; comment faire de celui-ci un site attractif des IDE. Et les statistiques corroborent cette nouvelle strat�gie des pays du Sud. Entre 1986 et 1990, les pays du Sud recevaient 18 % des flux mondiaux d�IDE. En 2001 et 2002, ils en recevaient 25 %. En 2008, pr�s de 30 %. Et ces chiffres sont d�plor�s par les pays du Sud qui les trouvent insuffisants par rapport � leurs besoins. L�IDE constitue aujourd'hui la principale composante des flux de capitaux en direction des pays en d�veloppement. En 1980, l�IDE repr�sentait 6 % du total des entr�es de capitaux dans les pays en d�veloppement. En 1990, 25 % et en 2008, 6 %. La crise financi�re de 1994-1995, la crise financi�re asiatique de 1997- 1998 et bien s�r, un peu plus t�t, la crise de la dette latino-am�ricaine (Br�sil) des ann�es 80 ont montr�, aux yeux de ces gouvernements du Sud, que les IDE �taient plus stables que les autres formes de flux de capitaux priv�s (investissements de portefeuille sp�culatifs ; pr�ts bancaires...). Les IDE pour le pays h�te ne sont pas seulement, soulignent les experts, un rapport financier non g�n�rateur de dette. Ils sont aussi un transfert de technologie, un acc�s � des informations sur les march�s internationaux, une int�gration au processus de mondialisation. Ainsi, l�id�e selon laquelle les IDE constituent un �paquet� de ressources qui peut agir comme catalyseur de d�veloppement pour le pays h�te s�est impos�e malgr� quelques r�sistances irr�ductibles d�anticapitalistes purs et durs. Bien �videmment, il ne faut pas se leurrer : les IDE correspondent et traduisent d�abord les nouvelles strat�gies des multinationales dans leur conqu�te de nouveaux march�s et dans leur recherche de taux de profit les plus �lev�s possibles : les d�localisations, les processus d�outsourcing, d�externalisation sont d�abord et avant tout des r�ponses des multinationales � la crise de l'accumulation capitaliste. Mais les IDE peuvent aussi �tre, aujourd'hui, plus qu�hier, des vecteurs de croissance pour les pays du Sud. Pr�cisons tout de suite : sous certaines conditions. Il faut d�abord que le pays h�te ait une r�elle capacit� d�absorption, c�est-�-dire un contexte �conomique local qui permet de tirer b�n�fice de l�IDE. Et les �l�ments constitutifs de ce contexte favorable concernent en premier lieu le capital humain et pour �tre plus pr�cis, les niveaux de formation et de qualification des collectifs de producteurs locaux et qui doivent �tre �lev�s. Une capacit� d�apprentissage locale suffisante est une condition n�cessaire pour assimiler localement les technologies introduites par les multinationales. �Lorsque le retard technologique du pays h�te est grand, les multinationales vont op�rer dans des enclaves et les retomb�es sur la productivit� des entreprises locales seront bien limit�es.� Pour capter les externalit�s des IDE, il faut que le pays h�te dispose d�un capital humain et d'infrastructures de base importantes. De plus, l�IDE sous forme de simples filiales de la multinationale, tourn�e vers le seul march� local, sans connexion avec l�entreprise m�re qui, elle, est int�gr�e aux r�seaux mondiaux, diffusera peu d�effets technologiques, manag�riaux, etc. dont pourrait profiter l�entreprise locale. Le pays h�te doit, ici, mettre en place un cadre r�glementaire qui permet la fluidit� filiale-maison m�re et qui ne doit pas isoler la filiale dans le seul contexte local. Une autre condition, et non des moindres, pour que l�IDE soit utile et efficace pour le pays h�te, est celle qui a trait au climat des affaires local : la corruption, l�absence de l�gislation claire sur la propri�t�, le non-respect de la concurrence diminuent consid�rablement l�effet positif de l�IDE sur le pays d�accueil. Pour r�sumer, trois observations 1/ Les pays du Sud et parmi eux, ceux qui ont l�ambition de devenir des �conomies �mergentes ont int�r�t � attirer sur leurs territoires le maximum d�IDE. Et l�attractivit� se construit. 2/ Les IDE n�apportent pas par eux-m�mes et ne contiennent pas en eux-m�mes le d�veloppement �conomique, le progr�s technologique et l�am�lioration de la productivit� de l��conomie d�accueil. Pour tirer b�n�fice des IDE, cette derni�re doit remplir des pr�requis : l�gislation sur la propri�t� claire et transparente ; lutte d�termin�e contre la corruption ; formation d'un capital humain local et soutien � la recherche-innovation. Il y aura alors partenariat �win-win� (gagnant-gagnant). 3/ L�IDE ne doit pas �tre vu comme simple apport de capitaux (ce dont certains pays peuvent se passer � l�image de l�Alg�rie d�aujourd�hui). L�IDE, c�est le transfert de technologie, c�est l�acc�s aux march�s ext�rieurs, c�est l�acc�s � l�information internationale, c�est l�int�gration par le haut � la mondialisation de l��conomie. Il faut, bien entendu, y aller mais bien pr�par�, dans le cadre d�une strat�gie appropri�e qui r�pond aux contraintes que vit le pays d�accueil et qui maximise les gains esp�r�s, en sachant bien que les IDE ont aussi un co�t pour le pays h�te Chercher � minimiser ce co�t par une l�gislation appropri�e, un choix judicieux des investisseurs et une transparence dans les actes de partenariat. C�est cette d�marche que doit adopter l�Alg�rie et non pas celle qui consisterait � tourner le dos aux IDE gris�e par une aisance financi�re toute relative et bien �ph�m�re.